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L’impôt parfait n’existe pas. Le moins mauvais, oui.

« taxer la terre, pas les hommes ». Dans la grande galerie des « ismes » où s’exposent les courants politiques et économiques, nul n’ignore l’existence du communisme, du keynésianisme ou du libéralisme. Mais avez-vous déjà entendu parler du georgisme ? Probablement pas. Tombée dans les oubliettes de la pensée, cette théorie pourrait pourtant être le chaînon manquant entre justice sociale, efficacité économique et transition écologique. Rien que ça !

Elle est née il y a près de 150 ans aux États-Unis, dans le cerveau — et surtout grâce à l’observation empirique — d’un journaliste autodidacte de San Francisco, Henry George, dont la vie rocambolesque a sans doute été sa première source d’inspiration.

Henry George, le prophète oublié de San Francisco

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George n’était ni un marxiste ni un capitaliste pur jus. Il croyait en la liberté, au travail et au progrès — mais il voyait aussi l’injustice d’un monde où la richesse collective finissait dans les poches de ceux qui possèdent la terre. En cette fin de XIXᵉ siècle, les usines poussent bien plus rapidement que les avantages sociaux. Et la Révolution industrielle ne permet pas encore les progrès sanitaires, l’élévation de l’espérance de vie et la réduction des inégalités sociales, qui n’apparaîtront que lors des décennies suivantes.

Pourquoi assiste-t-on alors à une augmentation de la pauvreté, malgré l’accroissement des richesses et les progrès phénoménaux de la science et de l’industrie ? C’est la question centrale de son ouvrage Progrès et pauvreté, publié en 1879.

Certes, à l’époque, George n’est pas le seul à être obsédé par ce problème. Il n’a pas lu Marx, mais a étudié Malthus, qui avait déjà posé son diagnostic : la pauvreté est liée à la surpopulation. Il a aussi analysé la théorie méritocratique, estimant qu’au fond, les pauvres seraient paresseux ou affligés de tares congénitales. George remet en cause ces approches et explique que le problème vient plutôt de l’organisation sociale, qui privilégie notamment les propriétaires fonciers au détriment du reste de la population.

Pour appuyer sa démonstration, il utilise ses propres observations. Il prend notamment l’exemple de la famine irlandaise, qui a décimé une immense partie de la population dans un pays — le Royaume-Uni — alors le plus riche de la planète. Selon lui, c’est l’immense concentration de la propriété foncière entre les mains de quelques milliers de lords, possédant 95 % des terres, qui a provoqué la famine. D’où sa conviction : le foncier est une rente qu’il faut taxer, une ressource naturelle qui appartient aux citoyens d’une même nation, tous en étant copropriétaires.

Si certains souhaitent la privatiser, ils doivent dédommager les autres en payant une taxe en fonction de la valeur de la parcelle. C’est le concept de la Land Value Tax (LVT), qui doit remplacer à ses yeux toutes les taxes.

L’idée paraît d’une simplicité désarmante. Quand une ville se développe, quand les transports, les écoles, les hôpitaux améliorent un quartier, la valeur des terrains grimpe. Mais cette plus-value, produite par la collectivité, est captée par le propriétaire du sol. Pourquoi en profiterait-il alors qu’il n’a rien fait pour augmenter la valeur de cette terre ? Henry George propose donc de rendre au public ce que le public a créé, à travers la LVT, qui en retour finance les services publics.

Son idée a la force de l’évidence : elle ne punit ni le travail, ni la production, ni l’investissement, seulement la rente.

Et pourtant, le georgisme a été relégué dans les marges de l’histoire, entre utopie oubliée et lubie d’économistes hétérodoxes. Pourquoi cela n’a-t-il pas marché ? Proposer de taxer la rente foncière revient à déclarer la guerre aux notables, aux spéculateurs urbains et aux grands propriétaires. Selon Jérémy Boer, infatigable défenseur de la pensée georgienne sur les réseaux sociaux, c’est l’opposition farouche de ces derniers qui en a eu raison. Ils n’ont eu de cesse de combattre une approche qui avait tout pour leur déplaire, notamment en disqualifiant intellectuellement ceux qui oseraient penser comme George.

C’est d’ailleurs la thèse soutenue par deux économistes américains, Fred Harrison et Mason Gaffney, dans The Corruption of Economics (1994) : ils démontrent que les propriétaires fonciers n’ont pas hésité à financer des universités et des professeurs afin de « ruiner les thèses de Henry George ». Car, aux yeux de J. K. Galbraith, qui en a préfacé l’édition de 2006, « l’idée georgiste selon laquelle seule la terre devrait être taxée — afin de ne pas imposer ni les profits ni les salaires — risquait de créer une alliance politique dangereuse entre le capital et le travail contre le propriétaire foncier ».

Le Georgisme en pratique : où l’idée vit encore aujourd’hui

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Si la théorie d’Henry George n’a pas percé, elle a quand même connu quelques traductions concrètes dans différents endroits du monde, sans que l’on sache pourquoi elle y a prospéré plus qu’ailleurs. Le georgisme a finalement essaimé sans jamais régner : des réformes partielles ici ou là, des clubs, des congrès internationaux… mais pas de révolution. À défaut, l’économiste a inspiré néanmoins un vaste mouvement politique, le « georgisme ».

C’est d’ailleurs lui qui a donné à une ardente militante georgiste, Elizabeth Magie, l’idée de créer le jeu du Landlord’s Game, dévoyé en… Monopoly.

Le jour où Monopoly a trahi le georgisme

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Des économistes de renom comme Milton Friedman ou Paul Krugman ont aussi salué son approche ; Joseph Stiglitz a même repris à son compte les intuitions de George, en 1977, dans sa Théorie des biens publics locaux.

Mais les démocraties de l’époque ont préféré empiler les taxes sur le revenu, sur la consommation, sur le travail — tout sauf sur la rente. Parce que taxer la terre, c’est toucher au nerf du pouvoir : la propriété. Peut-être que le georgisme a aussi manqué d’un champion politique capable de porter son programme transpartisan, mais hélas jugé trop égalitariste pour la droite et trop libéral pour la gauche.

D’ailleurs, Marx, qui a lu Henry George, n’est pas tendre avec son approche, qu’il décrit dans une lettre écrite en 1881 à Friedrich Adolph Sorge comme une « tentative, agrémentée d’un vernis socialiste, de sauver la domination capitaliste et, en réalité, de la refonder sur une base encore plus large que l’actuelle ».

Pourtant, à la faveur de la crise environnementale, le georgisme pourrait-il retrouver des couleurs ? L’époque cherche désespérément une théorie capable de sortir de la nasse : croissance plus juste et écologie sans récession. Et si la solution était déjà là, dans les marges jaunies de Progress and Poverty ?

Dans le contexte actuel, l’idée prend une dimension nouvelle : taxer le sol, c’est valoriser l’usage efficace de l’espace. Fini les terrains vides en attente de plus-value ; place à la densité, à la justice spatiale, en quelque sorte. Taxer la propriété non productive, c’est aussi un excellent moyen d’alléger le coût du travail, de redonner du pouvoir d’achat aux travailleurs, de rendre nos entreprises plus compétitives pour renouer avec la croissance.

Cette théorie n’a peut-être donc pas dit son dernier mot. C’est la conviction de deux économistes, Alain Trannoy et Étienne Wasmer. Dans leur livre Le Grand Retour de la terre dans les patrimoines, ils militent pour l’appliquer en France, où « la valeur foncière dans la richesse nationale (8 900 milliards) connaît même une croissance continue ».

Ils proposent d’instaurer une taxe annuelle de 2 % sur la valeur foncière, contre des allègements sur la fiscalité du travail et du capital. Une façon, à leurs yeux, de répondre aussi bien à l’objectif de zéro artificialisation nette des sols qu’à celui de la modération des prix de l’immobilier.

C’est, au fond, le message de George : « la terre appartient aux vivants ». Il serait peut-être temps de s’en souvenir.

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Date bug affects Ubuntu 25.10 automatic updates

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The Ubuntu Project has announced that a bug in the Rust-based uutils version of the date command shipped with Ubuntu 25.10 broke automatic updates:

Some Ubuntu 25.10 systems have been unable to automatically check for available software updates. Affected machines include cloud deployments, container images, Ubuntu Desktop and Ubuntu Server installs.

The announcement includes remediation instructions for those affected by the bug. Systems with the rust-coreutils package version 0.2.2-0ubuntu2 or earlier have the bug, it is fixed in 0.2.2-0ubuntu2.1 or later. It does not impact manual updates using the apt command or other utilities.

Ubuntu embarked on a project to "oxidize" the distribution by switching to uutils and sudo-rs for the 25.10 release, and to see if the Rust-based utilities would be suitable for the long-term-release slated for next April. LWN covered that project in March.

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Btrfs support coming to AlmaLinux 10.1

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The AlmaLinux project has announced that the upcoming 10.1 release will include support for Btrfs:

Btrfs support encompasses both kernel and userspace enablement, and it is now possible to install AlmaLinux OS with a Btrfs filesystem from the very beginning. Initial enablement was scoped to the installer and storage management stack, and broader support within the AlmaLinux software collection for Btrfs features is forthcoming.

Btrfs support in AlmaLinux OS did not happen in isolation. This was proposed and scoped in RFC 0005, and has been built upon prior efforts by the Fedora Btrfs SIG in Fedora Linux and the CentOS Hyperscale SIG in CentOS Stream.

AlmaLinux OS is designed to be binary compatible with Red Hat Enterprise Linux (RHEL); Btrfs, however, has never been supported in RHEL. A technology preview of Btrfs in RHEL 6 and 7 ended with the filesystem being dropped from RHEL 8 and onward. AlmaLinux OS 10.1 is currently in beta.

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Security updates for Thursday

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Security updates have been issued by AlmaLinux (ipa, kernel, and thunderbird), Debian (gdk-pixbuf, gegl, gimp, intel-microcode, raptor2, request-tracker4, and request-tracker5), Fedora (samba and wireshark), Mageia (haproxy, nginx, openssl, and python-django), Oracle (kernel and thunderbird), Red Hat (redis and redis:7), Slackware (bind), SUSE (aws-cli, local-npm-registry, python-boto3, python- botocore, python-coverage, python-flaky, python-pluggy, python-pytest, python- pytest-cov, python-pytest-html, python-pytest-metada, cargo-audit-advisory-db-20251021, fetchmail, git-bug, ImageMagick, istioctl, kernel, krb5, libsoup, libxslt, python-Authlib, and sccache), and Ubuntu (bind9, linux, linux-aws, linux-azure, linux-azure-6.8, linux-gcp, linux-gkeop, linux-ibm, linux-ibm-6.8, linux-lowlatency, linux-lowlatency-hwe-6.8, linux-oracle, linux-azure, linux-azure-5.15, linux-gcp-5.15, linux-gcp-6.8, linux-gke, linux-nvidia, linux-nvidia-6.8, linux-nvidia-lowlatency, and linux-realtime, linux-realtime-6.8).
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La Russie a « autre chose que des drones dans son arsenal pour venir poser un problème », l’armée française ne croit pas au mur anti-drones

mur drone europe

« Les drones peuvent nous exciter, mais ce n'est pas un enjeu vital. » Le chef d'état-major des armées françaises Fabien Mandon s'est montré circonspect vis-à-vis du projet de mur anti-drones. Il y a d'autres problèmes plus critiques posés par la Russie, a-t-il laissé entendre.

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Security updates for Wednesday

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Security updates have been issued by Fedora (inih, mingw-exiv2, and mod_http2), SUSE (ffmpeg-4, kernel, libqt5-qtbase, protobuf, python-ldap, and python313), and Ubuntu (erlang, ffmpeg, linux, linux-aws, linux-gcp, linux-oem-6.14, linux-oracle, linux-oracle-6.14, linux-raspi, linux-realtime, linux-aws, linux-azure, linux-azure-6.14, linux-azure-nvidia-6.14, linux-azure-fips, linux-oracle-5.4, and linux-realtime-6.14).
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CopyCop, la ferme à trolls pro-russe GenAI créée par un ex-shérif adjoint américain

CopyCops are (GenAI) bastards
CopyCop, la ferme à trolls pro-russe GenAI créée par un ex-shérif adjoint américain

Des fact-checkers états-uniens et journalistes français ont identifié un réseau de plus de 300 sites d’information, dont 143 « au moins » en français, financés par le service de renseignement militaire russe. Nous les avons ajoutés à la liste des (soi-disant) sites d’information épinglés par l’extension (gratuite) que Next a développée pour alerter ses utilisateurs au sujet des contenus générés par IA. Elle dénombre désormais plus de 8 000 sites GenAI.

Fin avril, moins d’un mois après que Marine Le Pen a été condamnée dans l’affaire des assistants parlementaires du Front national au Parlement européen, un site d’information, lequotidienfrancais.fr, « révélait » que, dans le plus grand secret, Gérald Darmanin et Bruno Retailleau avaient prévu de l’incarcérer, en même temps que Marion Maréchal, Sarah Knafo et Florian Philippot.

L’article, intitulé « Mandats d’amener : de nouvelles tensions politiques autour du gouvernement d’Emmanuel Macron », reposait sur une soi-disant « fuite » issue d’un groupe WhatsApp baptisé « Chat du tribunal de Paris ». Plusieurs « hauts responsables de l’appareil judiciaire et du gouvernement », dont les ministres de la Justice Gérald Darmanin et de l’Intérieur Bruno Retailleau, ainsi que la présidente de la chambre de l’instruction Anne Tarelli et le juge d’instruction Simon Brunnquell, y auraient été « impliqués dans l’émission imminente de mandats d’amener visant plusieurs figures de l’opposition politique », affirmait lequotidienfrancais.fr :

« Ces mandats, dont l’exécution serait prévue pour le 6 mai , viseraient notamment Marine Le Pen (Rassemblement national), Marion Maréchal (Identité-Libertés), Sarah Knafo (Reconquête) et Florian Philippot (Les Patriotes). Tous ces responsables politiques partagent une ligne dure sur l’immigration, s’opposent au soutien militaire à l’Ukraine et plaident en faveur d’un retrait de la France de l’Union européenne (FREXIT). »

Captures d’écran de (faux) documents censés préparer l’arrestation de Marine Le Pen

L’article avançait en outre que « les documents obtenus par la presse font état de mesures sévères envisagées à l’encontre des personnalités ciblées, notamment la transformation de l’assignation à résidence de Marine Le Pen en peine de prison ferme » :

« Dans les mandats d’amener figurent les accusations suivantes : atteinte au respect dû à la justice, détournement de fonds publics, incitation à la haine ou à la discrimination, et troubles à la paix publique. »

Ex-shérif adjoint de Floride et troll à la solde du renseignement militaire russe

Le Quotidien Français fait partie d’une nébuleuse de plus de 300 sites web, dont au moins 141 sites d’information et 2 de fact-checking en français, créés depuis début 2025 par les opérateurs du réseau d’influence et de propagande pro-russe CopyCop (également connu sous le nom de Storm-1516).

Ces derniers, identifiés par Insikt Group, la division de recherche sur les menaces de l’entreprise états-unienne de cybersécurité Recorded Future, se font passer pour des sites d’information ou mouvements politiques ciblant les États-Unis, la France, le Canada, l’Allemagne ou l’Arménie, ou publiant du contenu en turc, en ukrainien et en swahili.


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Les joueurs Battlefield 6 abusaient avec les serveurs pour « farmer » l’XP, mais c’est terminé

Electronic Arts a actionné son plan pour contrer les abus de gains d'expérience sur Battlefied 6. Des serveurs de la communauté étaient devenus de vraies fermes à XP, où l'on dégommait des bots à la chaîne pour monter plus rapidement en niveau, afin de débloquer un arsenal plus conséquent.

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