IA et ayants droit : Rachida Dati envisage une loi pour encadrer le conflit
Culture vs numérique : the neverending war
Poussée par les différentes organisations d’ayants droit de la culture comme de la presse, la ministre de la Culture Rachida Dati évoque l’idée d’une loi pour encadrer spécifiquement l’utilisation de tous types de contenus par les entreprises d’IA.
Après plusieurs réunions entre les entreprises d’IA et les organisations d’ayants droit, ces dernières sont ressorties déçues et l’ont fait savoir à la ministre de la Culture Rachida Dati. Allant dans leur sens, celle-ci propose maintenant de légiférer, notamment pour imposer un mode de rémunération.
Un cycle de réunions avait été lancé début juin par Rachida Dati et Clara Chappaz (alors ministre déléguée du Numérique) entre, d’un côté, des acteurs de l’IA comme Google, Mistral et OpenAI et de l’autre, quinze organisations d’ayants droit comme la Sacem, la SACD ou encore l’Alliance de la presse d’information générale (APIG) et le Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (Spiil).
Un dialogue peu productif
Mais, selon les Échos, aucune réelle discussion n’a réellement été enclenchée. « La belle idée était illusoire. Pour discuter, il faut être deux », déclarait Pierre Petillault, directeur général de l’Apig, à notre consœur des Echos, déplorant l’absence d’ouverture du côté des entreprises d’IA générative.
Le 18 novembre dernier, les quinze organisations d’ayants droit ont fait part à la ministre de la Culture de leur impatience dans une lettre obtenue par Contexte. « En dépit d’échanges parfois intéressants, ce processus n’a pas permis de dégager des solutions concrètes pour faciliter la négociation d’accords de licences », affirment-elles notamment.
Elles y demandaient à Rachida Dati des « solutions législatives fondées sur les recommandations du rapport du CSPLA [Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique] sur la rémunération des contenus culturels par les systèmes d’IA ». Commandé par son ministère, le rapport est le produit de la mission conduite par Alexandra Bensamoun et Joëlle Farchy, qui a rendu deux volets (une partie économique et une partie juridique) en juillet dernier.
Rachida Dati et des sénateurs de plusieurs partis sur la même longueur d’onde que les ayants droit
Rachida Dati a réagi exactement dans ce sens dans un communiqué de presse ce 28 novembre. Le ministère y juge que les accords qui existent sont « insuffisants pour assurer la juste rémunération des œuvres et contenus utilisés pour l’entraînement des modèles d’IA ». Il lui apparait « dès lors pleinement légitime que les pouvoirs publics envisagent des actions, y compris de nature législative comme celles évoquées dans le cadre des missions conduites au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique ».
Le ministère explique même envisager la possibilité d’une « inversion de la charge de la preuve » ou d’une « présomption d’utilisation des contenus culturels par les fournisseurs d’IA ». En effet, la partie juridique du rapport du CSPLA [PDF] a proposé une solution pour « réintégrer les titulaires dans leurs droits en l’absence d’une transparence suffisante ». De fait, le rapport propose d’établir une « présomption d’utilisation ou d’exploitation » en se basant sur quelques indices (comme le fait que l’extrait d’un texte soit recraché par l’IA générative incriminée, par exemple).
Selon les Échos, une proposition de loi est aussi envisagée par les sénatrices Agnès Evren (Les Républicains), Laure Darcos (LIOT) et le sénateur Pierre Ouzoulias (PCF) pour un dépôt en décembre.
