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En Ukraine, les gardiens du nucléaire tirent la sonnette d’alarme

Depuis deux semaines, la guerre en Ukraine a franchi un nouveau cap. Les activités militaires se sont intensifiées autour des centrales nucléaires. De quoi craindre le pire ?

À Tchernobyl, les experts de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) ont été réveillés le 28 août par des tirs antiaériens visant des drones détectés à cinq kilomètres de la centrale. À Rivne, où se trouve également une installation nucléaire, les survols se multiplient : treize drones ont été signalés en quelques jours, selon le communiqué de l’AIEA du 10 septembre 2025. À Khmelnytskyï, neuf autres appareils ont été repérés à trois kilomètres seulement du réacteur. Et à Zaporijia, les observateurs notent désormais des tirs presque quotidiens.

Le 1er septembre 2025 a marqué un cap symbolique. Trois ans que les équipes de l’AIEA se relaient sans répit en Ukraine. Trois années à vivre au rythme des alarmes, à descendre dans les abris, à inspecter des installations qui ne peuvent jamais être laissées sans surveillance. Une routine devenue extraordinaire : vérifier, témoigner, alerter, pour empêcher que la guerre ne franchisse la ligne rouge.

Rafael Grossi, directeur général de l’AIEA, le répète à chaque mise à jour : presque tous les “sept piliers” de la sûreté nucléaire sont aujourd’hui entravés. L’intégrité physique des installations est menacée par les bombardements. L’indépendance des opérateurs fragilisée par la pression militaire. L’alimentation électrique réduite à une seule ligne externe quand il en faudrait deux. Les chaînes d’approvisionnement ralenties. Et la sérénité du personnel, impossible à garantir sous les sirènes.

À Zaporijia, la plus grande centrale d’Europe, la fragilité est criante. Occupée depuis 2022, elle ne survit que grâce à une ligne électrique unique et à un barrage improvisé qui maintient encore l’eau de son canal de refroidissement. Malgré tout, les ingénieurs continuent d’assurer la maintenance, de tester les systèmes d’urgence, de vérifier les stocks de carburant pour les générateurs. Un travail d’équilibriste, mené au bord du vide.

Ce qui se joue n’est pas qu’ukrainien. Un accident majeur, provoqué par une coupure de courant ou une frappe trop proche, n’aurait pas de frontières. Mais l’histoire dit aussi autre chose. Même au cœur de la guerre, la coopération internationale, la compétence technique et la vigilance obstinée permettent de maintenir la ligne rouge. Tant que ces “gardiens du nucléaire” restent sur place, le fil tient encore.

Et ce fil, l’AIEA le tisse bien au-delà de l’Ukraine. En Iran, les inspections de l’Agence ont été suspendues en juillet 2025. Rafael Grossi plaide aujourd’hui pour leur restauration, qu’il juge indispensable afin de “créer un terrain prometteur” vers de plus larges avancées diplomatiques. D’un front à l’autre, l’Agence incarne une certitude : sans contrôle, la peur s’installe. Avec des yeux et des oreilles sur le terrain, même dans le chaos, une marge de sécurité demeure.

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« ChatControl », la perquisition numérique systématique de nos conversations

Demain, l’Europe va-t-elle lire tous vos messages ? C’est le principe de « ChatControl », projet relancé aujourd’hui au nom de la lutte contre la pédocriminalité. Une surveillance de masse qui pourrait mettre fin au secret des correspondances, saturer les services de police et offrir une porte d’entrée aux ingérences étrangères. Alors, tous suspects ?

Depuis quelques années, la Commission européenne planche sur des mesures fortes pour lutter contre la pédocriminalité sur Internet. L’une d’entre elles, partant de bonnes intentions, a été surnommée « ChatControl » par Patrick Breyer, député européen allemand Pirate jusqu’en 2024, qui a été le premier à en dénoncer les dangers. Mise au placard en décembre 2024, sous la présidence hongroise, par une étroite minorité de blocage, la proposition a été relancée par la présidence danoise en ce 2ᵉ semestre 2025.

De quoi s’agit-il ?

ChatControl consiste à obliger légalement les opérateurs de messagerie à scanner l’intégralité de nos échanges privés en ligne, afin d’identifier de potentielles images pédopornographiques.
Les signalements seraient ensuite transmis automatiquement aux autorités de police pour archivage et enquête. Deux procédés sont prévus :

  • détection d’images déjà connues des services de police ;
  • reconnaissance par IA d’images inédites.

Pourquoi c’est un problème ?

Le projet met fin à la confidentialité des échanges. En France, ce principe est garanti par le Code des postes et télécommunications. L’article 8 de la Convention européenne des droits humains consacre également « le droit au respect de la correspondance ».

Cette disposition n’empêche pas les États de placer des citoyens sous surveillance, mais seulement dans des cas précis, sur présomption et sous contrôle judiciaire. ChatControl inverse ce principe : il ne s’agit plus d’écoutes ciblées, mais d’un contrôle généralisé de toute la population. En somme : tous perquisitionnés par principe, parce que tous suspects.

La Commission a fait valoir que personne ne serait obligé de consentir à ce scan massif… à condition de ne pas pouvoir échanger de photos avec ses amis. Il s’agirait donc d’un « consentement forcé ».

Fiabilité contestée

Les procédés de repérage d’images connues présentent de fortes limites. Des études récentes ont montré qu’ils pouvaient être contournés facilement, soit par recompression de l’image ciblée, soit en provoquant la détection incorrecte d’une image ciblée.

Les algorithmes d’IA posent encore plus de problèmes. Même avec une précision théorique de 99,99 % – bien au-delà de leurs performances réelles –, 1 image sur 10 000 serait signalée à tort. À l’échelle des centaines de millions d’images échangées chaque jour, cela noierait la police sous des masses de faux positifs et rendrait le système inopérant. On peut citer le cas d’un père dénoncé à tort pour pédocriminalité par Google après avoir envoyé une photo de son fils à un médecin.

Une faille de sécurité structurelle

Introduire un « mouchard » dans les applications revient à créer un trou dans la confidentialité de bout en bout, multipliant les possibilités d’attaque par des tiers : d’abord dans notre téléphone, ensuite chez l’opérateur de l’application, enfin dans les systèmes de police.

Il ne s’agit pas d’un fantasme : les fuites de données personnelles sensibles, que ce soit dans des entreprises, des administrations ou des services de police, adviennent quotidiennement. Les tiers indiscrets peuvent même être des services de renseignement étrangers qui coopéreraient avec les opérateurs de messagerie de leur pays. Voulons-nous nous mettre à la merci des services russes ou iraniens ?

L’éditeur de l’application Signal, emblématique en matière de protection des communications, a annoncé qu’il se retirerait de l’Union européenne si ChatControl était adopté, jugeant impossible de maintenir son niveau de sécurité tout en respectant les nouvelles obligations.

Enfin, last but not least, les technologies de surveillance voient systématiquement leur périmètre étendu au fil du temps, bien au-delà des prétentions initiales qui ont permis leur adoption. C’est pourquoi protéger le secret de la correspondance doit rester la règle de principe.

Où en est-on ?

Ce 12 septembre, les États doivent faire part à la Commission européenne de leurs positions. Certains ont reculé, comme la Belgique, la Finlande ou la Tchéquie. D’autres restent indécis : Allemagne, Roumanie, Estonie ou Grèce. La France, quant à elle, a – hélas ! – toujours soutenu le projet.

Le projet, s’il est validé par les États, doit ensuite passer au vote le 14 octobre au Parlement européen.


Plus d’informations sur ChatControl :

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Bloquer ? Non, croître !

« Il faut plus de moyens. » « Il faut plus de dépenses. » « Taxons les riches ! » Nouveau mouvement, anciens slogans. Pour les militants du 10 septembre, la seule réponse à nos difficultés semble consister à creuser toujours plus la dette. Et si on essayait la croissance ?

La France connaît une crise économique, politique et sociale inédite. Plombée par des divisions béantes, le bûcher des égoïsmes, une vision du monde obsolète où les vieilles lunes dominent par la grâce des extrêmes et la déconnexion frileuse et sans imagination du bloc central, elle file droit vers l’abîme de la relégation. Privée de majorité comme de budget, incapable de compromis, elle regarde avec lassitude la valse des Premiers ministres et méprise une dette publique qui culmine à 3 345 milliards d’euros, représentant environ 116 % du PIB selon les dernières projections du Fonds monétaire international et de l’OCDE. Le déficit budgétaire persiste autour de 5,4 % à 5,8 % du PIB, tandis que les paiements d’intérêts sur cette dette s’élèvent à près de 66 milliards d’euros annuels. Un montant qui dépasse déjà le budget alloué à l’éducation et pourrait atteindre 100 milliards d’ici 2029 en continuant sur cette lancée. Et les nouveaux emprunts pourraient passer la barre des 4 % – ce qui induit +5 milliards d’intérêts annuels par point de taux –, tandis que nous remboursons difficilement ceux qui tournent autour de 1,3 %. Autant de sommes qui ne participent pas à l’investissement en faveur de l’école, de la justice, de la santé, de la sécurité ou de la défense. Pire, nous attendons fébrilement la dégradation de la note du pays par les différentes agences de notation, dont les verdicts vont tomber entre le 12 septembre et la fin octobre. Une autre perspective d’augmentation des taux d’intérêt et donc de la dette future. Quant à la croissance du PIB, elle est anémique, prévue à seulement 0,6 % à 0,8 % pour l’année, bien en deçà de la moyenne de la zone euro, pourtant peu reluisante avec ses 1,5 %. Même si le chômage a baissé ces dernières années, non sans quelques douteux artifices de présentation de ses chiffres et de sa structure, il reste élevé, à 7,5 %. Et s’agissant des retraites, depuis 20 ans, leur financement tire les dépenses publiques vers le haut, totalisant 14 % du PIB et près de la moitié des versements en faveur des aides sociales. Le tout par refus de faire tomber le tabou de la capitalisation, toujours profitable sur le temps long malgré de potentielles brèves baisses de rendement conjoncturelles. Comme le montre la capitalisation partielle suédoise, qui a permis de stabiliser un système précédemment fragilisé. Enfin, l’inflation, bien que désormais modérée, revenue autour de 1 %, a vu son augmentation massive durant les deux dernières années éroder le pouvoir d’achat des ménages.

Austères perspectives ?

Face à un tableau aussi noir, la logique voudrait que l’on applique une véritable politique d’austérité, ainsi qu’il en a toujours été quand des pays ont fait face à une violente crise de la dette. Coupes budgétaires massives, hausses d’impôts et réductions drastiques dans les dépenses sociales sont les recettes habituelles en la matière. Cette approche, qui vise à ramener le déficit sous les 3 % du PIB, pourrait, dans un premier temps, aggraver la situation, comme l’ont démontré les cas passés de la Grèce entre 2010 et 2015, où cette politique a provoqué une chute de 25 % du PIB et une explosion du chômage à 27 %. Nous n’y sommes pas encore. Mais, hélas, quand le point de non-retour est atteint, c’est indispensable. Et contrairement à ce qui est clamé à longueur de manifestations, nous sommes encore très loin d’une politique d’austérité, même si tant de choses seraient à dire concernant la gestion de l’État et les nombreuses économies pouvant être envisagées sans augmenter les inégalités.

Oser la croissance !

Mais il existe un contrepied radical à ces sombres perspectives : s’appuyer sur les atouts de la France pour enfin oser la croissance économique. Ce n’est pas une option facultative, mais l’unique stratégie viable pour désendetter le pays sans sacrifier les citoyens. Historiquement, les phases de forte expansion ont permis de réduire le ratio dette/PIB de manière organique, sans austérité punitive. Aux États-Unis, après la crise financière de 2008, le plan de relance d’Obama, doté de 800 milliards de dollars, a stimulé une croissance moyenne de 2,5 % par an, ramenant la dette de 100 % à 74 % du PIB en 2019 selon les données de la Banque mondiale. En France même, les Trente Glorieuses ont vu une croissance annuelle de 5 %, divisant par deux le poids de la dette accumulée après la Seconde Guerre mondiale, tout en finançant un État-providence robuste. Sans une accélération similaire, la dette française pourrait atteindre 120 % du PIB d’ici 2026, alourdissant les intérêts de 10 à 15 milliards supplémentaires par an. À l’inverse, cibler une croissance de 3 % par an – un objectif réaliste avec des réformes en faveur des entreprises – générerait 150 milliards d’euros de PIB additionnel sur trois ans, augmentant les recettes fiscales de 60 à 70 milliards (à un taux moyen de 45 % du PIB, chaque point de croissance rapportant environ 30 milliards en impôts et cotisations).

Desserrer l’emprise

Pour rendre cette perspective réaliste, il faut d’abord réduire une part du périmètre de l’État, pas celle qui aide les – réels – plus fragiles, mais celle qui n’a rien à voir avec les missions d’une nation ou qui relève de la pure sphère privée, comme les participations de l’État dans Renault – le résultat d’une rétorsion post-Seconde Guerre mondiale. Mais aussi baisser les impôts de manière ciblée, en ramenant le taux de l’impôt sur les sociétés de 25 % à 15 % pour les PME innovantes et les nouveaux secteurs stratégiques. Des domaines dans lesquels nous possédons des champions ne demandant qu’à assumer leurs responsabilités. C’est notamment le cas dans l’intelligence artificielle, l’énergie solaire, les biotechnologies, la santé numérique, l’aéronautique, la fintech, la cybersécurité, la banque ou encore l’agritech. Cela pourrait générer des milliards d’euros annuels pour les investissements privés, avec un coût budgétaire initial de 15 milliards, rapidement compensé par 25 milliards de recettes supplémentaires issues de l’activité accrue. L’exemple de l’Irlande est édifiant. Son taux d’imposition sur les sociétés de 12,5 % a attiré plus de 1 000 milliards d’euros d’investissements étrangers depuis 2000, propulsant sa croissance à 5 % en moyenne – malgré des fluctuations allant de -5 % à +18 % – et créant des centaines de milliers d’emplois qualifiés.

Cultiver nos potentiels

Parallèlement, des investissements massifs en infrastructures et innovations s’imposent : allouer 100 milliards d’euros sur cinq ans, financés par des emprunts à bas taux (autour de 2,5 % actuellement pour les obligations françaises à 10 ans), à la transition numérique et verte. Pas par une planification étatique rigide – de la promotion de l’hydrogène à la destruction de la filière nucléaire, l’État n’a pas démontré sa lucidité – mais par une approche bottom-up, qui fixe un cap, soutient les projets, mais laisse aux acteurs économiques la liberté de choisir leurs solutions. Cela inclut 50 milliards pour l’intelligence artificielle et les start-up, amplifiant les leviers de la BPI, et pourrait créer 500 000 emplois high-tech selon les estimations de divers cabinets. Le retour sur investissement est prouvé : chaque euro investi en R&D génère 2,5 euros de PIB additionnel, d’après l’OCDE, transformant ces dépenses en moteurs de prospérité à long terme.

L’impôt pour tous

À cela s’ajoute une nécessaire réforme fiscale, incluant l’impôt pour tous, comme au Danemark – le pays le plus proche de nous en termes de prélèvements – même de manière symbolique, afin de concerner tous les citoyens et de ramener chacun dans le cadre républicain. Avec également une redéfinition des tranches, de manière à ce que les classes moyennes supérieures, les plus affectées et les moins aidées, retrouvent une dynamique d’action.

Plus léger, plus agile

Une dérégulation intelligente compléterait ces mesures, en simplifiant le Code du travail pour réduire de 30 % les normes administratives superflues, facilitant les embauches et les adaptations des entreprises. Mais en l’appliquant avec doigté pour ne pas créer d’appels d’air au seul profit de bas salaires et en empruntant des recettes à la flexisécurité nordique. Enfin, des ajustements de TVA, comme en Irlande encore une fois, notamment sur les biens essentiels, pourraient stimuler la demande intérieure.

Contrairement à l’austérité, dont le multiplicateur fiscal négatif contracte l’économie, une relance expansionniste offre un multiplicateur positif, permettant de ramener le déficit sous 3 % du PIB d’ici 2030 et de stabiliser la dette. Tous, citoyens, entrepreneurs, élus, devons rejeter la petite musique soit étroite, soit décroissante, soit de repli, qui agite la classe politique comme la rue ! Une France dynamique, innovante et leader mondial dans l’innovation, dont la croissance serait la clé de l’équité et de la souveraineté, reste possible.

Nous y croyons !

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Plus jamais perdus ?

“Pas de réseau” – cette angoisse de la zone blanche va-t-elle bientôt disparaître ?
Car la panne ou l’urgence surgit toujours quand les barres de connexion s’éteignent. La liaison directe entre nos smartphones et les constellations de satellites, dont Starlink est le précurseur, est sur le point d’y mettre fin.

C’est une acquisition qui annonce des bouleversements majeurs. Avec le rachat du portefeuille spectral d’EchoStar pour 17 milliards de dollars, SpaceX acquiert une large bande de fréquences aux États-Unis (50 MHz de spectre S-band) ainsi que des autorisations d’exploitation pour fournir des services mobiles par satellite dans le monde entier (licences globales MSS). Une étape décisive vers l’objectif d’une élimination complète des zones blanches dans le monde, c’est-à-dire des zones sans aucun réseau téléphonique mobile.

Une connectivité téléphonique 5G sur l’ensemble du territoire américain

Si les licences MSS permettront d’offrir des services téléphoniques basiques (SMS, appels, données limitées) à l’échelle planétaire, c’est le spectre S-band américain qui constitue la base de la véritable prouesse technique à venir.

Une nouvelle génération de satellites, optimisée pour exploiter ce spectre exclusif, promet en effet une multiplication par 100 de la capacité du système de connectivité directe des téléphones portables aux satellites Starlink aux États-Unis. Concrètement, cela signifie une connectivité équivalente à la 5G des réseaux terrestres actuels. Imaginez : de la vidéoconférence fluide depuis les parcs nationaux, ou encore du streaming haute définition en plein désert du Nevada, directement depuis votre smartphone.

L’enjeu crucial de l’adoption par les géants du mobile

Cette révolution nécessitera toutefois une adaptation : les bandes de fréquences S-band acquises (AWS-4 et PCS-H) ne sont actuellement acceptées par aucun téléphone existant. Apple, Samsung et les autres constructeurs devront intégrer ces nouvelles fréquences dans leurs futurs appareils.

Le géant de Cupertino, déjà engagé avec Globalstar pour sa propre solution satellitaire, se trouve maintenant dans une position délicate : continuer son partenariat actuel ou céder aux pressions d’Elon Musk, qui n’hésite pas à brandir la menace d’un « téléphone Starlink » propriétaire.

Les implications de cette technologie dépassent le simple confort. Lors de récentes catastrophes naturelles aux États-Unis, 1,5 million de personnes ont pu communiquer via Starlink Direct to Cell quand les réseaux cellulaires terrestres étaient détruits. En Nouvelle-Zélande, une automobiliste a pu alerter les secours via satellite après un accident, permettant aux secours d’arriver en quelques minutes alors qu’elle se trouvait en zone blanche.

Les risques d’un monopole spatial

Cette nouvelle acquisition révèle la stratégie agressive de SpaceX et Starlink : dominer par des investissements massifs sans préoccupation de rentabilité à court terme. La concurrence du projet Kuiper d’Amazon demeure essentielle pour préserver un écosystème sain. Si la promesse d’une connectivité universelle est enthousiasmante, elle ne doit pas faire oublier l’importance d’un paysage concurrentiel équilibré dans ce secteur télécom stratégique de demain.

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Stanford vs Neuralink : la guerre des implants

Les interfaces cerveau-machine (ICM) font parler d’elles, avec deux projets phares : l’implant de l’Université Stanford, qui traduit les pensées en paroles, et celui de Neuralink, porté par Elon Musk, qui vise à connecter le cerveau aux machines. Si les deux partagent des ambitions médicales, leurs approches, technologies et implications divergent. Comparatif…

Origines et objectifs

Stanford : lancé dans le cadre du projet BrainGate 2, l’implant de Stanford, dévoilé en 2025, se concentre sur la restauration de la parole pour les personnes paralysées, comme celles atteintes de la maladie de Charcot ou victimes d’AVC. Il cible le cortex moteur pour capter les intentions de parole et les traduire via une IA entraînée sur des milliers d’heures de données cérébrales.

Neuralink : fondée en 2016 par Elon Musk, Neuralink ambitionne plus large : initialement, restaurer la motricité et la communication pour les paralytiques. Mais à terme, elle vise à fusionner l’humain avec l’IA, voire à permettre de contrôler des interfaces externes par la pensée ou de restaurer la vision. Son premier essai humain a eu lieu en janvier 2024, avec quatre ans de retard néanmoins.

Fonctionnement

Stanford : l’implant utilise une centaine de microélectrodes insérées dans le cortex moteur pour capter les signaux neuronaux liés à la parole. Une IA décrypte ces signaux en mots, atteignant 74 % de précision sur un vocabulaire de 125 000 mots. Un mot de passe mental sécurise l’activation, avec 98 % de fiabilité.

Neuralink : baptisé Telepathy, c’est un dispositif de la taille d’une pièce de monnaie, implanté dans le crâne avec 64 fils ultrafins (1 024 électrodes) insérés dans le cortex par un robot chirurgical. Il capte les signaux neuronaux pour contrôler des appareils (curseur, clavier) via Bluetooth. Les premiers résultats montrent une détection prometteuse des « pointes neuronales ». Neuralink travaille aussi sur une nouvelle génération d’implants avec jusqu’à 16 000 électrodes, ce qui pourrait accroître sa précision pour de futures applications.

Résultats probants

Stanford : en août 2025, une patiente tétraplégique a retrouvé une voix synthétique imitant la sienne, avec un débit de 62 mots par minute, proche d’une conversation naturelle. D’autres tests ont permis de décoder des pensées spontanées.

Neuralink : en 2024, Noland Arbaugh, tétraplégique, a contrôlé un curseur et joué aux échecs par la pensée, décrivant l’expérience comme « intuitive ». Un second patient, implanté en août 2024, utilise l’implant pour jouer à des jeux vidéo et concevoir en 3D. Cependant, des problèmes de rétraction des fils ont affecté le premier patient.

Limites et défis

Stanford : l’implant nécessite une chirurgie invasive, avec risques d’infection ou de rejet. La précision de l’IA reste imparfaite, et le système demande un entraînement long. Sa portée est limitée à la parole pour l’instant.

Neuralink : la rétraction des fils, observée chez le premier patient, a réduit le nombre d’électrodes fonctionnelles de 85 %, impactant la performance. Les tests sur animaux (singes, cochons) ont soulevé des inquiétudes éthiques, avec des rapports de complications graves (paralysie, infections). La transparence limitée de Neuralink est critiquée, les annonces venant souvent de Musk, sans données scientifiques publiques.

Dangers éthiques

Stanford : les risques incluent le piratage des données neuronales et l’accès non autorisé aux pensées. Les chercheurs insistent sur la nécessité de « neurorights » – droits à l’inviolabilité mentale – pour protéger l’intimité mentale.

Neuralink : les ambitions d’Elon Musk (fusion avec l’IA, contrôle total par la pensée) font craindre une surveillance accrue ou une inégalité d’accès. Les controverses sur les tests animaux et le manque de transparence renforcent les doutes sur la sécurité et l’éthique.

Verdict

Stanford excelle dans la précision pour restaurer la parole, avec une approche académique rigoureuse, mais reste focalisé sur un usage médical. Neuralink, plus ambitieux, vise une révolution technologique, voire transhumaniste, mais sa fiabilité technique et éthique est questionnée. Les deux projets repoussent les limites du possible, mais soulèvent des questions brûlantes sur la vie privée et l’avenir de l’humanité.

Voir : L’implant qui fait parler la pensée !

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L’implant qui fait parler la pensée !

Imaginez : vous pensez à une phrase, et hop, elle s’affiche à l’écran ou sort avec votre propre voix synthétisée ! Ce n’est plus de la science-fiction, mais une réalité émergente grâce à un implant cérébral développé par des chercheurs de l’Université de Stanford.

Annoncé en août 2025 via une étude publiée dans la revue Cell, ce projet d’interface cerveau-machine (ICM) vise à redonner la parole aux personnes paralysées, comme celles atteintes de la maladie de Charcot (hélas, encore sans rémission) ou victimes d’AVC.

Le son du cerveau !

L’implant, un réseau de microélectrodes fines comme des cheveux, s’insère dans le cortex moteur, la zone du cerveau qui gère la parole. Ces sondes captent les signaux neuronaux émis quand on « pense » une phrase sans la prononcer – cette fameuse petite voix intérieure. Couplé à une IA entraînée sur des milliers de patterns cérébraux, le système traduit ces impulsions en mots ou en phrases en temps réel. Précision actuelle : environ 74 % pour un vocabulaire allant jusqu’à 125 000 mots. Le tout est sécurisé par un mot de passe mental, pensé pour activer le décodage, avec une fiabilité de 98 %.

Les tests sont impressionnants. Chez une patiente tétraplégique, privée de parole à la suite d’un AVC, l’implant a converti ses pensées en sa voix d’avant, avec un délai réduit à 80 millisecondes. D’autres essais, dans le cadre du projet BrainGate 2, ont décodé des pensées spontanées, comme imaginer écrire des phrases, montrant que le système peut fonctionner avec un entraînement préalable.

En mars 2025, une version similaire a permis une communication quasi instantanée pour une femme paralysée. Mais ne rêvons pas trop : il faudra encore plusieurs années de tests pour affiner les algorithmes et le hardware de l’implant avant de pouvoir le diffuser.

Attention aux « red flags »

Malgré ces avancées, le vocabulaire utilisable est souvent limité (1 024 mots dans certains modèles), l’IA commet des erreurs, et son entraînement demande des heures. Surtout, l’implantation est invasive, fondée sur une lourde chirurgie cérébrale, entraînant des risques d’infection ou de rejet. Par ailleurs, d’évidentes questions éthiques se posent. Et si vos pensées privées pouvaient être lues sans votre permission ? Le mot de passe représente certes une sécurité. Mais imaginez que votre cerveau soit quand même hacké ! Cela amènerait désormais à envisager la question des « neurorights » : des droits à l’inviolabilité mentale.

À lire : Stanford vs Neuralink : la guerre des implants

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La recette gagnante du libéralisme à la sauce hollandaise

1982. Pendant que la France décrète la retraite à 60 ans, les Pays-Bas, en crise, s’engagent sur une toute autre voie. Pour sortir du marasme, syndicats et organisations patronales scellent un compromis historique.

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1    Syndrome hollandais : concept économique né après la découverte du gisement de gaz de Groningen dans les années 1960. L’afflux de devises a entraîné une appréciation du florin, rendant l’industrie moins compétitive et provoquant un déclin manufacturier, symptôme d’une dépendance excessive à la rente énergétique.

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D’où vient le déficit ? Comment le combler ?

1974 : c’est la dernière année où les comptes de l’État ont été équilibrés. Depuis, les vannes de la dette se sont ouvertes et les finances publiques glissent vers un gouffre sans fond. Est-ce irrémédiable ?

Un demi-siècle plus tard, en 2024, le déficit des administrations s’établit à 5,8 % du PIB, soit 168 milliards d’euros, à peu près 5 400 € par ménage français. Il continue d’alimenter une dette record de 3 305 milliards d’euros, supérieure à 100 000 € par foyer. La France est désormais sur le podium des pays les plus endettés de l’UE, avec 113 % du PIB, derrière la Grèce (154 %) et l’Italie (135 %). Et les prévisions pour 2025, tablent sur 116%.

D’où vient le déficit ?

Chaque année, les administrations publiques collectent des recettes et les redistribuent. Le déficit vient de la différence entre la dépense publique et les prélèvements obligatoires. La pression fiscale en France est pourtant l’une des plus élevées du monde. Plus d’un euro sur 2 produits est taxé par l’Etat (51 % du PIB contre 46 % en moyenne UE en 2024). Malgré ces masses considérables collectées, la dépense s’établissait l’année dernière à 57 % du PIB. Sur 10 € dépensés par les administrations publiques, seuls 9 € proviennent des impôts et des cotisations obligatoires. L’euro manquant est emprunté sur les marchés. Rapporté au nombre de ménages, les administrations publiques ont dépensé en moyenne 52 000 € après avoir collecté 47 000 € en 2023.

Sources : Fipeco et ministère de l’Economie.

Envisagé sur le temps long, notre déficit est structurel. Il est, depuis plus de 10 ans, d’environ 3 points plus élevé que celui de nos voisins européens. Sur les dernières années, il a continué de dériver bien au-delà des 3 % malgré la fin des mesures d’exception liées au covid. D’après la Cour des comptes, les recettes fiscales ont été très en deçà des attentes et les dépenses ont été fortement tirées par les collectivités territoriales et les prestations sociales en 2023 et 2024.

Si l’on compare la France avec nos voisins, nous allouons 8 points de PIB de plus que la moyenne de l’UE aux dépenses publiques, dont 1,5 points de plus sur la santé et 4 points de plus sur la protection sociale, essentiellement sur les pensions. Si l’intégration de ces dernières dans la comptabilité du déficit fait débat (voir encadré), la comparaison européenne est implacable : notre trou d’air vient plus d’un excès de dépenses majoritairement attribuable aux retraites que d’un manque de recettes…

Source : Ministère de l’Économie et des Finances

Retraites : déficit ou pas déficit ?

J’approfondis

Ce surcoût s’explique notamment par un âge de départ effectif survenant en France 2 ans avant celui de la moyenne des pays de l’OCDE, et par un système qui repose quasiment exclusivement sur la répartition. Contrairement à la capitalisation, cette redistribution directe est mise à mal par le papy-boom et la baby-bust (effondrement de la natalité) qui dégradent le ratio actifs/retraités. Une réalité qui, ces dernières années, a été négligée à cause du faible coût de la charge de la dette – autrement dit, le coût de ses intérêts. Chiffre qui a atteint 58 milliards d’euros en 2024. Un montant historiquement bas obtenu grâce aux très faibles taux, parfois même négatifs, sur les emprunts contractés entre 2015 et 2021.

Mais la donne a changé. Cette parenthèse conjoncturelle exceptionnelle s’est désormais refermée. Et depuis quatre ans, les taux ont largement remonté, voyant la facture s’envoler, ce qui entraîne nos finances publiques dans un cercle vicieux. Le déficit se met à dériver sous la pression du coût de la dette, devenu un boulet de plus en plus lourd à porter. Il tend désormais autour de 6 %, alors que la croissance peine à atteindre les 1 %. Notre endettement n’est pas un investissement. Il soutient à bout de bras un système exsangue, aux dépens des générations futures.

Comment combler le déficit ?

Les mesures pour réduire le déficit constituent des choix politiques forts. Plusieurs propositions sont régulièrement avancées dans le débat public. Au-delà de leur légitimité ou des courants idéologiques qui les portent, elles doivent d’abord être analysées à l’aune de leur réalité comptable. Ces initiatives seraient-elles à même de réduire significativement le déficit ? Voici un tour d’horizon (non exhaustif) de ces propositions et de leur ordre de grandeur et de leur impact budgétaire attendu.

Sources : Budget CESE, CheckNews, Institut Montaigne, Crédits 2025, Gouvernement, France Stratégie, Garbiel Zucman. Collectivités : horizon 2030. Désindexer les pensions : horizon 2029. Retraite à 66 ans : horizon 2050.

Certaines mesures comme la baisse du salaire des ministres et des parlementaires portent une charge symbolique forte, mais elles auraient un impact budgétaire quasiment nul. Au-delà de leur légitimité ou de leur efficacité qui font débat, les antiennes comme la suppression de l’aide médicale d’État (AME), ou le rétablissement de l’exit tax auraient un potentiel très limité pour réduire le déficit.

Les mesures consistant à faire payer les riches, comme la réintroduction de l’ISF ou la mise en place de la taxe Zucman peuvent avoir des effets pervers tels que l’exil fiscal, voire la baisse des recettes du fait de l’effet de la courbe de Laffer : lorsque la pression fiscale devient trop forte, l’activité économique se rétracte et les recettes fiscales diminuent. (Voir encart ci-dessous)

Laffer Zucman

J’approfondis

L’analyse des ordres de grandeur révèle que ce sont surtout les réformes paramétriques sur les postes de dépense principaux qui sont susceptibles de réduire significativement le déficit. Ces mesures peuvent se compter en dizaines de milliards d’euros. Elles impliquent des arbitrages politiques fortement impopulaires, comme retarder l’âge de départ à la retraite ou désindexer les pensions.

L’autre fenêtre d’opportunité pour réduire le déficit consisterait à engager des réformes plus structurelles visant à désengager l’État de certains secteurs via des privatisations. Cela pourrait notamment concerner l’audiovisuel public, ce qui libérerait des crédits et réduirait le déficit, mais serait fortement contesté, en dépit d’un urgent besoin de réforme et de dépolitisation de celui-ci.

Quelles que soient les trajectoires choisies, une chose est certaine : le retour de la croissance est indispensable pour accompagner le rétablissement des comptes publics. La priorité est donc de lever les freins à l’innovation et de soutenir une politique nataliste. Mais aussi de s’assurer que les arbitrages pris pour réduire le déficit ne grèvent pas davantage la croissance. Risque que ferait courir à notre pays une augmentation de la pression fiscale.

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Le thon des cantines : faut-il en faire une salade ?

Paris, Lyon, Marseille… Dans plusieurs grandes villes françaises, le thon ne passe plus le portail des écoles. Trop de mercure dans les boîtes, selon deux ONG. Nouvel excès de précaution, ou vrai risque pour la santé des enfants ?

Cette semaine, Nice, Cagnes-sur-Mer et Marseille ont rejoint un collectif de huit villes (Bègles, Grenoble, Lille, Lyon, Montpellier, Mouans‑Sartoux, Paris et Rennes) qui ont décidé de bannir temporairement ce poisson du menu des enfants. Une décision motivée par une enquête publiée en 2024 par les ONG Foodwatch et Bloom, qui révèle des niveaux élevés de mercure dans les conserves analysées. 

Alors, faut-il vraiment bannir un ingrédient aussi banal qu’une boîte de thon ? Un énième excès de zèle a-t-il succédé à un nouvel emballement médiatique ?  Ou l’histoire est-elle un peu plus subtile ?

La mauvaise note du thon en conserve

Aujourd’hui, dans le thon frais, la concentration en mercure est fixée par l’Union européenne à 1 mg par kilo, comme pour d’autres grands prédateurs marins tels que l’espadon, le marlin ou le flétan. Pour les poissons plus petits, comme la sardine, le maquereau ou le merlan, la limite est beaucoup plus stricte : 0,3 mg/kg. Pourquoi une telle différence ? Parce que le thon ne peut pas, et n’a jamais pu, respecter ce chiffre. Au sommet de la chaîne alimentaire, le mercure présent chez ses proies s’accumule dans son organisme. Avec une norme trop stricte, il disparaîtrait purement et simplement des étals. Le chiffre retenu est donc plus politique que sanitaire.

Dans les boîtes de conserve, le problème s’aggrave : la chair perd de l’eau et concentre davantage le mercure. Une boîte peut contenir l’équivalent de 2 à 3 mg/kg, parfois plus. Lors des tests réalisés par les ONG, certaines affichaient jusqu’à 3,9 mg/kg. Près de 13 fois la limite tolérée pour d’autres poissons de consommation courante !

Le phénomène n’est pas nouveau. Une étude américaine a analysé les concentrations en mercure de spécimens de musées capturés il y a près d’un siècle. Celles-ci sont du même ordre qu’aujourd’hui.

Un enfant, une boîte, cas d’école

Prenons le cas extrême d’un enfant de 40 kg qui mange une boîte entière de 150 g de thon, avec une teneur de 3,9 mg/kg (le maximum mesuré). Cela représente environ 0,585 mg de mercure ingéré.

Or, la dose hebdomadaire tolérable (DHT) fixée par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) est de 1,3 microgramme de mercure par kilo de poids corporel. Pour un enfant de 40 kg, cela correspond à 0,052 mg par semaine.

Une seule boîte suffit pour que cet enfant dépasse la limite… d’un facteur 11.

Le principe de précaution à la rescousse

Face à ce décalage entre normes et réalité, certaines municipalités ont décidé de jouer la carte du principe de précaution. Pour elles, tant que les seuils européens ne tiennent pas compte des conserves, mieux vaut éviter d’exposer inutilement les enfants.

Elles n’ont pas tout à fait tort. Le mercure, et plus encore le méthylmercure qui s’accumule dans les chairs des gros poissons, est un neurotoxique puissant. Chez l’enfant, une exposition élevée ou prolongée peut affecter le développement du cerveau et du système nerveux, ralentir l’acquisition du langage, altérer la mémoire ou la motricité fine. Chez l’adulte, une consommation excessive et répétée peut aussi fragiliser le système cardiovasculaire ou les reins. 

Faut-il s’inquiéter dans nos cuisines ?

Soyons clairs : manger un pan bagnat ou une salade niçoise un dimanche d’été ne met personne en danger immédiat. Le mercure est un contaminant chronique : il s’accumule au fil du temps, surtout si l’on en consomme souvent. Les vrais risques concernent les enfants, les femmes enceintes et les gros consommateurs réguliers de thon.

Pour un adulte qui en mange de temps en temps, le risque reste faible. Mais pour un enfant qui en mange plusieurs fois par mois à la cantine, faire preuve de prudence peut se comprendre.

Ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain… ni le poisson avec la boîte

Attention toutefois à ne pas tomber dans l’excès inverse. Tous les poissons ne sont pas logés à la même enseigne. Beaucoup – sardines, maquereaux, saumons, truites – sont à la fois riches en oméga-3 et pauvres en contaminants et jouent un rôle essentiel dans notre équilibre alimentaire.

Ce n’est bien sûr pas parce qu’il y a potentiellement un problème avec le thon en conserve que toute la mer est à proscrire. Priver la population de poissons bénéfiques serait même une grave erreur sanitaire.
L’action des maires est un coup de projecteur politique qui peut pousser Bruxelles à revoir des normes manifestement insuffisantes. Le thon, comme beaucoup d’aliments, doit se consommer avec modération. Mais en attendant une éventuelle révision des règles, rien n’empêche de profiter d’un pan bagnat ou d’une salade niçoise, contrairement à la petite musique que l’on commence à entendre cette semaine.

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VIH ! Go Yeztugo !

Le lenacapavir, un traitement préventif révolutionnaire contre le VIH débarque en Europe sous le nom de Yeztugo. Développé par le laboratoire américain Gilead, il agit avec une efficacité impressionnante… malgré un prix encore prohibitif.

Approuvé le 26 août 2025 par la Commission européenne, après un avis favorable du Comité des médicaments à usage humain (CHMP) de l’Agence européenne des médicaments (EMA), ce traitement injectable change la donne dans la prévention du VIH. Il est le fruit du développement du Sunlenca, également fondé sur le lenacapavir. Un traitement contre le sida commercialisé depuis août 2022 en Europe. C’est un inhibiteur de capside, qui bloque la réplication du VIH en s’attaquant à sa coque protectrice. Les essais cliniques, lancés en 2022, ont démontré son efficacité en prévention.

Le lenacapavir est administré par injection sous-cutanée tous les six mois, une révolution par rapport aux pilules quotidiennes de la PrEP (prophylaxie pré-exposition) classique, comme le Truvada. Les essais ont montré une efficacité impressionnante : 100 % de protection chez 5 300 jeunes femmes en Afrique du Sud et en Ouganda, et 96 % chez des hommes.

Lors du premier essai clinique, aucune infection n’a été enregistrée parmi les participantes sous lenacapavir, contre 2 % dans le groupe sous PrEP orale. En Europe, où entre 20 et 30 000 nouveaux cas de séropositivité sont diagnostiqués chaque année, ce traitement serait capable de les réduire drastiquement, notamment chez les populations vulnérables et à risques. En France, où près de 6 000 cas annuels persistent, le lenacapavir pourrait combler les lacunes de la prévention actuelle.

Malgré son potentiel, le lenacapavir n’est pas parfait. L’administration nécessite une infrastructure médicale pour les injections, un défi dans les zones rurales. De plus, des effets secondaires comme des nausées ou des nodules au site d’injection ont été rapportés.

Mais le principal obstacle à sa diffusion réside dans son coût. Aux États-Unis, les injections coûtent 28 000 à 42 000 dollars par an, rendant le traitement inabordable pour beaucoup. Une étude de l’université de Liverpool estime qu’une version générique pourrait coûter 40 dollars par an avec une production massive. Et Gilead est critiqué pour restreindre ces types de licences, limitant l’accès dans les pays à faibles revenus. L’ONG Médecins Sans Frontières et l’ONUSIDA exigent des licences ouvertes via le Medicines Patent Pool pour démocratiser l’accès. En Europe, où les systèmes de santé publics pourraient absorber les coûts, l’inégalité d’accès reste une préoccupation, notamment pour les populations marginalisées. Mais malgré son coût et les freins à la production de génériques, le lenacapavir s’annonce comme une réelle révolution dans la prévention du VIH. Enfin…

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Ces croyances qui envoient la France dans le mur de la dette

« La France est trop importante, elle ne peut pas faire défaut », « la dette ne se rembourse pas », « il suffit de supprimer les 211 milliards d’aides aux entreprises »… Autant de clichés qui pourrissent le débat et empêchent de regarder la réalité des finances publiques françaises. Débunk.

La première chose qui vous est demandée lorsque vous rejoignez les Alcooliques Anonymes, c’est d’admettre votre problème avec l’alcool. Sans cet aveu, rien n’est possible. À maints égards, il en va de même concernant la réalité de la crise de la dette française : tant que le pays ne reconnaîtra pas qu’elle constitue un sérieux problème, nul salut n’est envisageable pour ses finances. Et l’illusion dangereuse dans laquelle nous vivons se perpétuera…

Car, de cette reconnaissance, nous sommes encore très éloignés. Notamment parce qu’il persiste au sujet de la dette un certain nombre de fausses croyances, abondamment entretenues par le personnel politique et certaines sphères militantes. Soit par manque de culture économique, soit par pur cynisme, parfois pour les deux raisons. Hélas, ces fantasmes délétères rendent impossible l’établissement d’un diagnostic lucide de la situation économique du pays. Si nous persistons à croire qu’il n’y a pas de problème, il est impossible d’y remédier.

Raison pour laquelle nous allons nous atteler à examiner un certain nombre de ces croyances et tenter de débusquer les mensonges qu’elles recèlent.

1 – « Il est impossible que les marchés financiers refusent de prêter à la France tant elle est importante dans la zone euro. »

Ou, dans le même ordre d’idée :

« La France ne peut pas faire défaut, comme ce fut le cas de la Grèce en 2012. »

Ici, la croyance – quelque peu prétentieuse – est dans la singularité d’une France capable de s’affranchir des lois de l’économie. Parce que nous sommes « un grand pays », « l’un des deux principaux moteurs de l’Europe », nous serions à l’abri de la faillite. C’est oublier que d’autres grandes nations, comme le Canada ou la Nouvelle-Zélande, ont connu de violentes crises de la dette auparavant. Mais aussi, plus près de nous, l’Italie, troisième économie de la zone euro, avec des marqueurs assez proches des nôtres au moment du désastre, en 2011*.

Si le défaut de paiement fut loin d’être atteint dans ces trois pays, et d’autres ayant connu des situations analogues, la potion qui leur a été infligée pour résoudre la crise fut extrêmement violente. Nous l’avons déjà montré à partir de plusieurs infographies – que nous reproduisons ici – rappelant les conséquences des mesures prises pour les fonctionnaires, les retraités, les salaires, l’emploi et les entreprises, dont nombre furent confrontées à la faillite.

*Italie 2011 : Dette publique : 116,5 % du PIB (France 113 %) – Déficit budgétaire 2011 : -3,7 % (France -5,7 % en 2024) – Croissance 2011 : +0,6 % (France prévision 2025 : +0,7 %) – Taux de chômage 2011 : 8,4 % (France 7,5 % et 8,5 % prévu en 2026) – Taux d’inflation 2,9 % (France entre 0,9 et 1,5 % selon les sources pour 2025).

Certes, la France est une économie clé de la zone euro. Mais les marchés financiers évaluent le risque sur la base de ratios comme la dette publique (113 % du PIB en 2024 selon l’INSEE) et le déficit budgétaire (5,8 % du PIB). Une dégradation de la solvabilité ou une perte de confiance, comme lors de la crise des dettes souveraines de 2010-2012, pourrait entraîner des hausses de taux d’intérêt (ce qui est déjà le cas) ou un rationnement du crédit, y compris pour la France.

Même si un « scénario à la grecque » est encore lointain, aucun État n’est immunisé contre un défaut souverain. Si la France bénéficie encore d’un large accès aux marchés et conserve le soutien de la Banque centrale européenne (BCE), la montée des taux (passés de 1,6 % pour les remboursements actuels à 3,4 %, voire 3,6 %), couplée à la crise des liquidités que nous connaissons, est franchement de mauvais augure. Et ce, de manière encore plus évidente au regard de l’incapacité du Parlement à s’accorder sur l’adoption d’un budget, dans un contexte d’instabilité politique et de fortes tensions sociales.

2 – « La dette n’aura aucun impact sur moi ! »

Encore raté ! Une crise de la dette a un impact sur tous les citoyens. Nous l’avons vu plus haut, en prenant les exemples du Canada, de la Nouvelle-Zélande et de l’Italie. Nous pourrions aussi évoquer la crise espagnole de 2012, même si celle-ci est autant liée à l’explosion de la bulle immobilière locale qu’à un dérapage des finances publiques. Elle a entraîné une explosion du chômage qui a touché 1 actif sur 4 et un jeune sur 2. Un prélèvement obligatoire de 2 % sur tous les salaires a été imposé pour financer les retraites. Quant aux fonctionnaires, ils ont perdu 8 % de leur pouvoir d’achat. Enfin, les 35 heures des fonctionnaires ont été jetées aux orties, voyant le temps de travail augmenter de deux heures et demie.

Concernant l’Italie, à partir de 2011, un dixième des emplois de la fonction publique a été sabré, tandis que le pouvoir d’achat des fonctionnaires a baissé de 10 % et celui des retraités de 5 %, tandis que l’âge de départ a été repoussé de 4 ans pour atteindre celui de 66.

Les fonctionnaires et les retraités ne sont pas les seuls touchés. Durant les crises financières suédoise de 1992 et canadienne de 1995, les entreprises ont été soumises à rude épreuve, les faillites s’étant accumulées de manière effrayante. Chemin que la France semble désormais emprunter depuis 2024, avec 66 422 dépôts de bilan, selon la BPCE, soit une hausse de 64,5 % par rapport à 2022 et de 18 % par rapport à 2023.

Certes, la dette publique française n’est pas la cause unique de ces faillites. Mais, couplée à l’incertitude politico-économique, elle aggrave les possibilités de financement par la limitation des aides publiques et la hausse des taux d’intérêt, faisant particulièrement souffrir les sociétés ayant contracté des prêts garantis par l’État (PGE), non encore remboursés lors de la pandémie de Covid. Chacun – particulier, entreprise, fonctionnaire – est donc bien impacté par une crise de la dette.

“La notation des agences n’a pas d’impact”, vraiment ?

J’approfondis

3 – « Cela fait 30 ans qu’on nous dit la même chose et regardez, nous sommes toujours en vie ! »

Ici, la croyance est le produit de ce qu’en psychologie on appelle le biais de normalité. Il consiste à nier ou minimiser des avertissements relatifs à un danger, donc à sous-estimer la probabilité d’une catastrophe. En suivant la logique d’un tel raisonnement, toute personne vivante peut se croire immortelle. On retrouve là le fameux « jusque-là tout va bien », popularisé par le film La Haine, faisant le récit des considérations d’un homme chutant d’un précipice sans avoir encore touché le sol.

Certes, la France est toujours « en vie », mais sa dette va progressivement lui coûter très cher, après une période pré-Covid où les taux étaient particulièrement avantageux. Par ailleurs, n’oublions pas que l’histoire progresse par paliers et que les facteurs de crise mettent longtemps à produire leurs effets. Mais lorsque le drame se présente, c’est de manière soudaine et brutale. Cela n’est pas sans rappeler la fameuse citation d’Hemingway : « Comment avez-vous fait faillite ? De deux façons. Progressivement, puis soudainement. » Or, si la France continue patiemment à courir à sa perte, sans changer de trajectoire, elle risque d’y parvenir brutalement.

Particulièrement dans un moment où la charge de la dette atteint un seuil très inquiétant (près de 70 milliards d’euros annuels prévus pour 2026) et ne cesse d’augmenter, tout comme les taux d’intérêt. Ceux de l’obligation française à 30 ans viennent d’ailleurs de franchir les 4,5 %, ce qui est très inquiétant et n’était pas arrivé depuis 2011, date de la crise de la zone euro.

4 – « Pas d’inquiétude, la dette ne se rembourse jamais ! »

Cette croyance, encore reprise dans une tribune publiée dans Le Monde il y a quelques jours, sous la plume d’économistes d’Attac et de la Fondation Copernic, est dangereuse, tant elle est couramment diffusée. Car si la dette totale semble effectivement se perpétuer sans être remboursée, ce n’est qu’une impression. Les États comme la France ne remboursent généralement pas le principal de leur dette de manière massive. Mais ils le font concernant les anciens emprunts arrivés à échéance et en contractent de nouveaux de manière continue.

Cette pratique est standard en économie publique, permettant de maintenir la liquidité sans choc budgétaire immédiat. Problème : plus les taux d’intérêt montent, plus ces échéances et les intérêts à rembourser obligatoirement augmentent. Tant que les taux restaient sous les 2 %, cela semblait soutenable. Mais avec la dynamique actuelle de remontée des taux, conjuguée à un montant de dette global sidérant, cela change la donne en profondeur et grève considérablement les finances publiques et les marges budgétaires.

En résumé : on rembourse les anciens emprunts à taux faible, mais on contracte les nouveaux à des taux plus élevés. Pire, cette situation peut conduire à l’introduction d’une spirale auto-réalisatrice si les marchés financiers perdent confiance, comme l’a illustré la crise italienne de 2011. À l’époque, l’Italie, avec une dette publique autour de 120 % du PIB et une croissance atone, a vu ses taux d’emprunt à 10 ans bondir à plus de 7 %, en raison d’une contagion depuis la Grèce, d’un déficit budgétaire persistant et d’une forte instabilité politique.

Pour la France, un tel épisode pourrait survenir si le ratio dette / PIB dépasse durablement 115 % (projeté à 116 % fin 2025), entraînant une hausse des spreads obligataires (différentiel avec l’Allemagne), qui obligerait l’État à pratiquer des ajustements brutaux. C’est ce que rappellent les avertissements de la Cour des comptes, soulignant notre vulnérabilité accrue aux chocs externes.

Seulement 3 % de déficit ? N’est-ce pas insignifiant ?

J’approfondis

5 – « La dette ne pèse pas sur les enfants, mais finance un patrimoine bénéfique. »

Cette autre croyance, figurant dans la tribune du Monde précitée, est séduisante, car la dette peut financer des actifs productifs. Mais, en réalité, elle sert surtout à couvrir des dépenses courantes. Elle ignore aussi les coûts d’opportunité : des intérêts élevés absorbent des fonds qui pourraient aller à l’éducation ou à la transition écologique.

Avec une durée moyenne de la dette de 8 à 9 ans, les remboursements futurs (via les impôts ou de nouvelles coupes budgétaires) affecteront bien les générations futures. Surtout, les prêts que nous contractons ne financent pas des investissements, mais des dépenses de fonctionnement. En 2023, le manque à gagner de notre système de retraite, évalué à 70 milliards, a ainsi représenté quasiment la moitié du déficit public.

6 – « Avec 211 milliards de cadeaux aux entreprises ces dernières années, on sait où trouver les économies budgétaires ! »

Problème : le chiffre de 211 milliards – soit trois fois le budget de l’Éducation nationale – régulièrement avancé est faux. Il inclut de nombreux financements qui ne vont pas aux entreprises privées ou dépendent de politiques vertueuses. Par exemple, les aides à l’audiovisuel public, aux affaires maritimes, à l’agriculture, aux territoires ultramarins ou aux emplois aidés. Mais aussi des subventions environnementales, et bien d’autres.

Ce chiffre provient d’un rapport du Sénat qui recense plus de 2 200 dispositifs en faveur des entreprises pour l’année 2023. Son montant diverge d’ailleurs d’autres évaluations officielles, comme celle du Haut-Commissariat au Plan, qui trouve 111,9 milliards en adoptant un périmètre plus précis.

Comme l’a expliqué Benjamin Dard dans Franc-Tireur, sans ces aides, « notre économie ne résisterait pas dans la compétition internationale. Depuis les années 1990, l’État tente d’amortir le coût du travail. Pas par idéologie néolibérale, mais parce que, pour financer un modèle social à part, les entreprises françaises ploient sous les charges. C’est même le pays où le coût du travail est le plus élevé, selon l’OCDE. […] Supprimez ce dopage et bon courage pour rester compétitif face à la Chine ou à l’Allemagne. »

Et pourtant, ces aides ne suffisent pas à « remédier aux déséquilibres mondiaux entre puissances », comme l’écrit un rapport de Rexecode (Centre de recherches pour l’expansion de l’économie et le développement des entreprises). D’autant que d’autres grandes nations utilisent les mêmes méthodes avec des montants variables : environ 202 milliards pour l’Allemagne, 181 milliards pour les États-Unis, 335 milliards pour la Chine, qui n’ont pourtant pas les mêmes contraintes liées aux cotisations sociales.

Il n’est donc pas question de cadeaux, mais de dispositifs indispensables pour limiter l’impact de notre modèle social par rapport à celui des autres grandes puissances. La suppression de ces aides viendrait immédiatement renchérir le coût de fonctionnement des entreprises bénéficiaires, ce qui aurait un impact négatif sur leurs résultats et réduirait leur contribution aux finances publiques.

Ainsi, en supprimant ces aides, l’État et les finances publiques seraient sans doute finalement perdants.

Conclusion

Tant que la question de la dette sera publiquement abordée sur le fondement de ces fausses croyances – et d’autres, voir encarts abonnés –, la France continuera à se rapprocher d’une crise majeure dont les remèdes pèseront lourdement sur le portefeuille de chacun de ses citoyens. Et cela, ni les institutions, ni les entreprises, ni les citoyens ne peuvent se le permettre.

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Sur les traces de la légende du canard d’or – chapitre final

Ah mes amis, quelle joie ! Enfin je le retrouve… mon canard d’or.
@JohnGirondins et @TerreTerre13 avaient donc raison… Tanger était la clef. Sans eux je n’y serais jamais arrivé, tant cette énigme était tortueuse.

Bonnes résolutions

Trouver tous les mots n’a pas été facile. Comme l’a remarqué @TerreTerre13, certains titres avaient été manifestement changés par Antoine au moment de la publication.

C’est ainsi que dans le premier épisode, “Sur les traces du canard d’or”, une référence évidente à l’énigme de la chouette d’or,  est devenu : “Sur les traces de la légende du canard d’or”.

Le sous-titre “Nager dans les rhododendrons” est évidemment un leurre : je pense que c’était juste un moyen de comprendre que certains titres un peu bizarroïdes ou alambiqués devaient nous alerter.

Par exemple, dans l’intro du dossier bio, pourquoi titrer “Le bio selon les faits : miracle ou mirage ?” plutôt que simplement “Bio : miracle ou mirage” , sinon pour rajouter “selon” (ou “faits”, mais qui ne rentrait pas dans la grille). C’est ainsi que nos deux limiers ont identifié : 

  • Chapitre I :
    • “Trofim Lyssenko, jardinier et idéologue redouté” 
  • Chapitre II : Bouillie bordelaise : une image de naturel vraiment fondée ?
  • Chapitre III :
    • Pyréthrine : la veuve aux chrysanthèmes
  • Chapitre IV :
    • Biocoop : fils de pub
    • Cancers : peur sur la métropole
  • Chapitre V : Centipède RTK : un colosse guidé au centimètre près
  • Conclusion : Sri Lanka, le 100% bio par chaos

Sauf que “fils” ne rentrait pas vraiment bien dans la grille, alors que si on le remplaçait par “enfant”, il trouvait parfaitement sa place. Erreur d’Antoine qui s’est emmêlé dans les méandres de son énigme, ou machiavélisme ultime ? On ne le saura jamais je pense, car il joue les mystérieux chaque fois que je lui pose la question…

Bref, ça fait 9. Et il en fallait 11. Et c’est là que les chiffres interviennent.

5 + 2 + 2 + 1 + 1 = 11 comme les 11 mots de la grille. On a déjà 5 noms communs, 2 prépositions, 1 participe passé et 1 adjectif… Reste 2… autre chose.

Rappelez-vous, Antoine, dans son infinie bonté, nous avait laissé 2 indices dans la toute première image d’illustration.

Le sanglier, allusion au sanglier d’Érymanthe, l’un des 12 travaux d’Hercule comme dans ce sous titre du Chapitre I : “Les défis du XXIème siècle : les travaux d’Hercule de l’agriculture”.

Et ce symbole étrange, gravé sur l’arbre… Un triangle inversé barré d’une ligne horizontale… Le symbole alchimique de la Terre (merci ChatGPT) ! Terre + nom propre (comme Hercule) égale… égale… Gaia ! Bingo ! Gaia qu’on retrouve dans le titre de cet encart du chapitre III : “L’appel de Gaïa”…

Cette fois notre grille est complète :

Et voilà “Promontoire” qui apparaît en vertical.

Mais attention, comme 20 = 11 + 5 + 3 + 1(Et), ça veut dire que Promontoire ne fait pas partie du texte de l’énigme, et qu’il devra être utilisé dans un deuxième temps. Et si l’on se fie à la logique des chiffres, ça veut dire qu’il faut rajouter 5 quelque chose (articles ?) + 3 autre chose pour reconstituer l’énigme…

Et après moult tâtonnements :
“Selon la légende, la métropole fondée par l’enfant d’Hercule et de la veuve du redouté colosse de Gaïa”. 
Tanger !

Cap sur Tanger

Car dans la légende, Tingis (ou Tinjis) est la veuve d’Antée, le colosse fils de Gaïa (la Terre) et de Poséidon.
Après qu’Hercule a tué Antée lors d’un de ses travaux, il s’unit à Tingis. De leur union naît Sufax, qui, selon la tradition, fonde la ville de Tingis — l’actuelle Tanger.

Donc :

  • Le redouté colosse de Gaïa → Antée
  • La veuve du colosse → Tingis
  • L’enfant d’Hercule et de la veuve → Sufax
  • La métropole fondée → Tingis / Tanger

Vous connaissez Tanger ? Carrefour stratégique, convoitée par Phéniciens, Romains, Arabes et Européens, elle fut tour à tour comptoir commercial, place forte et zone internationale. Tanger, ville cosmopolite, qui vit naître Jean-Luc Mélench… (mais je m’égare).

Tanger, qui veille sur le détroit de Gibraltar depuis plus de deux mille ans. Et justement, le Cap Spartel est le promontoire mythique lié à sa fondation. C’est là que l’Atlantique rencontre la Méditerranée, entre brumes, courants contraires et légendes anciennes. À deux pas des grottes d’Hercule, où le héros aurait trouvé refuge avant de s’emparer des pommes d’or offertes par Zeus à Héra… et volées par les Hespérides. Pomme d’or / Canard d’or… Cap Spartel… C’était donc bien ça,  chef Antoine…

Le cobra de diamant

Le passage de la douane n’a pas été facile, mais je suis sur le chemin du retour, berçant mon canard d’or chéri que j’ai cru perdu à tout à jamais et que je n’aurais jamais retrouvé sans vous.

Car comme me l’a confié @TerreTerre13 : “J’ai un peu l’habitude des énigmes et tout, mais là franchement c’était hardcore ^^…”

Ah, au fait…

Au cours de mes recherches tous azimuts, je suis tombée par hasard au Bhoutan sur un cobra en diamant, avec de magnifiques yeux rouges en rubis… Je crois bien qu’un jour ou l’autre, je vais le cacher à mon tour. @JohnGirondins a déjà promis de m’aider à concocter une énigme encore plus tordue que celle-là.

On va voir, Antoine, si « Impossible n’est pas Électrons”… vraiment.

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Le bio des légendes

Parvenus au terme de ce dossier, force est de constater que l’agriculture biologique ne tient pas ses promesses, malgré certains bénéfices pour les sols et la biodiversité. Ses faibles rendements en font, hors exceptions comme le maraîchage ou la viticulture, un modèle écologiquement moins performant par kilo produit, et plus exigeant en surface agricole. Les produits bio coûtent 20 à 80 % plus cher, sans bénéfice avéré pour la santé, un surcoût qui aggrave les inégalités alimentaires. Le bio devient alors un marqueur social, bien plus qu’un levier de transformation agricole.

La proposition de valeur du bio : au libre choix du consommateur

Sa proposition de valeur devrait relever du libre choix du consommateur, non d’un choix de politique publique. Mais l’écosystème militant et ses relais institutionnels polluent le débat, au bénéfice des distributeurs. Ni les producteurs, ni les consommateurs n’y trouvent réellement leur compte.

Le bio comme LE modèle à suivre pour la transition écologique  : une impasse

Mais le  principal problème est que l’agriculture biologique, de niche, est désormais promue comme le modèle à généraliser.

Or, rien, de notre analyse, ne saurait justifier la position hégémonique que ses promoteurs, parfois à grand renfort de désinformation, veulent lui conférer dans la transition écologique. Au contraire, l’histoire est jalonnée de catastrophes, voire de tragédies, par l’imposition idéologique de modèles exempts de toute rationalité scientifique. Le réel s’est chargé de rappeler aux apprentis sorciers, et malheureusement à leur population, qu’on ne joue pas impunément avec les besoins fondamentaux de l’être humain.

Sri Lanka : le chaos 100% bio

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Nombre d’agriculteurs se sont pourtant engagés dans la démarche avec sincérité, séduits par la promesse d’une montée en gamme et l’espoir de changer le monde. Aujourd’hui, la désillusion est réelle.

Le bio a certes contribué à une prise de conscience de certains excès de l’agriculture productiviste, et, prises isolément, certaines de ses pratiques sont intéressantes. Mais corseté dans un cahier des charges rigide et partiellement idéologique, il reste une solution du XIXᵉ siècle à des problèmes du XXIᵉ.

À l’heure de l’édition génomique, de l’agriculture de précision et de l’intelligence artificielle appliquée aux cultures, aux sols et aux intrants, l’agriculture biologique semble de plus en plus en décalage avec les leviers de progrès qui s’offrent à nous. Ce fossé pourrait accentuer les crispations idéologiques autour d’un modèle qui, refusant d’évoluer, se replie sur le dénigrement de la concurrence et le marketing de la peur — comme en témoignent les débats récents autour de la loi Duplomb.

Il est temps de sortir du monopole moral du bio pour ouvrir un débat rationnel, orienté vers des solutions concrètes aux défis du XXIᵉ siècle : produire plus efficacement, sur moins de surface, pour nourrir tout le monde, mieux, tout en limitant notre empreinte environnementale. Y répondre ne passera pas par un modèle unique, mais par un bouquet d’innovations technologiques et de pratiques agronomiques adaptées — dont certaines, oui, héritées du passé.

Vive l’agriculture bio-techno-logique.

Tout l’été, nous avons publié ici gratuitement les bonnes feuilles de notre livre, « Trop bio pour être vrai ? ». Pour le lire en intégralité, c’est par là :

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Petite Banane, grand potentiel

Déjà une révolution ?
Si elle n’a pas encore eu son « moment Ghibli », Nano Banana, la nouvelle IA de génération d’image de Google, confirme ce que l’on pressentait : bientôt, l’industrie et les arts graphiques ne seront plus jamais comme avant.

Dans ce domaine, l’IA fait des merveilles depuis longtemps déjà. Mais il lui manquait une chose fondamentale pour s’imposer dans toutes les situations : la cohérence. Créer plusieurs scènes avec exactement le même personnage ou modifier un détail sans altérer le reste était encore complexe, à moins de passer par des outils spécifiques comme l’excellent créateur — français — d’avatars Scenario.

Nano Banana, la nouvelle IA d’image développée par Google, change tout cela. Avec elle, ces barrières tombent : il devient possible d’appliquer un style à un objet sans le dénaturer.

Changer les vêtements d’un personnage sans rien trahir de ses traits ou de son expression devient un jeu d’enfant.

Le maquillage, l’environnement, l’angle de vue, la posture du mannequin… tout peut être ajusté. On imagine, à terme, le bouleversement radical que cela peut entraîner dans le monde du shooting photo et de la production visuelle.

À côté de ces fonctionnalités, l’application de styles (ici Hayao Miyazaki, Frank Miller et Moebius) semble anecdotique.

Le changement de point de vue l’est moins. Imaginez filmer une scène caméra à l’épaule et simuler un drone pour intégrer des plans de coupe…

Ensemble, les deux fonctionnalités donnent des résultats étonnants.

Pour l’aménagement intérieur, Nano Banana permet de proposer instantanément différentes tendances, ou même de tester le mobilier choisi par un client en conditions « réelles ».

L’outil ouvre aussi la voie à la restauration massive des images du passé. Ici, le film des frères Lumière, L’Arrivée d’un train en gare de La Ciotat.

Si certains graphistes ou illustrateurs résistent encore à ces outils, il est difficile d’imaginer qu’ils puissent longtemps conserver cette posture, tant la productivité va s’en trouver décuplée et leur vie facilitée.

Chaque nouvelle avancée démocratise un peu plus la création. Avec Nano Banana et Veo3, le générateur de vidéo de Google, il est déjà possible de réaliser un court-métrage depuis sa chambre, avec des moyens financiers dérisoires. La seule véritable frontière, désormais, n’est plus technique ni économique : c’est celle de notre imagination.

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Lycée : les sciences au dernier rang

Plutôt S, ES ou L ? À la veille de la rentrée, souvenez-vous de ces séries qui ont marqué toute une génération. Du passé, désormais. Car la réforme Blanquer, effective depuis 2020, a bouleversé le lycée général. Modernisation nécessaire d’un système archaïque, ou nouvelle usine à gaz made in Éducation nationale ?

La seconde : une porte d’entrée préservée

En classe de seconde, peu de choses ont changé. Les élèves suivent toujours plus ou moins les mêmes matières, avec quelques options facultatives. La répartition horaire reste équilibrée, avec environ un tiers du temps consacré aux matières scientifiques « classiques » (maths, SVT, physique-chimie), un peu plus si l’on inclut les sciences numériques et technologiques (SNT), nouvelles venues dans le tronc commun. On pourrait juste regretter la faible place offerte aux sciences du vivant, reléguées en fond de grille depuis quelques décennies, alors que leurs enjeux (écologie, réchauffement climatique, agriculture, vaccination…) sont centraux dans le débat public.

À l’issue de la seconde, les élèves se répartissent entre le lycée technologique, peu chamboulé par la réforme, et le lycée général, qui accueille environ deux tiers des élèves.

Première et terminale générale : un casse-tête organisationnel

C’est là que la réforme change vraiment la donne. Fini les séries : désormais, un tronc commun assure un socle de culture générale (environ la moitié de l’emploi du temps), tandis que les élèves choisissent trois spécialités en première (4 h chacune), dont ils ne gardent que deux en terminale (6 h chacune).

Simple, vraiment ? En apparence peut-être. Car derrière cette façade se cache un véritable cauchemar organisationnel. En permettant d’innombrables combinaisons de spécialités, la réforme a dynamité les groupes-classes. Concrètement, on compose les classes autour du tronc commun, puis les élèves sont éclatés dans différents groupes pour leurs spécialités — soit 12 heures par semaine.

À l’arrivée, l’entraide entre élèves en prend un coup et les emplois du temps virent au casse-tête. Car il faut caler les spécialités au même moment de la semaine pour tout le monde, en plus de jongler avec les options, les groupes de langues et les dédoublements… Résultat : des emplois du temps individualisés, donc verrouillés à l’extrême. Déplacer une heure, organiser du soutien, programmer un devoir commun ? Mission quasi impossible.

Cerise sur le gâteau : on se retrouve avec des emplois du temps en gruyère, qui sapent l’efficacité et compliquent la vie de tous — des élèves comme des profs.

Et ce n’est pas tout. Le suivi des élèves prend aussi du plomb dans l’aile. Les professeurs de spécialité, éclatés sur plusieurs classes, ne peuvent tout simplement pas assister à tous les conseils. Résultat : certains sont clairsemés, privés bien souvent… des enseignants des matières principales. Quant aux professeurs principaux, forcément issus du tronc commun, ils disposent de trop peu d’heures avec leurs élèves pour réellement bien les connaître.

Plus de choix… mais moins de marge de manœuvre

Du côté des élèves, le constat est tout aussi négatif. Désormais, tout se joue en seconde. Le choix des spécialités, déterminant pour le traitement des vœux sur Parcoursup, conditionne l’orientation post-bac. Avant la réforme, au temps des séries, il suffisait de se situer globalement dans un profil ; aujourd’hui, dès leur première année de lycée, les jeunes doivent faire un choix crucial pour leur avenir, souvent sans avoir la moindre idée de leur projet et sans nécessairement disposer de la maturité requise.

Ainsi, paradoxalement, la prétendue flexibilité se mue en spécialisation imposée, aggravée par la suppression de la troisième spécialité en terminale. Au final, on retrouve des élèves piégés dans leurs choix. Une fois embarqués, nul retour en arrière possible : de la première au bac, le parcours est verrouillé. Et les lycéens le confirment eux-mêmes : ce système ne fait que leur ajouter du stress, ce qui est parfaitement compréhensible.

Et les sciences, dans tout ça ?

Les sciences paient un lourd tribut. Dans le tronc commun, leur enseignement est marginalisé avec seulement 2 heures par semaine, soit deux fois moins que le français ou les langues vivantes. Les programmes, souvent déconcertants, peinent à transmettre une véritable culture scientifique (cf. encart). Maigre compensation : depuis la rentrée 2023, les maths ont fait leur retour dans le tronc commun pour les élèves n’ayant pas opté pour la spécialité… mais seulement à raison d’1 h 30 par semaine, et uniquement en première.

Du côté des spécialités scientifiques, la situation est aussi préoccupante. Pendant des décennies, la série S jouissait d’une image flatteuse. Réputée exigeante, elle imposait moins de spécialisation que les autres séries en conservant la majorité des matières. Il était clair qu’avec un bac S en poche, toutes les portes post-bac étaient ouvertes. Cette filière aimantait ainsi naturellement les élèves indécis, souvent parmi les plus sérieux

L’enseignement scientifique sacrifié sur l’autel de la modernité

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Casser cette hégémonie pouvait sembler un objectif légitime de la réforme. Mais le prix payé est lourd, car les filières scientifiques en sortent fragilisées. La liberté de choix des spécialités a mis les matières en concurrence et, dans ce contexte, les disciplines scientifiques, parfois jugées trop difficiles ou trop calculatoires, séduisent moins. Si, avant la réforme, plus de la moitié des lycéens choisissaient la série S, aujourd’hui, à peine un tiers conserve deux spécialités scientifiques en terminale, un net décrochage au profit des autres matières.

On pourrait tenter de relativiser ces problèmes en supposant que cette évolution corrige simplement l’anomalie qui attirait dans la série S des élèves peu scientifiques. Mais là où les choses se compliquent, c’est que ces tendances se répercutent sur le supérieur : comme le souligne le collectif « Maths&Sciences » dans une tribune du Monde en 2024, les effectifs en première année d’école d’ingénieur, qui étaient en hausse constante depuis les années 2000, diminuent depuis la réforme (cf. figure).

Un constat inquiétant alors que les besoins dans les métiers exigeant un haut niveau de compétences scientifiques et technologiques continuent de croître.

Des spécialités inséparables

Dernier point délicat : la liberté de choix des spécialités se heurte à l’interdépendance des matières scientifiques. La physique-chimie exige des bases solides en maths, tandis que les SVT reposent souvent sur ces deux matières. Conséquence : un élève ayant jeté son dévolu sur la physique-chimie, mais non les maths, rencontrera rapidement des difficultés. De plus, de nombreuses filières post-bac, notamment celles axées sur les sciences du vivant, requièrent un niveau correct dans les trois disciplines scientifiques. Or, en terminale, les élèves ne conservent que deux spécialités. L’option « maths complémentaires » (qui avait été créée pour pallier ce problème) ne suffit pas toujours, et beaucoup en viennent à abandonner les SVT en terminale pour se tourner vers médecine ou STAPS, filières qui, paradoxalement, dépendent majoritairement de cette matière.

La complexe simplification du bac

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Repenser le lycée pour plus d’efficacité

La réforme Blanquer a voulu moderniser le lycée et offrir plus de liberté aux élèves. Mais dans les faits, cette flexibilité crée du stress, complique l’organisation et fragilise l’enseignement des sciences. Une fois encore, le mieux s’est révélé l’ennemi du bien. En voulant abolir le carcan des séries, on a instauré un système qui ne satisfait personne.

Le véritable progrès pourrait finalement passer par un retour à plus de simplicité, quitte à réduire la liberté de choix. Un véritable « choc de simplification » permettrait de clarifier le fonctionnement du lycée, d’en accroître l’efficacité et de redonner aux sciences la place qu’elles méritent.

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Peur sur la dette

En France, le mois de septembre s’annonce comme celui de tous les dangers. L’incapacité du Parlement à voter le budget 2026, la menace d’une chute du gouvernement Bayrou, la perspective de troubles avec le mouvement « Bloquons tout » du 10 septembre et la montée des tensions sur les marchés financiers risquent de mettre le feu aux poudres à la rentrée. Des événements qui placent la dette française au cœur des débats. Mais de quoi parle-t-on quand on évoque cette « dette » ? Pourquoi fait-elle peur ? Est-il possible d’éviter une crise ?

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Sur les traces de la légende du canard d’or – Épisode III

Ah mes amis, quelle semaine !
J’étais déjà en train de préparer mes banderoles pour la manif du 10 septembre quand… percée décisive. Je sens Antoine fébrile : visiblement son énigme ne tient plus qu’à un fil. Je suis sur la piste !

Tout ça grâce à @TerreTerre13 et @JohnGirondins (j’ai subtilisé deux codes d’abonnement Quark dans le tiroir du chef pour eux).

@JohnGirondins est un redoutable chasseur d’énigmes. Il a d’abord trouvé que 5 + 2 + 2 + 1 + 1 = 11 comme les 11 mots de la grille. Bon, dit comme ça, ça a l’air évident… mais depuis, on se creuse la tête pour comprendre ce que ces nombres signifient vraiment… Je pense que ça ne doit pas être si compliqué que ça.

Et moi j’ai remarqué que 20 = 11 + 5 + 3 + « Et ». Donc peut-être que l’énigme complète fait 20 mots. C’est plausible.

Ensuite, il dit qu’il a réussi à trouver le mot de 11 lettres vertical, en faisant l’hypothèse que la première était un P. Je ne sais toujours pas par quel miracle il a trouvé ça…

Quant à @TerreTerre13, il a remarqué certains changements dans les titres et sous-titres par rapport au livre.

@JohnGirondins lui, il a trouvé un mot qui N’A PAS CHANGÉ.

Un mot qui paraît presque un peu décalé dans le contexte, comme dans “nager dans les rhododendrons”. Et là, j’ai eu un flash : dans la première image diffusée par Antoine, il y avait un sanglier. Le sanglier d’Érymanthe ! Un des douze travaux d’Hercule.

Je sens qu’on chauffe.

J’allais dire que c’est un peu taquin, Antoine, de glisser dans ton énigme des mots qui n’ont pas changé… mais si tu as disséminé d’autres indices du même genre, OK, c’est fair play.

En tout cas, le sanglier d’Érymanthe, c’est plus crédible que les sangliers radioactifs de la forêt bavaroise de Grok !

D’ailleurs, je sens que dans l’article de cette semaine, le mot est facile à trouver, avec ou sans le livre…

Pas vrai, @TerreTerre13 ?
On touche au but, les amis.

Encore un dernier effort.

On va la craquer, cette énigme.
« Impossible n’est pas Électrons ! »

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Le bio qui cache la forêt

Agriculture de conservation des sols, agriculture de précision, agroforesterie… tous ces noms ne vous disent peut-être rien. Et c’est normal, tant l’agriculture biologique monopolise la lumière dans le débat public. Elle représenterait le seul modèle agricole « acceptable », celui qu’il faudrait généraliser pour sauver la planète. Et pourtant.

On l’a vu, le bio est loin d’être la solution miracle sur le plan environnemental. En cause notamment : ses rendements plus faibles, qui nécessitent, à production constante, d’occuper plus de terres. Ce qui n’est pas franchement une bonne nouvelle pour les écosystèmes naturels.

Alors une question s’impose : n’existe-t-il pas d’autres voies, capables de concilier production agricole et performance écologique ?

L’intensification écologique, ou comment sortir des vieux débats

Longtemps, deux modèles agricoles se sont affrontés. D’un côté, l’agriculture intensive : des rendements élevés, donc une emprise au sol plus faible, mais des impacts importants sur les parcelles cultivées. C’est le modèle du land sparing, ou « séparation des usages ». De l’autre, une agriculture extensive, souvent bio, qui mobilise plus de surface à cause de rendements plus faibles, mais où les pratiques sont plus favorables à la biodiversité sur les parcelles. C’est le land sharing, ou « partage des usages ».

Mais depuis quelques années, ce vieux débat pourrait bien être dépassé par une troisième voie : l’intensification écologique. L’intensification écologique, c’est un peu vouloir le beurre et l’argent du beurre. Il s’agit d’un concept qui fait le pari de préserver les rendements tout en améliorant l’impact environnemental des pratiques agricoles. Cette voie, qui fait de plus en plus consensus dans la littérature scientifique (notamment dans le rapport de l’IPBES), pourrait bien ringardiser l’agriculture bio, pas assez productive.

Mais concrètement, quels sont les leviers de cette intensification écologique ?

On remet le couvert (végétal), et on fait tourner…

Premier levier : la gestion de l’assolement. En diversifiant les cultures dans le temps et dans l’espace, on casse les cycles des ravageurs, on limite les maladies, on réduit les adventices (mauvaises herbes, etc.)… et donc l’usage de produits phytosanitaires. Allonger les rotations, c’est donc bon pour le sol, bon pour la biodiversité et bon pour la productivité.

Autre outil : les cultures intermédiaires, ou « couverts végétaux ». Semées entre deux cultures principales, elles protègent les sols de l’érosion, améliorent leur structure et captent l’azote résiduel. Certaines seront détruites pour enrichir le sol, d’autres récoltées : ce sont alors des « cultures dérobées », qui augmentent l’efficience des terres sans les épuiser.

Des plantes plus robustes

Autre levier clé : l’amélioration variétale. Depuis toujours, les agriculteurs sélectionnent les meilleures plantes. Mais les outils ont changé : aujourd’hui, les biotechnologies permettent d’aller plus vite et plus loin pour effectuer ce choix de manière judicieuse.

La transgenèse, d’abord. Elle autorise l’introduction de gènes d’intérêt dans une plante donnée. Plus récemment, l’édition génomique (type CRISPR-Cas9) permet de modifier de manière ciblée un gène existant, sans introduction d’ADN étranger. Ces techniques pourraient s’avérer décisives dans la transition agroécologique… mais elles sont interdites en agriculture biologique.

Les NGT, kryptonite du bio ?

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Moins de labour, plus de vie

Troisième levier : les techniques culturales simplifiées (TCS). Le principe : réduire le travail du sol pour préserver sa biodiversité. Moins de labour, c’est plus de vers de terre, plus de microfaune et plus de stockage de carbone.

Dans certains cas, on peut même semer directement, sans aucun travail du sol préalable : c’est le semis direct. Mais attention : sans herbicides, ces techniques favorisent la prolifération des adventices – autrement dit, les mauvaises herbes – ce qui entraîne des pertes de rendement. C’est pourquoi le sans-labour est difficilement compatible avec les contraintes du bio.

Désherbage : l’IA, à la rescousse

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Et ce n’est pas fini

D’autres leviers existent. L’agriculture de précision, par exemple, permet d’ajuster très finement les doses d’intrants (eau, engrais, phytos…) aux besoins réels des plantes. Une stratégie qui peut encore gagner en efficacité grâce aux capteurs, aux satellites ou à l’intelligence artificielle… à condition, bien sûr, de ne pas rejeter en bloc les nouvelles technologies !

Un colosse guidé au centimètre près

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L’agroforesterie, elle, consiste à introduire des arbres dans ou autour des champs. Peu pénalisante pour les rendements, elle offre des refuges pour la biodiversité, améliore les sols, réduit l’évaporation… et stocke du carbone.

Quels labels pour ces pratiques ?

Soyons clairs : aucune de ces pratiques ne figure au cahier des charges de l’agriculture biologique. Mais il existe deux autres labels, moins connus, qui leur sont associés.

D’abord, l’agriculture de conservation des sols (ACS), fondée sur trois principes : allongement des rotations, couverture végétale permanente et non-labour. Depuis peu, elle est valorisée par le label « Au cœur des sols ». Résultat : une biodiversité du sol aussi bonne, voire meilleure, qu’en bio. Un meilleur bilan carbone. Et une perte de rendement limitée (entre -5 et -10 % environ), bien inférieure à celle observée en AB. En revanche, ce modèle est difficilement compatible avec le cahier des charges bio à cause de sa dépendance aux herbicides.

Ensuite, le label HVE (Haute Valeur Environnementale), fondé sur plusieurs critères classés selon 4 axes : biodiversité, gestion des phytos, fertilisation et eau. Plus souple, il permet de valoriser des stratégies variées. Certaines exploitations cumulent d’ailleurs HVE et AB. Mais le label est régulièrement critiqué par une partie du secteur bio, ainsi que par la Confédération paysanne, pour son manque d’exigence. Des critiques qui semblent également motivées par le succès croissant du label, qui commence à marcher sur les plates-bandes du bio.

Le label HVE : vrai progrès ou greenwashing ?

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En conclusion…

Des alternatives crédibles au modèle bio existent. Mieux encore : certaines d’entre elles obtiennent de meilleurs résultats environnementaux, pour des pertes de rendement moindres. Pourquoi sont-elles si peu connues ? Sans doute parce que le débat public tourne en boucle autour de l’agriculture biologique, parfois érigée en solution unique. Un sérieux facteur de risque. Car, à force de mettre tous les projecteurs sur le bio, on finit par invisibiliser d’autres modèles tout aussi, voire plus, vertueux – mais incompatibles avec son cahier des charges.

Ce n’est pas seulement injuste. C’est contre-productif.

Tout l’été, nous publions ici gratuitement les bonnes feuilles de notre livre, « Trop bio pour être vrai ? ». Pour le lire en intégralité, c’est par là :

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Dernier épisode la semaine prochaine avec la conclusion : Le bio des légendes

Épisode précédent : Lobby et marchands de (ci)trouilles bio 

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Les fantômes de la 5e colonne

« On a signé pour fabriquer des voitures, pas des armes. »
Cette semaine, la CGT et FO ont relayé le refus de certains salariés de Renault d’assembler des drones militaires destinés à l’Ukraine. Une réticence qui ravive de vieux démons : en 1939-40 déjà, le PCF freinait — et parfois sabotait — la production d’armes françaises, au nom de sa fidélité à Moscou.

22 Juin 1940, 5h45. Aux premières lueurs de l’aube, quatre Français, dont trois communistes, sont fusillés sur le champ de tir de Pessac (Gironde). Quelques heures plus tard, après six semaines de guerre éclair, la France signe l’armistice avec l’Allemagne nazie.

Parmi les condamnés, un espion, Jean Amourelle. Secrétaire sténographe au Sénat, « membre important et influent du parti socialiste » proche de Léon Blum, il aurait vendu à l’Allemagne les comptes rendus de la commission de l’armée de la Haute-Assemblée. Quelques mois plus tôt, il tente de lancer un hebdomadaire, La Carmagnole, destiné à propager l’antimilitarisme et à organiser des grèves, au moment même où la France réquisitionne ses usines pour préparer la guerre. Pour le financer, il n’hésite pas à contacter Berlin et reçoit pas moins de 400 000 francs de la part des services secrets nazis. Il est condamné à mort pour « intelligence avec l’ennemi » et pour avoir voulu créer « un journal antifrançais prônant la révolution et le sabotage de la défense nationale ».

À ses côtés, deux frères, Roger et Marcel Rambaud, et un ami, Léon Lebeau. Roger, ajusteur aux usines d’aviation Farman de Boulogne-Billancourt, est reconnu coupable de sabotage : il a sectionné un petit fil de laiton qui sécurise l’arrivée d’essence des moteurs, provoquant l’explosion des appareils en plein vol. Marcel et Léon, militaires, lui ont soufflé ce mode opératoire. Dans les affaires de Roger, on retrouve un tract recopié de sa main :
« Courage on les aura ! Confiance camarade, le parti communiste vivra toujours. Pas de canon, pas d’avion et la guerre finira. Paix immédiate.
Le Parti communiste français »

Tous les quatre essuient la salve des 24 fusils du peloton, avant d’être achevés d’une balle de revolver par un sous-officier.

Quelques jours plus tard, cinq autres détenus accusés d’espionnage doivent subir le même sort. Mais en pleine débâcle française, leur transfert précipité de Bordeaux vers le camp de Gurs, plus au sud, ne se déroule pas comme prévu. Lors d’un arrêt en gare d’Orthez, les cinq condamnés interpellent un groupe de soldats de la Wehrmacht stationné sur le quai. Le bataillon allemand, armes à la main, obtient leur libération immédiate – en 40, les communistes sont encore leurs alliés.

Fidèles au pacte

Un an plus tôt, dans la nuit du 23 au 24 août 1939, le pacte germano-soviétique est signé à Moscou, avec une clause secrète qui définit le partage de l’Europe de l’Est entre l’Allemagne nazie et l’Union soviétique. Une semaine plus tard, l’armée allemande envahit la Pologne, décidant la France à déclarer la guerre à son belliqueux voisin. C’est le début de la « drôle de guerre », pendant laquelle les Alliés, attentistes, restent sur la défensive derrière la ligne Maginot, le temps de rassembler leurs forces. Le 17 septembre, l’URSS attaque elle aussi, par l’Est, son voisin polonais. Les autorités françaises interdisent quasi immédiatement le Parti communiste français, ses organisations satellites et ses organes de presse, notamment L’Humanité.

Car depuis une quinzaine d’années, le parti et son journal sont à la tête d’un véritable réseau d’espionnage au service de l’Union soviétique. Dès 1927, L’Humanité appelle chaque ouvrier à devenir un informateur, « non pas pour de l’argent, mais pour la révolution ». Les usines d’armement françaises sont les premières ciblées, et les renseignements ainsi collectés alimentent régulièrement Moscou.

Le 27 octobre 1939, l’austère général Héring, gouverneur militaire de Paris, adresse au président du Conseil, Édouard Daladier, un « rapport sur l’activité des milieux défaitistes et, plus particulièrement, communistes » : « le PCF, après avoir réclamé la guerre à tout prix, réclame maintenant la paix immédiate, la cessation des hostilités ». Le pacte a instantanément changé la ligne du parti : ennemis jurés d’hier, les nazis sont devenus tout à fait fréquentables.

Mais ce n’est qu’un début. Peu de temps après, l’état-major fait état d’actes de sabotage par des communistes travaillant dans les manufactures d’armement de la région parisienne.

Saboter pour Staline

Dans les usines, la rhétorique antimilitariste se diffuse rapidement. Fin novembre, un rapport classé « secret » signale que la Société industrielle pour l’aviation (SIPA) subit la propagande communiste « sur une grande échelle, depuis le dernier des manœuvres jusqu’aux chefs d’équipes ». Il dénonce un freinage de la production et du sabotage dans leur usine d’Asnières. Plusieurs pièces du Lioré et Olivier LeO 45, un bombardier parmi les plus modernes de l’armée de l’air française, sont refusées pour malfaçon.

Les trotskystes, dont les organisations ont elles aussi été dissoutes en 1939, appellent au défaitisme révolutionnaire et distribuent des tracts dans les usines, dans les gares et dans les armées.

Au même moment, l’URSS envahit la Finlande. Staline veut sécuriser Leningrad (aujourd’hui Saint-Pétersbourg), située à seulement 30 km de la frontière finlandaise et, pour cela, récupérer une partie de la Carélie et quelques îles stratégiques. Il imagine une victoire rapide, mais les Finlandais résistent héroïquement.

Daladier promet des armes pour aider le petit État nordique. Quelques jours plus tard, Jacques Duclos, l’un des dirigeants clandestins du PCF, écrit ces mots terribles à Benoît Frachon, futur secrétaire général de la CGT : « Le moment est venu pour nous d’orienter les ouvriers vers le sabotage des fabrications de guerre destinées à la Finlande et d’attirer leur attention sur l’utilisation antisoviétique du matériel de guerre fabriqué en France ».

Rapidement, deux tracts exhortent les ouvriers à tout mettre en œuvre pour « retarder, empêcher, rendre inutilisables les fabrications de guerre (…) destinées à combattre l’Armée rouge ». Ils veulent « rendre impossible l’envoi d’avions, de canons, de mitrailleuses et de munitions (…) aux ennemis de l’Union soviétique ». Dans les vestiaires des usines, les militants dénoncent une guerre « impérialiste » et placent les tracts directement dans les poches.

En février 1940, Pierre Lambert, future figure de Force ouvrière, est arrêté avec neuf militants trotskystes pour « publication de textes de nature à nuire au moral de l’armée et de la population ». Incarcéré à la prison de la Santé, il s’évade lui aussi en juin 1940 pendant un transfert.

En Finlande, l’URSS subit des pertes humaines colossales, malgré des effectifs trois fois plus nombreux que ceux de leurs adversaires. Mais les Finlandais s’épuisent, les munitions d’artillerie viennent à manquer et l’usure du matériel devient problématique. Ils n’ont d’autre choix que d’accepter la paix, en cédant 9 % de leur territoire. 450 000 Caréliens sont évacués et perdent leur foyer. Mais cette victoire laborieuse fissure l’image de Moscou : un « colosse aux pieds d’argile », qui ne pourra résister à la volte-face allemande sans aide américaine.

Malgré le cessez-le-feu, dans les usines d’armement, la production continue à ralentir partout, à l’unisson de la propagande révolutionnaire. Des détériorations de machines sont régulièrement constatées. Les militants, se félicitant de la « paix de la Russie imposée à la Finlande », encouragent les arrêts de travail, ou, pire, proposent de provoquer « des blessures (…) pour ralentir la production », selon un autre rapport secret de la police d’État de Seine-et-Oise.

À la Société nationale de constructions aéronautiques du Centre, le nombre de pièces défectueuses du Bréguet 696, un avion de chasse-bombardement français, explose.

Le 10 mai, l’Allemagne attaque la France.
La bataille ne durera que six semaines.

Lâchetés et trahisons

Deux jours avant l’armistice, Denise Ginollin, secrétaire fédérale du PCF, est arrêtée avec en poche une lettre infâme, où l’antisémitisme rivalise avec la soumission. Destinée aux Allemands, la « Déclaration du 20 juin » espère leurs bonnes grâces, dans l’espoir de voir L’Humanité publié à nouveau et d’obtenir la libération des militants communistes emprisonnés pour sabotage :
« Sommes communistes avons appliqué ligne PC sous Daladier, Reynaud et juif Mandel. Juif Mandel et Daladier nous ont emprisonnés. Fusillé des ouvriers qui sabotaient la défense nationale. Sommes PC français pas eu peur. »

Duclos et Tréand, qui dirigent le PC clandestin, exploitent sans scrupules la judéité du ministre de l’Intérieur Georges Mandel (de son vrai nom Louis Rothschild, sans aucun lien avec la célèbre famille du même nom) pour courtiser l’occupant nazi. Plus tard, leur entrée tardive en résistance ne sera pas, contrairement à l’engagement sincère de nombre de leurs adhérents, un acte patriotique pour la France, mais une lutte dictée par la volte-face des adversaires de Moscou.

Jacques Duclos, l’homme de Moscou

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Les ailes brisées de la défense française

En 1939-40, la production aéronautique française a été bien inférieure aux objectifs, pas seulement à cause des sabotages communistes, mais aussi à cause de graves problèmes d’organisation. Le peu d’entrain des ouvriers, la faiblesse des cadres et la politique incohérente du ministère de l’Air sont souvent pointés du doigt par les historiens.

Le fiasco du Dewoitine D.520, « fleuron » de l’aviation française, capable de tenir tête aux Bf 109 allemands, représente bien cette convergence des failles. Guy La Chambre, ministre de l’Air, refuse que les armes soient montées directement dans les usines, de peur que des ouvriers communistes les utilisent pour fomenter des troubles. Les avions arrivent désarmés dans des ateliers militaires débordés. Sur les 437 appareils livrés avant l’armistice, seule une cinquantaine est vraiment prête à affronter la Luftwaffe.

La libérannexion soviétique

Après la guerre, le PCF tentera de se justifier en accusant les « vrais » coupables : le grand patronat ou « les hommes des trusts ». À la Libération, Jacques Duclos est réélu député de la Seine et Denise Ginollin députée de Seine-et-Oise. Benoît Frachon devient secrétaire général de la CGT. Le trotskyste Pierre Lambert fondera l’Organisation communiste internationaliste, que rejoindra Jean-Luc Mélenchon.

Dès 1945, Staline tente d’imposer l’idée que l’URSS a « sauvé l’humanité du fascisme ». L’URSS impérialiste n’a pourtant pas « libéré les peuples », elle les a enchaînés. 

La paix des dupes

Bien sûr, les réticences actuelles chez la firme au losange sont encore loin des sabotages de 1939. Mais dans une France fracturée, où la défiance envers l’État et les institutions est à son comble, l’histoire donne des raisons de s’inquiéter. D’autant que ressurgit le vieux mythe d’une Russie libératrice de l’Europe face au nazisme. Un récit forgé par le PCF, entretenu chaque 9 mai par Vladimir Poutine, et crédibilisé par Jean-Luc Mélenchon, qui commémore l’armistice à Moscou. Une réécriture de l’histoire qui oublie bien vite les 11 Milliards de dollars d’aide militaire US.

Le leader insoumis, qui promet de « tout conflictualiser », adhère sans scrupule à la fable du Kremlin sur la « provocation de l’OTAN », sinistre écho à l’« impérialisme » supposé de la pauvre Finlande de 1939. Ou à celle des frontières définies sans l’accord des peuples, alors que 92 % des électeurs ukrainiens ont, à la chute de l’empire soviétique, voté en faveur de l’indépendance. « En campagne contre la diabolisation de Vladimir Poutine », il désapprouve la livraison d’armes et rêve d’un cessez-le-feu qui ne serait autre qu’une reddition de Kiev. Il n’est pas le seul, rejoint en cela par certains pseudo-patriotes ou cadres du RN. Certaines postures de paix sont, depuis toujours, un masque bien commode pour dissimuler l’allégeance à l’ennemi. Et la réécriture de l’histoire, une façon bien pratique de justifier l’innommable. Au vu des trahisons passées, on comprend que certains n’aient pas d’autres choix.

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Sur les traces de la légende du canard d’or – Épisode II

Bon, les amis, comment ça va vous ? Parce que moi, franchement… pas terrible. Je suis toujours à la recherche de mon canard d’or, que le chef Antoine a caché je ne sais où. J’ai pourtant rendu à temps ma copie pour le livre sur le bio. On est même toujours n°1 des ventes sur Amazon dans la catégorie “Agriculture Biologique”… Alors pourquoi ne me le rend-il pas ?

— Tu te ramollis, Fred, fais marcher ton cerveau. Cette énigmounette est largement à ta portée, et à celle de nos lecteurs, m’a-t-il même répondu quand je lui ai posé la question. Impossible n’est pas électrons, souviens-toi, a-t-il ajouté, l’air satisfait.

Alors j’ai crié, crié, pour qu’il revienne. Puis j’ai cherché. Partout. J’ai même commencé par les Pays-Bas. Fausse piste. (Mais bonne nouvelle : j’ai ramené une idée d’article.)

— Arrête de courir, Fred, et réfléchis, m’a dit Antoine quand je suis rentré, bredouille.

Alors j’ai réfléchi… 

…et je pense avoir trouvé un truc. J’ai repensé à mon premier article. Je l’avais intitulé : À la recherche du canard d’or, clin d’œil assumé à l’histoire de la chouette d’or. Mais quand il est paru, le titre avait changé : À la recherche de la légende du canard d’or. Et là je me suis dit : ce n’est sûrement pas un hasard. Antoine a dû le modifier pour une bonne raison.

J’ai même essayé de placer le mot rajouté dans la grille trouvée sur son bureau… Et vous savez quoi ? Il rentre parfaitement en sixième ligne.

Je pense que je tiens quelque chose… Nager dans les rhododendrons… Mais bien sûr, Antoine…

Plus que dix mots à trouver pour reconstituer l’énigme et la grille. Et ces chiffres… On dirait que… Vous m’aidez ? Je suis prêt à distribuer les abonnements VIP et Quark comme s’il en pleuvait, si on trouve.

— Même pas en rêve, a rajouté Antoine en publiant l’article…

À suivre…

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