Produire de l’électricité à partir de la rotation de la Terre : c’est possible selon les scientifiques
Ce n’est pas un poisson d’avril. Peut-on générer de l’électricité en utilisant le champ magnétique de la Terre et sa propre rotation autour d’elle-même ? La réponse a toujours été non. Mais cette équipe de chercheurs aurait réussi à montrer que c’est possible, dans un article scientifique qui, peut-être, fera date.
La Terre est dotée d’un champ magnétique, d’une intensité très faible, de l’ordre en France de 47 µT (micro-Tesla), mais suffisant pour nous permettre de nous orienter à l’aide d’une boussole. Par ailleurs, la Terre tourne sur elle-même, ce qui est bien sûr à l’origine de l’alternance des jours et des nuits. Cette combinaison d’un champ magnétique et d’un mouvement peut laisser penser qu’il serait possible de produire un courant électrique dans un conducteur, un peu comme dans un alternateur.
La science a toutefois démontré que ce n’était pas possible. En 1832, Michael Faraday démontre par une expérience qu’il est impossible de générer de l’électricité à partir du champ magnétique et de la rotation de la Terre. Impossible donc ? Jusqu’en 2016, date à laquelle Christopher Chyba de l’Université de Princeton, et Kevin Hand, du California Institute of Technology, pointent une faille dans le raisonnement. Et en 2025, ils publient les résultats dans Physical Review Applied d’une expérimentation qui prouverait leur point de vue (l’article est disponible en source ouverte).
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L’explication de l’échec de l’expérience de Faraday a été la suivante : le champ magnétique de la Terre produit bien un mouvement des électrons, mais ce même mouvement génère à son tour un champ magnétique de retour qui annule l’effet du champ magnétique terrestre. Or, d’après Chyba et Hand, ce raisonnement présenterait une faille : il suppose que le champ magnétique dans le conducteur change instantanément.
Or ce n’est pas le cas : dans certains matériaux, le champ diffuse plus lentement, et cet effet pourrait être exploité. En effet, dans ce cas, le champ contre-moteur ne s’établit pas immédiatement, ne permettant pas d’annuler immédiatement le courant. Leurs calculs théoriques ont montré en outre qu’un courant serait produit s’il était placé de manière perpendiculaire à l’équateur, donc selon un axe nord-sud.
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Les chercheurs ont donc fabriqué un cylindre creux constitué d’un ferrite de manganèse-zinc, de la taille approximative d’une grosse lampe de poche. Et ils l’ont testé dans leur laboratoire. Ils ont constaté un courant continu de quelques microvolts, conforme à leurs calculs. La tension, l’intensité et la puissance électrique générées ont été extrêmement faibles ; un calcul de coin de table de l’auteur de cet article indiquerait une puissance électrique inférieure au picowatt (soit moins de 0,000000000000011 W).
Une toute petite puissance générée, donc. Toutefois, les chercheurs envisagent une possible miniaturisation de leur système, ainsi qu’une mise en série, de façon à augmenter la tension et la puissance générées. Leur invention pourrait ainsi alimenter des systèmes de plus grande taille, par exemple, des capteurs dans des sites isolés, voire de véritables systèmes à notre échelle, ne serait-ce qu’une maison. Avec un avantage incomparable : l’absence de besoin d’alimenter en combustible, ou de recharger une batterie. Le système serait ainsi totalement autonome.
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Magique ? Non, l’énergie vient bien de quelque part. De la rotation de la Terre. Le système conduirait donc, en retour, à ralentir la rotation de notre planète et à augmenter la durée des jours. Un peu comme l’effet des marées lunaires, qui conduisent à ralentir la durée du jour sur Terre, et à éloigner la Lune ; ainsi, il y a 620 millions d’années, le jour durait environ 20 heures, et la Lune était plus proche d’environ 20 000 km.
Il s’agit donc d’une source d’énergie fossile, pas du tout renouvelable. Mais ce n’est pas un problème pour les auteurs, qui précisent : « Nous avons précédemment montré que même dans un scénario extrême où notre civilisation obtiendrait toute son énergie électrique à partir de l’effet décrit ici, la rotation de la Terre ne ralentirait que de moins de 1 milliseconde par décennie. » Fossile donc, mais avec un gisement si colossal, que cela n’aurait aucun effet sensible.
Du reste, nous devons être prudents sur cette découverte. L’effet mesuré était si faible, qu’il pouvait être provoqué par des phénomènes parasites (par exemple, la différence de température entre les faces du cylindre, par l’effet Seebeck). La publication a ainsi soulevé son petit débat, ce qui est tout à fait normal dans le cadre de la méthode scientifique. Les auteurs appellent par ailleurs à ce que leur expérience soit reproduite : « La prochaine étape consisterait pour un groupe indépendant à reproduire (ou contredire) nos résultats dans des conditions expérimentales très similaires à celles utilisées ici ». Souhaitons en effet d’autres expériences, pour en avoir le cœur net.
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