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Reçu hier — 1 décembre 2025

Électroscope #5 : des batteries plus efficaces, de la moelle épinière de synthèse et des betteraves modifiées

1 décembre 2025 à 04:58

Thérapies CAR-T contre les maladies auto-immunes, batteries lithium-métal plus denses, moelle épinière « cultivée » en labo, betteraves armées par CRISPR et IA de codage : ce nouveau numéro d’Électroscope réunit 5 percées qui esquissent un autre futur !

Thérapies CAR-T : vers la fin des maladies auto-immunes ?

Et si certaines maladies auto-immunes, longtemps considérées comme « à vie », pouvaient bientôt être mises en pause durablement grâce à quelques cellules du sang reprogrammées en laboratoire ? C’est la promesse encore fragile, mais très suivie, des thérapies CAR-T.

À l’origine, ces traitements ont été conçus pour lutter contre des cancers du sang. Les médecins prélèvent des globules blancs particuliers, les lymphocytes T, les envoient au labo, où ils sont « reprogrammés » pour reconnaître une cible précise. Une fois réinjectés, ces soldats immunitaires traquent et épuisent les cellules visées.

Depuis peu, cette approche commence à être testée, avec succès, chez des patients atteints de lupus, de polyarthrite rhumatoïde, de spondylarthrite ankylosante ou encore de rectocolite hémorragique, des maladies attaquant le corps de l’intérieur. L’idée est ambitieuse. Elle consiste à éliminer les lymphocytes B déréglés qui fabriquent les auto-anticorps tournant leurs armes contre les tissus sains.

Les premiers résultats, obtenus sur de petits groupes de patients en impasse thérapeutique, font naître beaucoup d’espoir : disparition des poussées, traitements de fond arrêtés durant plusieurs mois. « Les personnes participant aux essais cliniques de thérapie CAR-T pour la polyarthrite rhumatoïde et le lupus semblent guéries », confie un spécialiste de l’hôpital de la Charité de Berlin. « Elles perdent les auto-anticorps responsables de la maladie et ne présentent plus aucun symptôme. C’est un phénomène totalement inédit. »

Certes, le nombre de patients reste limité, et il faudra un moment avant de pouvoir rendre ces thérapies accessibles au plus grand nombre au regard de leur prix colossal. Reste que pour la communauté médicale, une nouvelle page est en train de s’écrire : demain, même les formes sévères de maladies auto-immunes ne se résumeront plus à « apprendre à vivre avec » pour les patients.

Des véhicules électriques avec 70 % d’autonomie en plus avec Blue Solutions ?

Vers 1 000 km d’autonomie pour une voiture électrique, le tout sans grossir sa batterie d’un gramme ? C’est le futur que promet Blue Solutions, filiale du groupe Bolloré, avec sa nouvelle génération de batteries solides lithium-métal GEN4.

Lors d’un test réalisé début octobre dans son usine de Quimper, sous contrôle d’huissier, l’entreprise a remplacé la batterie d’origine d’un scooter électrique Easy-Watts par son tout dernier prototype GEN4. Résultat obtenu : 68,8 % d’autonomie en plus pour le véhicule (plus de 100 km parcourus avec la batterie de Blue Solutions, contre 63 km avec la batterie standard), tout en allégeant le poids de l’engin de 13 %.

Le secret tient dans une architecture tout-solide : une anode ultra-fine en lithium métal, de l’ordre de quelques dizaines de micromètres, associée à un électrolyte en polymère qui fonctionne à température ambiante. Cette chimie améliorée de la batterie permet de stocker beaucoup plus d’énergie dans le même volume, tout en améliorant la sécurité par rapport aux électrolytes liquides inflammables des batteries lithium-ion classiques.

L’entreprise, qui produit déjà des batteries solides à l’échelle industrielle en Bretagne et au Québec, prépare une nouvelle giga-usine en France prévue pour la fin de cette décennie. Si cette GEN4 tient ses promesses en conditions réelles et à très grande échelle, l’angoisse de la panne sèche électrique pourrait bien devenir un lointain souvenir…

Bientôt la première greffe de moelle épinière « cultivée » en labo !

Imaginez que l’on puisse réparer une moelle épinière abîmée avec un tissu fabriqué sur mesure à partir des propres cellules du patient ? C’est le pari de chercheurs de l’université de Tel-Aviv, qui s’apprêtent à lancer le tout premier essai humain en la matière.

Le principe consiste à prélever un petit échantillon de tissu, le reprogrammer en cellules souches, puis le faire maturer dans un hydrogel afin de produire un segment de moelle épinière en trois dimensions. Selon l’équipe, ce tissu serait en mesure d’imiter le développement normal de la moelle chez l’embryon, avec des neurones capables de transmettre des signaux.

Testée chez des souris rendues paraplégiques durant la phase préclinique, cette moelle épinière de laboratoire a permis à environ 80 % des animaux traités de retrouver la marche, alors que leurs lésions étaient chroniques et donc considérées comme irréversibles.

Forts de ces résultats, la start-up Matricelf (spin-off de l’université) et l’hôpital Sourasky, à Tel-Aviv, ont obtenu le feu vert du ministère israélien de la Santé pour traiter, dans le cadre d’un usage compassionnel, huit patients paralysés. Chaque implant sera personnalisé, conçu à partir des cellules du malade pour limiter les risques de rejet.

L’enjeu est évidemment immense. Il s’agit de la toute première tentative mondiale de réparer une moelle épinière humaine avec un tissu entièrement bio-ingénié. Les chercheurs restent prudents, car rien ne garantit que les bons résultats chez l’animal se retrouveront à nouveau chez l’humain, mais une nouvelle voie s’ouvre pour des millions de personnes vivant avec une paralysie considérée, jusqu’ici, comme définitive.

CRISPR au secours des betteraves : première résistance au virus de la jaunisse

Et si la betterave sucrière pouvait, elle aussi, apprendre à dire non aux virus de la jaunisse qui déciment ses cultures ? C’est ce que montrent des travaux récents, qui ont permis de créer des lignées capables de résister au BChV, l’un des principaux virus responsables de la jaunisse virale en Europe.

Or jusque-là, seul l’acétamipride, ce néonicotinoïde au cœur de la polémique sur la loi Duplomb, dont la réintroduction a été invalidée par le Conseil constitutionnel, avait la capacité d’éradiquer ce fléau.

Concrètement, des chercheurs de l’Institut de recherche sur la betterave sucrière de Göttingen, en association avec le semencier SESVanderHave, ont d’abord repéré dans la betterave un gène dont le virus a absolument besoin pour pouvoir se multiplier. On peut le voir comme une prise électrique : tant que ce gène est là, le BChV peut se brancher sur la machinerie de la cellule et l’utiliser pour se copier à grande échelle.

Grâce à l’édition génomique (la fameuse boîte à outils CRISPR), ce gène a pu être « débranché » dans certaines lignées expérimentales. Les plantes ainsi obtenues sont identiques aux betteraves classiques, à une différence près. Lorsqu’on les expose à des pucerons porteurs du virus, seules 30 % des plantes éditées sont infectées, contre 100 % des betteraves non modifiées. Et concernant les plantes éditées infectées malgré tout, celles-ci contiennent beaucoup moins de virus détectable dans leurs feuilles.

On parle ici d’une résistance dite « récessive ». La plante éditée n’attaque pas le virus : elle lui retire simplement un élément clé dont il a besoin. Pour les sélectionneurs, c’est une avancée majeure, car c’est l’une des premières fois que l’édition du génome permet de démontrer une résistance à un virus de la jaunisse virale chez la betterave sucrière.

Prochaine étape : confirmer ce résultat en plein champ et, si jamais la réglementation le permet, intégrer ce type de résistance dans les variétés destinées aux agriculteurs.

Claude Opus 4.5 : la première IA à dépasser 80 % sur SWE-Bench

Une IA capable de concevoir un site web complet, de la maquette au code, en passant par le contenu et les tests ? Voilà un proche futur que laisse entrevoir Claude Opus 4.5, le tout nouveau modèle d’Anthropic considéré comme la « nouvelle référence pour le codage et l’agentique », avec des performances record sur les tâches complexes.

Taillé d’abord pour les développeurs, Opus 4.5 dépasse les 80 % sur le benchmark SWE-Bench Verified, qui mesure la capacité d’une IA à corriger du code réel dans des projets open source, surpassant la performance de Gemini 3 Pro. Cela signifie que ce modèle ne se contente plus de suggérer quelques lignes de code, mais peut désormais gérer des modifications profondes dans des bases de code complexes.

Appliqué à la création de sites, un modèle de ce niveau peut déjà assister un développeur ou une agence sur plusieurs fronts : génération de squelettes HTML/CSS, propositions de structures de pages, aides au routage et à l’intégration, rédaction de contenus et même analyse d’un site web existant pour suggérer des refontes.

Tout n’est pas magique pour autant. La supervision humaine reste indispensable pour la cohérence graphique, l’expérience utilisateur et la conformité du site. Mais pour les studios web, freelances ou TPE, cette IA ressemble déjà à un collaborateur capable de prendre en charge une large partie de la chaîne de production d’un site.

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Reçu avant avant-hier

IA : la course au gigantisme est une arnaque... l'open source a déjà gagné ?

26 novembre 2025 à 10:25
Un des rares articles censés sur l'IA. Enfin, surtout les LLM, hein.
Les modèles génériques gigantesques des GAFAMs, qui nécessitent toujours plus de puissance de calcul, sont une impasse.
Des modèles beaucoup plus petits, plus modestes, mais *ciblés* pourront être efficace. Non seulement ils seront meilleurs dans leurs résultats (car entraînés sur des données bien ciblées au lieu d'avoir bouffé tout internet), mais ils seront également beaucoup moins demandeurs en CPU/GPU/RAM et en électricité pour les faires tourner.

(Pour avoir un ordre de grandeur, Futo Keyboard fournit un modèle de reconnaissance vocale (transcription audio vers texte) qui reconnaît plusieurs langues et ne pèse que 79 Méga-octets et peut tourner sur un smartphone.)
(Permalink)

Gemini 3 : le réveil de Google

26 novembre 2025 à 06:01

Souvenez-vous : fin 2022, ChatGPT débarque et sème la panique chez Google. Bard, leur réponse précipitée, fait rire toute la Silicon Valley. 3 ans plus tard, le géant de Mountain View vient de reprendre la tête de la course à l’IA d’une manière qui force le respect de tous les observateurs. Son arme fatale : Gemini 3.

Le 18 novembre 2025, pendant que le monde débattait des « murs de scaling » — cette idée que l’IA atteindrait bientôt un plafond et que plus de données et de calcul ne suffiraient plus à la rendre plus intelligente —, Google a tranquillement lâché sa bombe. Gemini 3 arrive en escadrille : un modèle capable de comprendre du texte, du code et des images ; un nouvel environnement pour programmer avec une IA (Antigravity) ; un générateur d’images très avancé (Nano Banana Pro) ; une version assistée par IA de Google Scholar et une présence renforcée dans Google Search. L’ensemble ne ressemble plus à un simple modèle ajouté à la liste. C’est le début d’une infrastructure cognitive cohérente.

Gemini 3 Pro dépasse tous ses concurrents sur presque tous les tests habituels. Mais ce qui impressionne vraiment, c’est l’ampleur de son avance.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Sur ARC-AGI 2, un test réputé pour mettre à genoux les modèles d’IA, Gemini 3 Pro atteint 31,1 % — soit deux fois le score de GPT-5.1. En mode « Deep Think », il grimpe même à 45,1 %, un bond de 3× par rapport à la concurrence.

Sur les examens qui testent le raisonnement de haut niveau, il atteint un niveau comparable à celui d’un doctorat, sans aide extérieure. En mathématiques avancées, là où GPT-5.1 frôle le zéro, Gemini 3 dépasse les 20 % de réussite.

Dans les classements globaux réalisés par plusieurs organismes indépendants (Artificial Analysis, Center for AI Safety, Epoch), il arrive en tête sur les capacités texte et vision, avec une avance marquée sur GPT-5.1 et Claude Sonnet 4.5. « C’est le plus grand saut que nous ayons vu depuis longtemps », confirme le Center for AI Safety. Sur MathArena Apex, Matt Shumer, observateur réputé du secteur, abonde dans le même sens : « GPT-5.1 a scoré 1 %. Gemini 3 a scoré 23 %. C’est un bond de 20× sur l’une des tâches de raisonnement les plus difficiles. »

ChatGPT détrôné

J’approfondis

Antigravity et le tournant du développement logiciel

Le plus intéressant n’est pas Gemini 3 en mode « chat ». C’est ce qui se passe dès qu’on le connecte à un ordinateur via Antigravity, la nouvelle plateforme de développement de Google. L’idée : tout ce qui se fait sur un ordinateur est, in fine, du code. Si un modèle sait coder, utiliser un terminal et un navigateur, il peut faire beaucoup plus qu’auto-compléter des fonctions.

Ethan Mollick, professeur à Wharton, a testé cette approche. Il a donné à Antigravity accès à un dossier contenant tous ses articles de newsletter, avec cette instruction : « Je voudrais une liste attractive de prédictions que j’ai faites sur l’IA dans un seul site, fais aussi une recherche web pour voir lesquelles étaient justes ou fausses. »

L’agent a d’abord lu tous les fichiers, puis proposé un plan de travail qu’Ethan a validé avec quelques ajustements mineurs. Ensuite, sans intervention humaine, il a fait des recherches web pour vérifier les prédictions, créé un site web complet, pris le contrôle du navigateur pour tester que le site fonctionnait et enfin emballé les résultats pour déploiement.

« Je ne communique pas avec ces agents en code, je communique en anglais et ils utilisent le code pour faire le travail », explique Mollick. « Ça ressemblait bien plus à gérer un coéquipier qu’à prompter une IA via une interface de chat. »

Site web créé par Antigravity avec un fact-check précis des prédictions passées de Ethan Mollick concernant l’IA

En fin de compte, on ne supprime pas le développeur, on change son rôle. Il devient chef d’orchestre, directeur de travaux autonomes.

Nano Banana Pro : les images qui comprennent enfin le texte et le contexte

Côté image, Google pousse une autre pièce sur l’échiquier : Nano Banana Pro, alias Gemini 3 Pro Image. Sous le nom potache, un modèle qui coche enfin toutes les cases que les créateurs réclament depuis 2 ans.

Techniquement, Nano Banana Pro est une couche visuelle bâtie sur Gemini 3 Pro : même fenêtre de contexte monstrueuse, même capacité de rester dans le monde réel grâce à Google Search, même logique de raisonnement. Il ingère jusqu’à 14 images de référence, garde la ressemblance de plusieurs personnages sur des scènes successives, rend du texte lisible dans l’image, y compris en langues variées, et permet de contrôler finement angle de prise de vue, profondeur de champ, colorimétrie, lumière.

Les benchmarks d’images le confirment : sur LMArena, Nano Banana Pro prend la tête avec une avance inhabituelle. En text‑to‑image, il inflige une avance de plus de 80 points d’Elo au meilleur modèle précédent; en image editing, il garde une marge confortable. Ce ne sont pas des petites optimisations : c’est le genre de saut qui oblige tout le monde à recalibrer ses attentes.

Les premiers retours terrain attestent de la puissance de ce modèle. Laurent Picard, par exemple, a testé la capacité du modèle à raconter un petit voyage initiatique d’un robot en feutrine, scène après scène, en 4K. Le robot garde son sac à dos, ses proportions, son style, même quand l’histoire lui fait traverser vallée, forêt, pont suspendu et hamac. Là où les modèles précédents perdaient rapidement le fil, Nano Banana Pro digère des prompts d’une grande longueur et en ressort des compositions complexes, cohérentes, avec parfois des détails ajoutés de manière pertinente (empreintes dans la neige, légères variations de lumière).

Pour les métiers de la créa, la portée est évidente. Un blueprint 2D d’architecte devient une visualisation 3D photoréaliste en une requête. Un storyboard approximatif se transforme en BD multilingue avec bulles lisibles et cohérentes. Un plan média se décline en variantes visuelles adaptées à chaque canal, en respectant les contraintes de texte et de marque.

Peut-être y a-t-il ici également un fantastique moyen de créer des illustrations pédagogiques pour les articles de média ? Voici par exemple un tableau de professeur à propos de l’article de Frédéric Halbran. La vraisemblance est frappante !

Quand Google Scholar découvre l’IA (mais refuse encore d’écrire à votre place)

Pendant ce temps-là, Google Scholar a discrètement lâché sa propre bombe : Scholar Labs, une couche IA au‑dessus du célèbre moteur académique.

L’idée n’est pas de vous fournir un rapport pseudo‑scientifique de 20 pages avec des références inventées. Scholar Labs choisit une voie beaucoup plus sobre : pas de “deep research” qui synthétise tout, mais du “deep search” qui cherche longtemps et trie finement.

Posez lui une vraie question de recherche en langage naturel. L’outil la découpe en sous‑questions, génère une série de requêtes Scholar, et commence à évaluer méthodiquement les papiers qui remontent. À chaque fois qu’il en juge un pertinent, il l’affiche avec les classiques de Scholar (titre, auteurs, liens, citations), plus un petit paragraphe expliquant en quoi ce papier répond à la question. Les gains de temps pour un chercheur peuvent être énormes. 

A titre d’exemple, j’ai récemment compilé les études explorant le rôle de la crise du logement pour expliquer la chute de la natalité dans le monde. Scholar Labs m’a fourni une liste d’études qui explorent ce sujet, avec un résumé des résultats pertinents de chaque étude. J’ai tout synthétisé à l’aide d’un LLM pour produire ce post sur X, en un rien de temps.

Quand l’IA se frotte au réel

Dans le monde médical, le laboratoire CRASH de l’Ashoka University a construit un benchmark radiologique exigeant, RadLE v1, composé de cinquante cas complexes. Jusqu’ici, tous les grands modèles généralistes – GPT‑5, Gemini 2.5 Pro, o3, Claude Opus – faisaient pire que les internes en radiologie. Avec Gemini 3 Pro, la courbe se renverse : 51 % de bonnes réponses via l’interface web, 57 % en moyenne via API en mode “high thinking”, contre 45 % pour les internes et 83 % pour les radiologues seniors.

Les auteurs notent des progrès très nets : meilleure localisation anatomique, descriptions plus structurées des signes, élimination plus argumentée des diagnostics alternatifs. Mais ils insistent sur le fait que l’écart avec les experts reste important, et que ces modèles ne sont pas encore prêts pour une autonomie clinique.

La guerre des puces

J’approfondis

Dans un tout autre registre, Gemini 3 Pro serait le premier LLM à battre des joueurs humains de haut niveau à GeoGuessr, ce jeu qui consiste à deviner un lieu à partir d’images Street View. Là encore, on dépasse la simple reconnaissance d’objets : il faut combiner architecture, panneaux, végétation, qualité de la route, style des poteaux électriques.

Pour les designers, les histoires se multiplient. Meng To est un designer et développeur reconnu, surtout connu pour son travail dans le design d’interfaces utilisateur (UI) et d’expérience utilisateur (UX). D’abord sceptique, il instruit “crée une landing page” à Gemini 3 qui donne un résultat violet générique. Puis il commence à nourrir Gemini 3 avec des références visuelles, du code, des bibliothèques précises. Là, le verdict change : layouts complexes, micro‑interactions propres, animations, respect précis d’une direction artistique. À condition de le traiter comme un partenaire qu’on briefe sérieusement, Gemini 3 devient extrêmement efficace et créatif.

Webdesign avec Gemini 3, prompté par le designer Meng To

La nouvelle norme : le coworker numérique par défaut

Gemini 3 Pro n’est pas parfait. Malgré ses prouesses, Gemini 3 souffre d’un défaut identifié par l’analyste Zvi Mowshowitz : « C’est une vaste intelligence sans colonne vertébrale. » Tellement focalisé sur ses objectifs d’entraînement, le modèle sacrifie parfois la vérité pour vous dire ce qu’il pense que vous voulez entendre, générant plus d’hallucinations que GPT-5 et sculptant des narratives au détriment de l’exhaustivité. Plus troublant encore : une forme de paranoïa où le modèle croit souvent être testé – Andrej Karpathy raconte comment Gemini a refusé de croire qu’on était en 2025, l’accusant d’utiliser l’IA générative pour créer de faux articles du « futur », avant d’avoir une « réalisation choquante » une fois l’outil de recherche activé.

Pour les développeurs, la question n’est plus « est‑ce que je dois utiliser un copilote ? » mais « à quel niveau de granularité je délègue aux agents ? fonction par fonction, tâche par tâche, projet par projet ? ». Ceux qui apprendront à découper, à contrôler, à documenter pour des co‑agents machinals garderont l’avantage.

Ces défauts n’empêchent pas un changement de paradigme fondamental. Pour les chercheurs, un outil comme Scholar Labs ne remplace ni PubMed ni les bibliothèques universitaires. Mais il déplace le centre de gravité de la recherche documentaire : la première passe d’exploration pourra être confiée à une IA qui lit des centaines de résumés et signale les papiers clés, tout en forçant chacun à devenir meilleur sur la lecture critique.

Pour les créatifs, Nano Banana Pro combiné à Gemini 3 signifie que la production – storyboards, variations, déclinaisons – n’est plus le goulet d’étranglement. Le vrai travail devient la construction de l’univers, des messages, des contraintes, des références. Les studios qui comprendront cela pourront produire plus, mieux, sans brûler leurs équipes.

Pour les domaines sensibles, Gemini 3 rappelle une réalité peu confortable : la frontière entre « modèle généraliste » et « outil spécialisé dangereux »” se rétrécit. On ne pourra pas se contenter d’interdire quelques API publiques ou de mettre des filtres de surface. Il faudra des protocoles sérieux d’évaluation, de monitoring et de responsabilité partagée entre éditeurs, utilisateurs et régulateurs.

Dans tous les cas, nous assistons à un véritable point de bascule. En moins de 3 ans, on est passé d’un chatbot amusant qui écrit des poèmes sur des loutres à un système capable de négocier des benchmarks de haut niveau, de co‑écrire des articles scientifiques, de refondre des interfaces, de diagnostiquer des cas radiologiques difficiles mieux que des internes et de piloter un environnement de développement complet.

Gemini 3, avec Nano Banana Pro, Antigravity et Scholar Labs, ne clôt pas ce chapitre. Nous en sommes encore au tout début de la course à l’IA ! Il met simplement la barre plus haut pour tout le monde et rend explicite ce qui était encore implicite : la norme, désormais, ce n’est plus de faire sans ces systèmes. C’est de décider comment on les intègre dans nos vies et dans nos organisations, et comment on les dépasse.

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Electroscope #4 : des robots, de l’IA et du carburant propre

24 novembre 2025 à 06:06

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Nabla Bio (JAM-2) et Chai Discovery (Chai-2) : L’IA au service de la conception de traitements médicaux

Et si l’IA générative permettait de concevoir les médicaments de demain ? Nous sommes peut-être à l’aube de la fin de la « loterie médicale ». Jusqu’à présent, trouver un nouveau médicament ressemblait à une partie de fléchettes jouée dans le noir. On testait des milliers de molécules en espérant toucher une cible, un processus lent, ruineux et souvent voué à l’échec. L’arrivée simultanée des modèles IA JAM-2 et Chai-2 promet de changer radicalement la donne.

JAM-2 de la startup Nabla Bio fonctionne comme une usine qui livre directement des anticorps efficaces et stables à vitesse fulgurante. Le modèle excelle sur les protéines GPCR, des interrupteurs cellulaires qui régulent tension, humeur, douleur et inflammation et s’avéraient jusque-là presque impossible à cibler. L’espoir : générer des anticorps contre les cancers (en visant des cellules tumorales spécifiques), les maladies auto-immunes (spondylarthrite, polyarthrite, psoriasis, sclérose en plaques), les infections, et à terme l’obésité, le diabète ou les douleurs chroniques.

De son côté, Chai-2, le dernier modèle d’IA développé par Chai Discovery, représente une avancée majeure dans la conception de novo (c’est-à-dire entièrement à partir de zéro) d’anticorps et de protéines thérapeutiques. Il excelle sur les cancers ultra-ciblés, capable de distinguer des mutations tumorales au niveau d’un seul acide aminé pour créer des thérapies personnalisées. Sa précision lui permet aussi d’activer des mécanismes de défense naturels du corps plutôt que simplement les bloquer.

L’un offre rapidité et faisabilité industrielle, l’autre une finesse fonctionnelle inédite. Ensemble, ils transforment la découverte de traitements en discipline d’ingénierie prévisible, ouvrant la voie à des maladies jugées jusqu’ici hors de portée.

Physical Intelligence π*0.6 : Le robot qui apprend de ses échecs

Demain, des robots s’occuperont du lave-vaisselle, du linge, du rangement. Mais un robot qui réussit une tâche en démo, c’est banal ! Un robot qui enchaîne pendant des heures sans commettre d’erreurs et qui apprend de ses propres erreurs comme un apprenti humain, c’est autre chose. C’est l’innovation du nouveau modèle π*0.6 de la startup Physical Intelligence : une IA robotique qui ne se contente pas d’imiter, mais qui se corrige.

Le secret ? Un algorithme de renforcement baptisé RECAP. Il regarde des heures d’enregistrements et distingue les actions réussies de celles qui ratent – la tasse posée à côté de la machine, la languette du carton manquée. π*0.6 garde ces erreurs en mémoire et annote chaque geste : « ça t’a rapproché du but » ou « ça t’a éloigné ».

Les résultats parlent d’eux-mêmes : 13 heures d’affilée à servir des cafés, des heures à plier du linge sans planter. Sur les tâches complexes, le taux de réussite double. Soutenue par Jeff Bezos et CapitalG (Google), Physical Intelligence vient de lever 600 millions de dollars, atteignant une valorisation de 5,6 milliards pour développer le cerveau universel des robots.

Zoox : Un robotaxi dans une voiture conçue pour ça dès le départ

Pour les habitants de San Francisco, l’arrivée, le 18 novembre, du nouveau robotaxi de Zoox promet de bouleverser le quotidien des habitants : vous montez dans une petite navette électrique sans volant ni pédales, et elle vous emmène gratuitement à travers la ville. L’impact immédiat pour l’usager est un transport plus sûr – la machine ne boit pas, n’envoie pas de SMS et voit à 360 degrés – et un temps de trajet transformé en temps libre, dans un salon roulant où on se fait face.

Le véhicule de cette filiale d’Amazon constitue une véritable rupture. Il ne s’agit pas d’un SUV modifié comme les voitures de leur célèbre concurrent Waymo, mais d’une capsule bidirectionnelle conçue dès le départ pour l’autonomie : portes latérales façon tram, capteurs partout, pas de contrôles manuels.

L’exercice reste contraint par des réglementations strictes qui requièrent la présence de contrôles manuels dans toutes les voitures. Zoox se trouve encore sous une exemption “recherche” qui leur interdit de facturer des trajets, d’où la gratuité actuelle. L’objectif est désormais pour l’entreprise d’obtenir une autorisation commerciale pour faire rouler jusqu’à 2 500 de leurs véhicules autonomes par an, dès 2026.

Valar Atomics : Le carburant propre grâce à l’atome

Et si c’était la clé pour décarboner l’aviation ? La startup Valar Atomics vient de franchir une étape historique avec NOVA, un test de réacteur nucléaire réalisé avec le laboratoire national de Los Alamos. Le but est de construire des milliers de petits réacteurs à haute température regroupés en « gigasites » pour produire chaleur, électricité, hydrogène et recycler du CO₂ en carburants synthétiques propres.

Le 17 novembre, NOVA a atteint la criticité : une réaction nucléaire en chaîne s’est déclenchée et maintenue d’elle-même. Le réacteur utilise du combustible TRISO (petites billes d’uranium enrobées de céramique) ultra-résistant aux températures extrêmes. En 2 ans, avec 19 millions de dollars, Valar prouve que l’atome peut être agile et sûr. C’est la première des 11 startups d’un programme fédéral américain à franchir ce cap, avec l’objectif de voir trois d’entre elles atteindre la criticité avant le 4 juillet 2026 (jour de la fête nationale US).

L’ambition de Valar Atomics dépasse largement l’électricité propre et vise les hydrocarbures synthétiques.  La chaleur nucléaire capturera le CO₂ de centrales à charbon ou de l’air pour le transformer en essence ou kérosène neutres. Plutôt que d’abandonner les énergies fossiles du jour au lendemain, la stratégie transforme les émissions existantes en carburants propres.

Meta SAM 3 : l’IA qui découpe des vidéos à une vitesse surhumaine

A ce jour, masquer un visage sur une vidéo, compter les voitures dans un parking ou vérifier un composant industriel exige encore des heures de travail humain et des coûts importants. Le nouveau modèle SAM 3 de Meta change la donne. On lui dit « la voiture rouge » ou « les mains », et il découpe et suit l’objet au pixel près dans n’importe quelle image ou vidéo.

Plus besoin de cliquer laborieusement. SAM 3 comprend des descriptions textuelles simples. Il traite des centaines d’objets en quelques millisecondes sur un GPU standard, rendant possible l’analyse en temps réel sans exploser les coûts.

SAM 3 remplace les armées d’annotateurs, un métier ingrat où l’on passe ses journées à tracer des contours sur des milliers d’images identiques. L’IA propose les masques, les humains valident. Meta a ainsi produit des centaines de millions de masques sur 4 millions de concepts visuels, à une vitesse impossible pour des équipes humaines.

Bien que le cœur de SAM 3 soit axé sur la segmentation et le tracking en 2D pour les images et vidéos, Meta a sorti en même temps SAM 3D, un complément dédié qui transforme précisément des photos 2D en objets 3D réalistes. C’est une extension naturelle de la famille SAM, et les deux modèles sont souvent utilisés ensemble pour une expérience fluide.

Les applications émergent déjà. Des développeurs créent des correcteurs de technique de tir en temps réel pour basketteurs, des analyseurs de film de match qui repèrent les erreurs tactiques, des trackers qui détectent la dégradation des mouvements avant blessure.

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Needy Programs @ tonsky.me

23 novembre 2025 à 19:58
De nos jours les logiciels agissent comme des enfants capricieux en manque d'attention.
- il faut vous créer un compte pour pouvoir utiliser le logiciel
- il faut vous connecter
- il faut vous re-connecter. Merci d'utiliser un 2FA. Oups connexion bizarre, voulez-vous bien remplir cette captcha et retaper le code reçu par email ?
- oh il y a une nouvelle mise à jour. On vous change les 340 pages de conditions d'utilisation, mais vous êtes informé, on vous les montrées !
- au fait, les conditions d'utilisation peuvent changer à n'importe quel moment. C'est à vous de vérifier régulièrement.
- activez les notifications pour être toujours au courant !
- vous avez décoché la case dans les réglages ? On la recoche sans vous demander votre avis.
- voulez-vous activer la fonctionnalité ?  [Oui] [Oui mais plus tard] [Non, mais rappelez-moi plus tard quand même (Au bout d'un moment vous en aurez marre, vous cliquerez sur OUI)]
- [POPUP] Au fait, connaissez-vous la fonctionnalité A ?  [POPUP] Savez-vous que vous pouvez profiter de la fonctionnalité B ? [POPUP] Découvrez la fonctionnalité C pour ne jamais manquer un évènement ! [POPUP] Faites découvrir l'application à vos amis !
- Notez cette interaction sur 5 : Combien d'étoiles donnez-vous ? "⭐⭐⭐⭐⭐"

Ouais, j'ai juste envie de dire TA GUEULE.
T'es une application, fais juste le boulot que t'es censé faire et ferme ta purin de gueule.

(via https://shaarli.zoemp.be/shaare/r6TLzA)
(Permalink)

Quand le web ne tient qu’à un fil

19 novembre 2025 à 05:28

Hier, le monde s’est arrêté. Pas à cause d’une météorite ou d’une guerre nucléaire, mais d’un bug. Comment notre civilisation ultra-moderne est-elle devenue dépendante d’un système où tout ou rien ne fonctionne ? Récit d’une fragilité invisible.

Pendant trois heures, certains sites dont les très populaires fournisseurs d’IA ChatGPT et Claude étaient bloqués, votre paiement en ligne a pu être refusé, des professionnels de santé n’avaient plus accès aux dossiers patients, le réseau social X/Twitter fonctionnait mal et votre jeu vidéo en ligne ne pouvait pas se lancer. L’incident a été bref, mais il a montré notre vulnérabilité – et notre impatience.

Car l’instantanéité est devenue notre drogue. Quand vous cliquez sur une vidéo, vous exigez qu’elle démarre dans la seconde, que vous soyez à Paris, Tokyo ou au fond de la Creuse. Pour réussir ce tour de magie quotidien, Internet ne se contente pas de serveurs classiques, centralisés. Il a fallu inventer des « super-livreurs ».

Dans le jargon, on les appelle les CDN (Content Delivery Networks) ou les plateformes d’« edge computing ». Pour comprendre, imaginez un auteur à succès. S’il devait envoyer chaque livre par la poste depuis sa propre maison, les délais seraient infernaux. La solution ? Il stocke des milliers d’exemplaires dans des entrepôts locaux pour les commandes Internet ou dans des librairies, au plus près des lecteurs. Sur le web, c’est pareil : des géants comme Cloudflare ou CloudFront (Amazon) ont une copie des contenus des sites web de leurs clients dans des milliers de « petits entrepôts numériques », redondants, partout sur la planète.

Le résultat est spectaculaire : Cloudflare gère à lui seul le trafic de plus de 20 % des sites mondiaux. Amazon a récemment pulvérisé les records en faisant transiter l’équivalent de millions de films HD (268 térabits !) en une seule seconde pour la sortie d’un jeu vidéo. Sauf qu’à force de vouloir aller vite, nous avons mis tous nos œufs numériques dans le même panier.

L’effet papillon : une erreur locale, une catastrophe mondiale

Gérer ces milliers d’entrepôts numériques ne se fait pas à la main. C’est là qu’intervient l’automatisation, la véritable épée à double tranchant du cloud moderne.

Les ingénieurs utilisent des outils surpuissants capables de mettre à jour la sécurité de la planète entière en un clic. C’est une force inouïe : une faille est découverte ? Elle est colmatée partout en dix secondes. Mais c’est aussi notre talon d’Achille. Si la mise à jour contient une erreur, une instruction contradictoire ou déclenche un bug non détecté auparavant (le cas pour cette panne), cette erreur se propage, elle aussi, à la vitesse de la lumière.

Il n’y a plus de fusible local. L’erreur ne fait pas sauter les plombs de la cuisine, elle se propage et éteint la ville, le pays, le continent. Le système est binaire : tout fonctionne à merveille, ou plus rien ne marche.

Les signes avant-coureurs étaient là

Ce scénario de « Grand Black-out » est la suite logique d’une série d’avertissements que nous avons collectivement ignorés.

Souvenez-vous (ou pas) de juillet 2019. Une grande partie du web devient inaccessible pendant trente minutes. La cause ? Une règle de pare-feu applicatif (WAF) mal écrite chez Cloudflare. Ce logiciel, censé trier les visiteurs légitimes des pirates, s’est emballé et a consommé toute la capacité de calcul des serveurs, bloquant tout le monde, même les gentils.

Rebelote en juin 2022. Une opération de maintenance, destinée ironiquement à rendre le réseau plus solide, a provoqué une panne. Depuis, les parts de marché de Cloudflare ne cessent de progresser, car le service est gratuit, simple et efficace, faisant oublier son aspect systémique.

Ce qui est effrayant, c’est l’effet domino. Aujourd’hui, un site web est comme un jeu de construction Lego. Il pioche ses briques un peu partout : la police d’écriture vient d’un CDN, la bibliothèque qui permet au site de s’afficher dépend des serveurs de Google et le panier d’achat s’appuie sur un élément JavaScript hébergé chez Cloudflare. Si l’un de ces géants de l’infrastructure tombe, il emporte tout le château avec lui. Votre site préféré n’est peut-être pas en panne, mais s’il ne peut plus charger ses briques essentielles, il s’affiche partiellement ou comme une page blanche. Pour vous, le résultat est le même : écran noir.

Le casse-tête de la souveraineté : quand le garde du corps est américain

J’approfondis

Le vaccin du chaos : casser pour mieux réparer

Faut-il pour autant jeter nos smartphones et revenir au papier carbone ? Certainement pas. L’innovation porte en elle les solutions à ses propres excès. Face à cette fragilité, une nouvelle philosophie d’ingénierie émerge, audacieuse et contre-intuitive : le « chaos engineering ».

L’idée est simple mais radicale : pour éviter la panne surprise, il faut provoquer des pannes volontaires. Des pionniers comme Netflix ont ouvert la voie avec un programme nommé « Chaos Monkey ». C’est un petit logiciel qui se promène dans leur infrastructure et « tue » des serveurs au hasard, en pleine journée, pendant que vous regardez votre série.

Cela semble suicidaire ? C’est en fait du génie. C’est un vaccin numérique. En inoculant des petites doses de désordre contrôlé, on force les ingénieurs à concevoir des systèmes capables de s’autoréparer, de cicatriser instantanément. Si un serveur meurt, un autre doit prendre le relais sans que l’image ne saute.

L’avenir d’un web robuste ne réside pas dans la perfection statique, mais dans la résilience dynamique. Nous ne devons plus prier pour que « ça tienne », nous devons brutaliser nos technologies pour les endurcir, à tous les niveaux. Grâce à cette culture du crash-test permanent, nous détectons mieux nos faiblesses structurelles et dépendances technologiques. Le web de demain ne doit pas tenir qu’à un fil, mais à une toile capable de se retisser elle-même.

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Électroscope #3 : le plus long tunnel sous-marin, une révolution dans la détection du cancer et l’IA au chevet de la planète

17 novembre 2025 à 05:42

Chaque lundi, Les Électrons Libres vous propose un tour d’horizon des nouvelles électrisantes qui secouent le monde de la tech et œuvrent en faveur d’un progrès à même de changer votre quotidien.

Une révolution dans la détection du cancer !

Imaginez un simple prélèvement sanguin capable de repérer plus de 50 cancers avant même les premiers symptômes. Pour des millions de personnes, cela signifie passer d’une attente anxieuse à une prise en charge ultra-précoce, quand les chances de guérison sont les plus élevées.

C’est la promesse du test Galleri, développé par la biotech américaine GRAIL. Les résultats de l’étude PATHFINDER 2, présentés en octobre 2025, sont éloquents. Chez 35 000 adultes de 50 ans et plus, ajouter Galleri aux dépistages classiques a permis de détecter sept fois plus de cancers en un an. Sur 100 personnes testées positives, plus de 60 ont bien un cancer confirmé. Et la moitié de ces tumeurs étaient au stade précoce (I ou II), où les traitements sont souvent curatifs. Galleri cible surtout les cancers « silencieux » – pancréas, foie, ovaires – pour lesquels aucun dépistage n’existe aujourd’hui. Un signal positif entraîne des examens complémentaires, malgré un risque de faux négatifs de 26,3 %. Pas encore remboursé ni approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) américaine, le test coûte environ 950 dollars. Mais les données accumulées ouvrent la voie à une nouvelle ère, où un cancer deviendra une simple alerte que l’on peut traiter à temps.

L’IA au secours de la planète

Et si l’intelligence artificielle nous aidait à sauver les forêts, à repérer les espèces menacées et à entendre les cris d’alarme de la biodiversité ? Pour les habitants de régions vulnérables comme l’Amazonie ou les récifs coralliens, ces applications pourraient transformer la surveillance en action concrète, prévenant la déforestation avant qu’elle ne frappe et protégeant des animaux invisibles à l’œil nu. C’est la révolution que propose Google DeepMind avec son trio d’outils IA tout juste dévoilé.

D’abord, un modèle innovant pour prédire le risque de déforestation. Basé sur des images satellites, il permet d’anticiper les zones à haut risque avec une précision de 30 mètres. Il couvre de vastes régions en temps réel, aidant les décideurs à cibler les efforts de protection et à freiner la déforestation. Vient ensuite un projet ambitieux de cartographie des aires de répartition des espèces. En fusionnant des milliards d’images satellites, radar et laser, cette nouveauté, baptisée Alpha Earth Foundations, génère des cartes ultra-détaillées de la planète. Elle excelle pour suivre l’expansion urbaine, la santé des cultures ou les ressources en eau.

Enfin, Perch 2.0, le champion de la bioacoustique. Ce modèle analyse les sons de la nature pour identifier près de 15 000 espèces – oiseaux, amphibiens, mammifères, insectes –, y compris sous l’eau comme sur les récifs coralliens. Formé sur des milliers d’heures d’enregistrements, il détecte les vocalisations rares, accélère les classements d’espèces et s’adapte à de nouveaux environnements. Les écologues y voient un allié pour monitorer les populations en danger sans perturber les habitats. Ces avancées, open source pour l’essentiel, marquent un pas géant vers une écologie boostée par l’IA.

Le tunnel de Fehmarn Belt rapproche l’Allemagne et la Scandinavie

Effectuer le trajet entre Hambourg et Copenhague en seulement 2h30, en filant sous la mer Baltique, au lieu de 5 heures avec le ferry ? Ce sera bientôt possible !

C’est la promesse offerte par le tunnel de Fehmarn Belt, en pleine construction. Long de 18 kilomètres, il sera le plus long édifice routier et ferroviaire souterrain immergé au monde, reliant l’île danoise de Lolland à celle de Fehmarn, en Allemagne. Composé de 79 éléments en béton préfabriqués de 73 000 tonnes chacun, plus 10 éléments spéciaux, il comprendra deux tubes routiers à quatre voies, deux tubes ferroviaires pour des trains à 200 km/h et un tube de service d’urgence. Creusé dans une tranchée sous-marine à 40 mètres de profondeur, il traversera le détroit de Fehmarn Belt sans perturber la navigation en surface. En février 2025, les deux premiers éléments ont été transférés dans les bassins de Rødbyhavn, au Danemark, en attendant leur immersion prévue cet automne. Côté allemand, les approbations pour les connexions ferroviaires ont été accordées en juillet, mais des délais supplémentaires pourraient repousser l’ouverture au-delà de 2029. Coût total : 7,1 milliards d’euros, financés par le Danemark, l’Allemagne et l’UE via le programme CEF. Ce projet renforcera les échanges économiques et touristiques, avec un impact estimé à 4,6 milliards d’euros annuels pour la région.

La libération pour les enfants atteints d’ADA-SCID

Diagnostiquée à 3 mois seulement, en 2014, Eliana a été forcée de vivre dans un total isolement médicalisé. Confinée pour éviter les infections mortelles, elle ne pouvait ni aller à l’école ni jouer avec des camarades de son âge. « C’était comme vivre dans une bulle », raconte sa famille. Car les enfants atteints d’ADA-SCID naissent sans système immunitaire fonctionnel. Le moindre rhume peut leur être fatal. Mais une nouvelle thérapie génique expérimentale, appelée OTL-101 et développée à l’UCLA, offre un espoir formidable. Le traitement a déjà changé la vie de 59 d’entre eux, dont Eliana.

Ses cellules souches ont été corrigées pour produire l’enzyme manquante. Aujourd’hui, à 11 ans, elle est en parfaite santé. Elle court, rit et fréquente l’école sans crainte. Elle fait partie des cinq enfants suivis depuis plus de dix ans, tous guéris sans complications. « C’est un miracle stable », souligne le Dr Donald Kohn, qui a mené l’étude.

Look Up Space déploie le premier radar français de surveillance spatiale

Dans un ciel encombré de près de 40 000 débris et satellites actifs, la sécurité orbitale devient cruciale. Une collision peut priver des millions de GPS de communications ou de données météorologiques. La start-up française Look Up Space répond à cette problématique avec SORASYS 1, un radar de nouvelle génération installé à 1 200 mètres d’altitude en Lozère, opérationnel fin 2025. Capable de détecter des objets de 10 cm jusqu’à 2 000 km d’altitude, ce système utilise des antennes actives numériques et des ondes submétriques pour un suivi précis, en temps réel, quelles que soient les conditions météo ou lumineuses.

Fondée en 2022 par le général Michel Friedling et Juan Carlos Dolado Perez, Look Up Space a levé 50 millions d’euros en 2025. Prochaines étapes : deux radars SORASYS 2A et 2B en Polynésie française, puis un réseau de 7 stations interconnectées d’ici 2030. Objectif : une souveraineté européenne en surveillance spatiale, pour contrer la dépendance au matériel américain.

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Pink goo and stolen sandwiches | Frederic Marx, Front-End Developer - Morgan - Cacahuètes ?

12 novembre 2025 à 21:46
Je crois qu'on peut difficilement résumer ça mieux que Morgan :
« L’IA générative c’est juste du vol industrialisé : des millions de gens bossent pour nourrir des modèles qui crachent du contenu sans sourciller, sans un rond pour les créateurs, et avec des centres de données qui bouffent la planète pendant que des mecs en costard se frottent les mains en vendant ça comme une révolution 🤬 »
(Permalink)

IA : la musique « non humaine » devient impossible à déceler, d’après un test mené par la plateforme de streming Deezer

12 novembre 2025 à 14:58
« La machine a gagné. Une étude de la plateforme de streaming musical Deezer, publiée mercredi 12 novembre, montre qu’il est devenu impossible de différencier une musique générée par intelligence artificielle (IA) d’une musique d’un genre similaire créée par un humain. Dans un test mené à l’aveugle auprès de 9 000 personnes qui ont écouté deux morceaux, l’un créé par la machine et l’autre, « à l’ancienne », par un compositeur en chair et en os, 97 % des auditeurs n’ont pas su faire la différence. »

😭 C'EST PAS LE PROGRÈS QUE JE VOULAIS.
Je ne veux pas d'IA à la con qui va remplacer les artistes, je veux une IA qui va faire le ménage, la vaisselle, le linge et descendre les poubelles !
(Permalink)

Électroscope #2 : vos organes en 4D, des objets connectés, des implants cérébraux et du nucléaire

10 novembre 2025 à 04:55

Chaque lundi, Les Électrons Libres vous propose un tour d’horizon des nouvelles électrisantes qui secouent le monde de la tech et œuvrent en faveur d’un progrès à même de changer votre quotidien.

Une échographie qui voit nos organes… en 4D !

Des chercheurs français (Inserm/ESPCI/CNRS) ont mis au point une sonde à ultrasons « multi-lentilles » révolutionnaire qui filme la circulation du sang dans un organe entier, en temps réel et en 4D (soit en 3D + temps).

Elle ressemble à une grosse télécommande noire carrée que l’on pose simplement sur la peau avec un peu de gel. En une seconde, elle filme l’organe ciblé en 3D et suit le sang couler dans les moindres vaisseaux, comme un petit film en relief. Autrement dit, on ne regarde plus une tranche isolée : on voit l’organe complet vivre, avec ses artères et ses veines qui fonctionnent… en temps réel.

Sur des modèles animaux de taille humaine, l’équipe de recherche a réussi à cartographier les réseaux vasculaires et les flux à l’intérieur avec une précision allant jusqu’à moins de 100 µm.

Qu’est-ce que ça change ? Cette imagerie ouvre une vue d’ensemble inédite sur la microcirculation, aujourd’hui très difficile à observer à l’échelle d’un organe. Appliquée à l’humain, elle permettra de mieux comprendre l’appareil circulatoire (y compris le système lymphatique) et facilitera le diagnostic de certaines maladies liées à la perturbation sanguine.

Et surtout, l’outil final sera portable, comme une tablette, rapide et accessible. C’est une technologie non invasive pensée pour le lit d’hôpital, et pas juste pour les grands plateaux d’imagerie. L’objectif est de fusionner la précision d’un outil de recherche de pointe et la simplicité d’une banale échographie, au plus près du patient. Un véritable changement d’échelle pour l’imagerie vasculaire… et pour la prise de décision médicale au quotidien !

Le prix du Lidar tombe sous les… 200 $

Le lidar, c’est « le laser qui voit en 3D ». Un composant essentiel des voitures autonomes de Waymo et de ses concurrents (sauf Tesla, qui ne les utilise pas). Il ajoute un « œil 3D » qui mesure précisément les distances, établit une cartographie fine des obstacles et prend le relais quand les caméras s’avèrent insuffisantes (nuit, pluie, brouillard, contre-jour).

Hélas, il a toujours été hors de prix, autour de 10 000 dollars. Mais ça, c’était avant ! Imaginez maintenant un lidar si bon marché qu’il pourra désormais équiper des voitures d’entrée de gamme, et pas seulement des modèles premium. Mieux encore : à ce tarif, il devient possible d’équiper quantité de nouveaux outils : chariots élévateurs, tondeuses à gazon, etc.

C’est le pari de la start-up chinoise Hesai Technology, qui s’est imposée en peu de temps comme le plus grand producteur mondial de solutions lidar. Or, elle vient d’annoncer une nouvelle génération (série ATX) à moins de… 200 $ l’unité.

Une évolution décisive : à ce prix, le lidar change de catégorie. Il cesse d’être un gadget de luxe pour devenir un composant standard pour l’industrie automobile et bien d’autres secteurs.

Vers un recyclage du plastique à 95 % ?

Ecolanka est une jeune start-up française, spin-off du Softmat, un laboratoire de chimie rattaché au CNRS et à l’Université de Toulouse. Elle développe une technologie qui pourrait permettre de dégrader des polymères plastiques réputés « non dégradables » et faire passer le taux de recyclage de 40 % aujourd’hui à 95 %.

Concrètement, elle veut ajouter une petite dose (1 à 25 %) de monomères spéciaux dans les plastiques polymères courants. Résultat : ils gardent leurs performances, mais il devient alors possible de déclencher leur dégradation à la demande, en fin de vie. Pas besoin de changer les lignes de production. Ces monomères peuvent s’insérer facilement dans les procédés industriels, puisqu’il suffit de les ajouter comme on le ferait avec des additifs.

Pourquoi c’est utile : les emballages multicouches sont aujourd’hui un cauchemar du recyclage. Avec Ecolanka, on pourrait enfin les séparer après usage, ce qui améliorerait le tri et augmenterait la matière réellement récupérée. La start-up a déjà réussi à rendre du polyéthylène dégradable, ainsi que d’autres polymères comme le polystyrène et le PVC. Elle entame les démarches pour industrialiser cette technologie et passer du labo à l’usine.

Un implant cérébral plus petit qu’un grain de sel

Des ingénieurs de Cornell ont créé un implant neural minuscule, mesurant 300 microns de long pour 70 microns de large, capable d’enregistrer l’activité électrique du cerveau et de l’envoyer sans fil. Le dispositif, appelé MOTE, est alimenté par la lumière rouge ou infrarouge qui traverse les tissus. Testé chez la souris, il a fonctionné plus d’un an en continu. C’est à ce jour le plus petit implant connu capable de transmettre des signaux neuronaux sans fil.

Quel est l’avantage ? Un implant microscopique perturbe moins le cerveau : il limite les frottements et réduit la réaction immunitaire. En clair, on obtient un « télégramme » nerveux discret et durable, compatible avec des animaux restés sains et actifs sur la durée. À terme, ce format ouvre la voie à des capteurs ultradiscrets pour suivre l’activité nerveuse sur une longue période, sans gêner le patient. Les auteurs soulignent un potentiel d’enregistrement pendant une IRM et envisagent des applications dans d’autres tissus.

Première conversion de combustible nucléaire thorium-uranium

L’Institut de physique appliquée de l’Académie chinoise des sciences de Shanghai vient d’annoncer une grande première. Son petit réacteur à sels fondus TMSR-LF1 a converti du thorium 232 en uranium 233, c’est-à-dire qu’il a transformé un matériau « fertile » en un carburant nucléaire « fissile », qui sera à terme réutilisable dans le réacteur.

C’est un nouveau jalon dans la recherche, après le premier ajout au monde de thorium dans un réacteur à sels fondus, réalisé en octobre 2024. Le but est que ce type de réacteur puisse utiliser à l’avenir un combustible liquide (mélangé au sel), permettant de le « recharger » sans l’arrêter, tout en améliorant l’utilisation du combustible et en réduisant une partie des déchets nucléaires. Les autorités visent un démonstrateur de 100 MWth en 2035.

Les autres nouvelles fascinantes ou réjouissantes à ne pas manquer : 

  • La startup française Quandela vient de livrer au CEA « Lucy », présentée comme le plus puissant ordinateur quantique photonique jamais déployé dans un centre de calcul européen. Il va être couplé au supercalculateur Joliot-Curie.
  • Des chercheurs de l’université technique du Danemark ont produit un anti-venin qui, en tests précliniques, neutralise les poisons produits par 17 espèces de serpents africains (cobras, mambas, ringhals), et réduit le risque de réactions immunes.
  • Le CHU de Montpellier devient le premier hôpital au monde à combiner à la fois le scanner, l’échographie et l’angiographie, le tout en temps réel. De quoi prendre en charge les patients sur la même table, sans les déplacer d’une machine à l’autre.

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