Robots et drones : seule solution pour démanteler les centrales nucléaires ?
Telle la poussière que l’on cache sous le tapis, la question du démantèlement est un sujet que l’on préfère éviter, dans le secteur du nucléaire. Entre complexité et coûts records, ces opérations sont souvent repoussées et multiplient les retards. Pourtant, le renouveau du nucléaire passera nécessairement par une meilleure maîtrise de ce sujet. D’ailleurs, de nombreuses entreprises comptent sur l’essor de la robotisation pour faciliter et accélérer ces étapes.
Démantèlement, voilà un mot qui donne des sueurs froides à toute la filière du nucléaire. Et pour cause, ces opérations de déconstruction sont d’une complexité telle que très peu de site dans le monde en sont venus à bout. Parmi les exemples récents, on ne peut guère que citer la centrale espagnole José Cabrera (aussi appelée Zorita), qui était équipée d’un réacteur à eau pressurisée d’une puissance nominale de 153 MWe.
En France, de nombreux cas illustrent la difficulté de démanteler des installations nucléaires. La déconstruction du site de Brennilis, un réacteur à eau lourde à l’arrêt depuis maintenant 40 ans, ne devrait être terminée qu’en 2041. À Marcoule, la situation est encore plus critique et le site est considéré comme le plus complexe d’Europe, du fait de ses nombreux réacteurs de recherche. On y trouve les premiers réacteurs nucléaires français à avoir injecté de l’électricité sur le réseau électrique, et qui avaient pour vocation de produire du plutonium militaire. Pour nombre de ces équipements, comme le réacteur graphite G2, le CEA n’indique même plus de date de fin de démantèlement, et les opérations sont suspendues.
La robotisation à tout prix
Principal problème : des niveaux de radioactivité élevés, et difficiles à maîtriser, qui pourraient potentiellement mettre la santé des travailleurs en danger. C’est pourquoi, les projets de recherche fleurissent pour permettre la robotisation massive de ces opérations.
Dans ce cadre, la société Onet Technologies travaille sur l’utilisation d’un laser spécifique, dont la tête a été brevetée par le CEA. Celui-ci pourrait permettre des découpes de grande précision sans aucun problème de vibration. Développé depuis 10 ans, son utilisation est envisagée sur le site japonais de Fukushima. D’ailleurs, des essais sont en cours pour envisager la découpe du corium (mélange de combustible nucléaire fondu) grâce à ce laser. Sa puissance de 16 kW peut être dirigée vers un point de 1 mm3, ce qui permet de couper des tôles d’acier pouvant atteindre, en théorie, jusqu’à 200mm. Le laser est également capable de fonctionner sous l’eau. De son côté, Orano a mis au point le bras Anémone, un outil de préhension capable d’attraper toute sorte d’objets ou de déchets.
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Pour tester ces nouvelles technologies, le CEA a créé une réplique virtuelle de ce laser et de son environnement afin de simuler des scénarios de démantèlement en 3D. L’objectif final est de mettre au point un bras auto-apprenant, et de créer un poste de pilotage assisté par réalité virtuelle pour rendre ce travail plus précis et efficace que jamais. Graphitech, une coentreprise d’EDF et Veolia travaille activement à la mise au point de robots pour permettre la déconstruction de réacteurs graphite gaz (UNGG), réputés pour être très difficiles à démanteler en raison de la quantité de matériaux qu’ils renferment. On parle de 10 à 30 fois plus de matériaux que dans un réacteur à eau pressurisée (REP).
Le premier réacteur de ce type à être démantelé devrait être Chinon A2 à partir de 2030, suivi de 5 autres réacteurs UNGG après 2050. D’ici là, un des robots de Graphitech, appelé Mascotte, pourrait prendre du service à Brennilis dès 2027.
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