Voici le coût délirant de la future centrale électrique à biomasse liquide prévue en Corse
Luc Rémont, PDG d’EDF, était en visite en Corse cette semaine pour inaugurer le début des travaux de la nouvelle centrale électrique de l’île. Attendue depuis près de 20 ans, la centrale qui fonctionnera à partir de biomasse liquide, devrait coûter la bagatelle de 800 millions d’euros.
Les habitants d’Ajaccio ne regretteront pas les deux cheminées rouges et blanches de la centrale thermique du Viazzo. Mise en service en 1981, cette centrale de l’île est également la dernière centrale de France à utiliser du fioul lourd pour alimenter ses 7 moteurs.
Si tout va bien, à partir de 2027, elle devrait laisser sa place à la centrale du Ricanto, dont la construction vient de commencer à une centaine de mètres de là. D’une puissance équivalente de 130 MW, cette dernière sera équipée de 8 moteurs à haut rendement alimentés, cette fois, par de la biomasse liquide, comme la centrale Port-Est de la Réunion. C’est d’ailleurs ce qui en fait sa particularité, permettant ainsi de se targuer du titre d’énergie 100 % renouvelable.
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Selon EDF, la centrale devrait être équipée des toutes dernières technologies pour contenir à un seuil particulièrement bas les émissions de particules. En comparaison avec la centrale du Viazzo, les émissions de CO2 devraient chuter de 65 %, et les émissions de particules et de NOx de 75 %. Le système de refroidissement, en circuit fermé, devrait permettre de réduire de 90 % la consommation en eau, par rapport aux 350 000 mètres cubes annuels utilisés dans la centrale du Viazzo.
Pour alimenter en biomasse liquide cette centrale flambant neuve, et ainsi produire l’équivalent de 20 % de la consommation électrique de la Corse, il faudra tout de même cultiver près de 200 000 tonnes de colza par an, soit l’équivalent de 60 000 hectares.
Le montant de l’investissement est étonnamment élevé : 800 millions d’euros, soit un prix de 6,15 euros par watt, ramené aux 130 MW installés sur la future centrale du Ricanto. C’est autant que le projet de gigantesque parc solaire de 1 000 MW prévu en Gironde, bien plus puissant, mais dont la production électrique ne peut pas être pilotée. 800 millions d’euros, c’est aussi le prix que pourrait coûter une giga-batterie de 1 400 MW de puissance, en se basant sur le montant de l’investissement prévu pour la future batterie de Saint-Avold. Enfin, cela équivaut au coût de 20 éoliennes en mer posées de 8 MW pièce, soit 160 MW, en se calquant sur le prix du parc éolien de Saint-Brieuc.
La difficile décarbonation de l’île de Beauté
Le remplacement de la centrale du Viazzo est attendu depuis longtemps, mais a connu de nombreuses difficultés. Et pour cause, les responsabilités de la nouvelle centrale sont grandes : celle-ci devra assurer un approvisionnement suffisant en électricité ainsi qu’un bon équilibrage du réseau tout en réduisant les émissions de CO2.
Attendue depuis longtemps, cette nouvelle centrale thermique alimentée à 100 % par des énergies renouvelables devrait jouer un rôle majeur dans les objectifs de décarbonation et d’indépendance énergétique de l’île, à l’horizon 2050. Encore aujourd’hui, la Corse est, avec les DOM-TOM, parmi les régions les plus émettrices de CO2 du pays pour la production électrique, avec presque 437 gCO2eq/kWh. C’est quasiment 10 fois plus que la France hexagonale.
Cette intensité carbone particulièrement élevée s’explique justement par la dépendance de l’île au diesel, ainsi que ses interconnexions avec l’Italie continentale et la Sardaigne voisines, donc le mix électrique est dominé par les énergies fossiles, en particulier le gaz.
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Depuis 2015 et la publication de la première programmation pluriannuelle de l’énergie régionale, l’île de Beauté investit massivement pour inverser cette tendance. Au total, c’est l’équivalent de 3 milliards d’euros de projets qui ont été lancés sur la période 2016-2023, dont 500 millions de projets d’énergies renouvelables. Les investissements se poursuivent encore aujourd’hui, à l’image de la centrale du Ricanto, dont le coût avoisine les 800 millions d’euros. À l’occasion de la pose de la première pierre de la centrale, Luc Rémont a, par ailleurs, annoncé que près de 200 millions d’euros supplémentaires allaient également être investis en Corse durant les 5 prochaines années.
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