Sites d’infos générés par IA : « Notre job, c’est gruger Google » pour faire du fric
Vas-y fonce, on sait jamais, sur un malentendu, ça peut marcher

7 des 50 principaux sites d’information en français mis en avant par l’algorithme Discover de recommandation de contenus de Google sont générés par IA. Plusieurs le comparent à TikTok et le qualifient de « réseau social de Google », voire à « une drogue » susceptible de « générer une dépendance », au vu des milliers d’euros de chiffre d’affaires engrangés, par jour. Deux d’entre eux seraient même devenus millionnaires grâce à Discover, en trois mois seulement. Suite de notre enquête-fleuve sur les sites d’info générés par IA.
Notre enquête sur ces milliers de (soi-disant) sites d’info « en tout ou partie générés par IA » (GenAI) nous a permis d’en identifier près de 70 ayant « popé » (pour reprendre l’expression consacrée) sur l’algorithme Discover de recommandation de contenus de Google ces dernières semaines. Et ce, sans que Google ne parvienne à endiguer ce qui s’apparente à une véritable pollution médiatique et informationnelle, et quand bien même ces sites ne respectent pourtant pas les règles du moteur de recherche.
- [Récap] Nous avons découvert des milliers de sites d’info générés par IA : tous nos articles
- Sites d’info générés par IA : Google ne respecte pas ses propres règles
Or, non content d’être générés par IA, et d’émaner de professionnels du référencement (SEO) et du marketing numérique, et non de professionnels des médias journalistiques, nombre de ces articles, mis en avant par l’algorithme (et application) Discover « hallucinent » et relaient moult rumeurs et infox’, dont la viralité a valu à certaines d’être reprises par des journalistes dans des médias « grands publics » voire réputés.

À défaut de comprendre ce pourquoi Google en arrive à recommander de tels articles, dont le caractère GenAI saute généralement aux yeux à la simple consultation du titre et de son image d’illustration, nous avons cherché à comprendre pourquoi, et comment, autant de pros du SEO s’étaient lancés à l’assaut de Discover.
La première raison est que Discover, disponible dans l’application Google, est devenu la principale source de trafic vers les sites d’information, et que les gens s’informent de plus en plus sur leurs téléphones portables, comme nous l’avons détaillé dans un précédent article. Les contenus recommandés par Google, dont la consultation ne dure et prend généralement que quelques minutes seulement, y sont personnalisés en fonction du profil et de l’historique de ses utilisateurs.
Ce pourquoi de plus en plus de gens utilisent Discover, sorte de « fast food de l’information » qui ne dit pas son nom (le mot Discover n’apparaît pas dans l’application Google, et n’est connue que des « professionnels de la profession »), pour s’informer ou passer le temps dans les transports en commun, aux toilettes, à la pause clope ou déjeuner.
Nous avons aussi découvert que leurs éditeurs sont doublement incités par Google à « poper » dans Discover, du fait du fonctionnement même de son algorithme de recommandation algorithmique d’une part, et d’autre part de celui de sa régie publicitaire AdSense, qui leur permet d’espérer pouvoir générer plusieurs milliers d’euros de revenus (par jour), voire même de prétendre devenir millionnaire (en trois mois).
Une course à l’audience reposant notamment sur des rumeurs et infox’
« C’est confirmé : tous les virements bancaires seront suspendus en France à partir de cette date ». « C’est terminé pour les billets de banque : ils ne seront désormais plus valables à partir de cette date ». « La nouvelle est tombée : il sera désormais interdit de retirer du liquide en France à partir de cette date ».
Ces derniers temps, l’algorithme (et application) Discover de recommandation de contenus de Google met de plus en plus souvent en avant des articles relayant de telles rumeurs et infox’ émanant de (soi-disant) sites d’info générés par IA (GenAI), même et y compris en tête de ses résultats. Quelques-uns excellaient d’ailleurs à « poper » sur Discover, tels que laplasturgie.fr ou gre-mag.fr (ils ont depuis tous deux été désactivés).






D’autres laissaient entendre que des mines et gisements d’or, d’uranium, d’hydrogène (entre autres) de plusieurs (dizaines) de milliards d’euros avaient été découverts en France, que le gouvernement allait saisir de l’argent sur les livrets A pour financer l’effort de guerre en Ukraine, qu’il était désormais interdit aux grands-parents d’y déposer de l’argent, ou encore annonçaient (à tort, là encore) la fermeture de magasins Carrefour ou Décathlon, notamment.
Leurs éditeurs se livrent en effet à une véritable course à l’audience, n’hésitant pas à se plagier les uns les autres dès lors qu’un de leurs articles est mis en avant sur Discover. Ils semblent se surveiller les uns les autres, et lorsqu’ils voient qu’un nouveau type d’info commence à « poper » sur Discover, ils s’en inspirent et les plagient, sur leurs différents sites, contribuant à générer encore plus d’articles relayant, notamment, leurs « hallucinations », rumeurs et infox’.
Une mécanique que nous avions déjà décrite dans notre article au sujet d’une « rumeur », hallucinée par des sites GenAI puis amplifiée par des journalistes et médias, avançant que les voitures de plus de 10 ans devraient prochainement faire l’objet d’un contrôle technique annuel.
Depuis, ce type d’emballements médiatiques autour de rumeurs et d’infox générées par IA, mais néanmoins reprises par des journalistes et médias, n’a fait que s’accélérer. Et de plus en plus de journalistes et médias se retrouvent, eux aussi, à devoir y consacrer des articles de fact-checking, pour les démentir.