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Le rapport RTE sonne le glas de la décroissance

L’alerte est lancée : sans croissance, le prix de l’électricité pourrait exploser, les centrales nucléaires être fragilisées, les projets de nouveaux EPR remis en cause et la neutralité carbone compromise. Le gestionnaire du réseau électrique français est formel : il faut réindustrialiser le pays et attirer des activités fortement consommatrices d’électricité, des usines aux datacenters. Mais pour cela, il faut changer de paradigme.

« L’énergie est notre avenir, économisons-la. » Ce slogan, obligatoire depuis 2019 dans toutes les annonces commerciales énergétiques, incarne la ligne qui structure depuis quelques années la politique énergétique française. Et qui cristallise l’idée directrice de certains groupes d’influence, comme le Shift Project de Jean-Marc Jancovici, pour qui toute économie d’énergie est bonne à prendre, même lorsqu’il s’agit d’une électricité décarbonée tricolore. Une injonction que RTE, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité français, balaye radicalement dans son dernier rapport, présenté mardi dernier. En matière d’électricité, sa préconisation pourrait s’exprimer d’une tout autre façon : « L’électricité est notre avenir, utilisons-la. » Le groupe tire la sonnette d’alarme : si ce n’est pas le cas, les prix vont grimper et le chemin vers la décarbonation va considérablement s’assombrir.

Schizophrénie énergétique

La politique énergétique française a, ces dernières années, donné l’impression de souffrir d’une forme de dissonance cognitive. La volonté de décarboner notre économie s’est souvent traduite par l’installation de nouvelles capacités de production d’électricité, notamment renouvelables. On pouvait déjà s’interroger sur la logique de « décarboner » une électricité qui l’était déjà, mais l’effort n’a pas été vain, puisqu’il a permis de fermer les dernières centrales à charbon.

Dans le même temps, cette dynamique a été accompagnée d’un discours de sobriété électrique. Plus de production pour moins de demande ? L’ensemble ne tenait qu’à une condition : réduire simultanément d’autres moyens de production, en particulier le nucléaire, avec l’objectif affiché de descendre à 50 %. RTE allait même jusqu’à envisager des scénarios 100 % renouvelables. Conflit avec la Russie, déboires de nos voisins allemands et espagnols, craintes de pénurie, flambée des prix… Cette ligne antinucléaire s’est heurtée frontalement au mur du réel.

L’effet rebond n’a jamais eu lieu

Depuis, le discours a radicalement changé : sans remettre en cause les projets solaires ou éoliens, six réacteurs EPR2 — plus huit en option — sont désormais envisagés. Mais la hausse de consommation censée les justifier ne s’est pas matérialisée. RTE l’explique par des « modes de consommation durablement modifiés, l’augmentation et l’incertitude sur les prix de l’électricité, le contexte politique et économique et les réglementations issues du “Pacte vert” européen ».

Le gestionnaire souligne également les progrès technologiques, « toujours sous-estimés dans le débat public », en citant l’exemple des éclairages à LED, qui ont « permis de réduire de 10 TWh la consommation d’électricité en dix ans ».

L’effet rebond, souvent invoqué à chaque nouvelle innovation, n’a pas eu lieu. À tel point qu’aujourd’hui, à rebours des prévisions, la France consomme 10 % d’électricité de moins qu’il y a quinze ans. Et ce n’est pas sans risques.

Deux croissances, deux scénarios

Le gestionnaire du réseau envisage deux scénarios. Un premier, pour lequel la consommation augmente à un rythme relativement lent, dans un contexte économique dégradé (PIB : +0,6 %/an et baisse de la part de l’industrie). Et un second, dans lequel la France réussit son redressement économique et industriel (PIB : +1,1 %/an et légère hausse de la part de l’industrie).

Si le scénario de croissance lente devait se réaliser, le constat serait sans appel : le prix de l’électricité pourrait exploser, le nucléaire serait soumis à des contraintes potentiellement risquées, les producteurs d’énergie seraient mis sous pression et la décarbonation de l’économie ne pourrait suivre la trajectoire annoncée.

Trop d’électricité coûte cher

Plus d’offre, moins de demande ? En théorie, cela fait baisser les prix. Mais le marché de l’électricité n’est pas un marché comme les autres. Qu’ils soient utilisés à 70 % ou à 100 %, les coûts d’exploitation du parc nucléaire et du réseau restent fixes. Une sous-utilisation fragiliserait la rentabilité des opérateurs, qui ne pourraient survivre que grâce au « soutien public », et donc à celui des contribuables. Pour RTE, en cas de stagnation de la consommation, le coût de chaque MWh augmenterait de +10 % à l’horizon 2030.

« L’abondance de production », notamment en milieu de journée lorsque le solaire produit le plus, « conduit à des prix très bas, voire négatifs, et impose de réduire la production nucléaire et renouvelable », alerte l’opérateur. Qui pointe un problème longtemps minoré : l’excès de modulation du parc nucléaire. Faire varier la puissance d’un réacteur selon la demande ou la météo n’a rien de nouveau, mais l’essor des renouvelables en a accentué l’ampleur. Une évolution prise au sérieux, car elle pourrait affecter la fiabilité du parc. « Des milliers d’installations diffuses peuvent entraîner des arrêts et redémarrages trop brusques », confirme le gestionnaire.

Une croissance lente obligerait l’État et les opérateurs à revoir complètement leur stratégie. Selon RTE, il faudrait alors se concentrer sur « les filières de production les plus compétitives » : prolonger la durée de vie des réacteurs nucléaires existants, concentrer l’éolien terrestre et l’éolien en mer dans les zones les plus favorables, et limiter le photovoltaïque aux installations de grande taille. Exit les petits parcs solaires, l’éolien flottant et le nouveau nucléaire. Ce ne serait pas sans conséquences : pour maintenir dans le temps la compétence d’une industrie, il faut lui confier des projets.

Le gestionnaire du réseau redoute aussi qu’un ralentissement de la mondialisation n’aggrave la situation, empêchant la consommation d’évoluer « au rythme nécessaire pour atteindre la neutralité carbone ». Or la France importe encore près de 60 % de l’énergie finale qu’elle consomme, pour une facture annuelle comprise entre 50 et 70 milliards d’euros. Cette dépendance se traduit par une vulnérabilité géostratégique majeure, liée notamment aux importations de produits pétroliers et de gaz en provenance de Russie, des pays du Golfe et, désormais, des États-Unis.

Moins de freins, plus de datacenters !

Comment inverser la tendance, préserver des tarifs abordables et maintenir la trajectoire de décarbonation ? Aujourd’hui, la France bénéficie d’un avantage comparatif : des prix de l’électricité inférieurs à ceux de la plupart de ses voisins, en particulier l’Allemagne.

Un avantage comparatif qui peut lui permettre d’attirer les industriels et les acteurs du numérique. Mais un obstacle persiste : de nombreuses pré-réservations de raccordements à forte puissance ne correspondent à aucun projet réel et saturent artificiellement le calendrier, au détriment d’initiatives capables de se déployer rapidement. On pense notamment à l’hydrogène, massivement soutenu par les pouvoirs publics mais jugé « faiblement compétitif » par RTE.

À l’inverse, le gestionnaire appelle de ses vœux l’accueil de datacenters, tout en soulignant la fréquente surestimation de leurs besoins : ceux « déjà raccordés n’utilisent que 20 % de leur puissance contractuelle ». Pour éviter de ralentir leur installation, RTE va « augmenter son niveau de “surbooking” du réseau afin de ne pas renvoyer une image de saturation artificielle ».

Des datacenters pour faire baisser les prix et accélérer la décarbonation ? L’idée tranche avec certains discours, notamment celui du Shift, qui appelait récemment à « limiter le déploiement de l’IA », jugé susceptible de « compromettre notre capacité à décarboner l’industrie ». À l’inverse, avec une électricité abondante et largement décarbonée, la France dispose d’un levier majeur pour devenir une « terre de l’IA ». Un cercle vertueux qui permettrait à la fois de réduire l’empreinte carbone du secteur, de développer l’économie numérique et de renforcer un pilier stratégique de la souveraineté nationale.

Plus de progrès et plus de croissance pour mieux décarboner ? L’idée, malheureusement encore loin de faire consensus, s’impose désormais dans les analyses de RTE. Le temps presse : si la France veut maintenir des prix bas et inscrire sa trajectoire de décarbonation sur des bases crédibles, il est urgent de faire évoluer les mentalités, encore trop souvent imprégnées de chimères décroissantes. Puisse ce rapport constituer un jalon incontournable et remettre le débat énergétique face aux réalités du système.

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© Stephane Mahe / REUTERS

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