IA : Meta se joint à la liste des géants numériques qui se tournent vers le nucléaire
The nuclear option
Meta rejoint la longue liste d’acteurs du numérique qui se tournent vers l’énergie nucléaire, poussés par leurs nombreux investissements dans le domaine de l’intelligence artificielle, très énergivore.
« Accélérer la prochaine vague nucléaire pour alimenter l’innovation en intelligence artificielle », tel est le projet annoncé ce 3 décembre par Meta. En pratique, la maison mère de Facebook et WhatsApp publie un appel à projet pour trouver des développeurs capables de mettre en marche des réacteurs nucléaires d’ici 2030.
Le but : créer une nouvelle source d’énergie pour satisfaire les besoins toujours croissants des centres de données de l’entreprise. La course à l’intelligence artificielle dans laquelle s’est lancée l’industrie du numérique, en particulier celle aux applications appuyées sur de grands modèles de langage, entraîne en effet une explosion de la demande en énergie.
Course à l’énergie
Meta veut 1 à 4 gigawatts d’énergie supplémentaires aux États-Unis d’ici 2030. L’entreprise précise « continuer à investir » dans ses projets d’énergie renouvelable « tels que l’énergie solaire et éolienne », mais précise que « les projets d’énergie nucléaire nécessitent davantage de capitaux, leur développement est plus long, ils sont soumis à davantage d’exigences réglementaires et leur durée de vie opérationnelle prévue est plus longue ». L’entreprise prendra les candidatures jusqu’au 7 février.
En se lançant dans ce projet, elle rejoint la liste toujours plus longue de sociétés du numérique engagées dans le domaine. De fait, le patron d’OpenAI, Sam Altman, admettait lui-même en janvier 2024 que les LLM consommaient trop d’énergie. Avant l’été, Goldman Sachs estimait que la hausse de la demande triplerait entre 2023 et 2030, pour atteindre 47 gigawatts aux États-Unis – la banque citait l’accès à l’énergie comme un enjeu à part entière pour les constructeurs d’IA.
Ces problématiques se sont traduites, en mars, par l’achat d’un campus de centres de données liés à la centrale de Susquehanna, en Pennsylvanie, par Amazon. Mi-octobre, la société indiquait avoir noué trois contrats avec Energy Northwest, qui construit quatre réacteurs nucléaires modulaires (SMR), X-energy (qui prévoit le déploiement de 5 000 MW de SMR d’ici 2039) et Dominion Energy (pour installer un SMR près d’une centrale préexistante en Virginie).
En septembre, Oracle prévoyait de son côté la construction d’un centre de données alimenté par trois réacteurs nucléaires. Microsoft a suivi de peu, avec l’annonce de son projet de relancer l’Unité 1 de la centrale de Three Mile Island (dont l’accident affectant l’Unité 2, en 1979, avait mis un coup d’arrêt au développement de la filière nucléaire états-unienne). Sa promesse de 4 milliards d’euros d’investissement en France, en mai, peut elle aussi être lue par le prisme de la recherche d’énergie nucléaire. Quant à Google, la société s’est tournée vers une solution plus proche de celle que vise Meta, en concluant un accord avec Kairos Power, qui construit de petits réacteurs de 500 MW.
Ce que l’IA fait à la lutte contre le changement climatique
Même si l’énergie nucléaire peut venir pallier une partie des besoins, le sociologue Clément Marquet et l’informaticienne Anne-Laure Ligozat rappelaient dans un récent épisode d’Algorithmique que la course à l’intelligence artificielle paraît difficilement soutenable en termes de protection de l’environnement. Ce, même si certains de ses usages participent à la lutte contre le changement climatique.
Les alertes se multiplient d’ailleurs sur les risques de rebond de la demande en énergie fossile que la course à ce type de technologies provoque. Si les géants numériques étaient nombreux à s’exprimer sur leurs objectifs en termes de neutralité carbone au tournant des années 2020, ces éléments tendent à disparaître de leurs discours récents. Ceux qui les mentionnent encore, comme Microsoft, vendent en parallèle leurs produits d’IA à certains des plus grands noms de l’industrie fossile, parmi lesquels ExxonMobil ou Shell.