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Aujourd’hui — 18 septembre 2024Flux principal

Entrevue avec Christophe Grenier, développeur de testdisk et photorec

testdisk et photorec sont deux outils libres (GPLv2+) formidables… que l’on souhaite pourtant ne jamais avoir à utiliser ! En effet, les deux sont dédiés à la récupération de données après une panne matérielle, ou une bévue.

TestDisk

Le premier est axé supports de stockage et leurs partitions, le second orienté récupérations de fichiers (mais il est loin de se limiter aux images).

Cocorico : le développeur de ces outils est français, et il a bien voulu répondre à notre sollicitation d’entrevue :).

Bonjour Christophe ! Pouvez-vous présenter votre parcours ?

Quand j’ai commencé à développer testdisk, mon premier outil de récupération de données, j’étais encore étudiant en école d’ingénieur.
Maintenant, cela fait plus de 20 ans que je suis diplômé de l’ESIEA, j’interviens d’ailleurs dans son Mastère Spécialisé Sécurité et Information des systèmes depuis 2004.
Après avoir travaillé dans la sécurité informatique, j’ai travaillé autours des systèmes Linux, du réseau et de la sécurité.
Depuis un peu plus de 10 ans, je suis directeur d’exploitation pour un hébergeur parisien.
Dans le cadre de mon auto-entreprise, je fais de la récupération de données.

Comment avez-vous démarré ce projet ?

Un ami développeur professionnel sous Windows venait d’acheter un nouveau disque dur et pour éviter d’avoir trop de lettres de lecteurs (C:, D:, E:, …) avait décidé de réduire le nombre de partitions de son disque de données ; ce disque contenait 3 partitions.
Il a sauvegardé les données, supprimé les 3 partitions, en a créé 2 et — au moment de restaurer les données — il s’est rendu compte qu’il avait été trop vite et qu’il lui manquait la sauvegarde d’une des partitions.
Sachant que j’avais des connaissances sur le partitionnement des PC (je m’étais intéressé au fonctionnement des virus de boot qui se logeaient dans le premier secteur des disques durs), il m’a contacté.

Armé d’un éditeur hexadécimal, il nous avait fallu la journée pour reconstruire manuellement la table des partitions et récupérer ces données. Un peu plus tard ayant appris les rudiments de la programmation en C, je me suis dit qu’il devait être possible d’automatiser la récupération des partitions et c’est ainsi qu’est né testdisk en 1998.

Pour photorec, il a fallu attendre mon premier appareil photo numérique en 2002. Ayant peur de perdre des photos (effacement par mégarde de photos non sauvegardées, reformatage de la mauvaise carte mémoire…), avant même de partir en voyage, j’ai bricolé un programme en C sous Linux capable de récupérer les photos et vidéos prises par mon appareil photo. C’est ainsi que photorec est né pour récupérer des photos. Il a gardé son nom même s’il récupère des centaines de formats de fichier différents.

Quels sont les points marquants qui ont, selon vous, marqué l’évolution de ces logiciels ?

Les points principaux ayant permis le succès de ces logiciels sont :

  • de rendre ces logiciels multiplateformes pour PC : MS-Dos et Linux, puis Windows. La prise en charge de macOS est venu bien plus tard et a eu peu d’impact.
  • de distribuer ces logiciels gratuitement. L’utilisation d’une licence opensource (GPL v2+) m’a aussi permis d’avoir quelques contributions.
  • d’être plutôt à l’écoute des utilisateurs et d’enrichir les formats de fichiers gérés par photorec. Certains sont vraiment exotiques.
  • de la documentation en plusieurs langues à une époque où les traductions automatiques étaient quasi-inexploitables. Mais aujourd’hui, la documentation principale de plus de 60 pages est en anglais.

Un point marquant a été la reconnaissance officielle de l’utilisation de ces logiciels par des organismes étatiques.

testdisk a été conçu pour un public technique, j’ai eu des retours de différents sociétés de récupération de données de part le monde l’utilisant mais en général, elles ne souhaitent pas communiquer sur leur utilisation de logiciels (libres ou du commerce).

Un tournant a eu lieu en 2014 quand le NIST, dans le cadre du Computer Forensics Tool Testing Program (CFTT), a testé et publié ses résultats sur les capacités de photorec. En comparant les résultats de chaque outil, on découvre que photorec a les meilleurs résultats (1ère place ex aequo).
Ainsi, photorec figure dans le catalogue de logiciels que les agences d’États américains peuvent utiliser.

photorec apparaît dans les diapositives de la formation SecNum Academie de l’ANSSI.

Pourquoi un seul paquet pour deux logiciels, ou pourquoi pas un seul logiciel ?

Quand on parle de testdisk et photorec, il y a aussi fidentify, un outil en ligne de commande qui permet de tester rapidement l’identification de fichiers en utilisant les mêmes parsers que photorec, sans oublier qphotorec, une version graphique de photorec.

Selon les distributions, vous pouvez avoir un package testdisk comprenant testdisk, photorec et fidentify et un package qphotorec pour qphotorec.

testdisk utilise un accès en écriture au disque, photorec n’utilise qu’un accès en lecture. photorec est plus facile d’utilisation que testdisk, c’est presque du next/next/next, il ne fait que du « file carving » (récupération de fichiers par identification des entêtes).

Quelles sont les fonctionnalités les plus attendues que vous pensez implémenter ?

La vérification formelle du code des parsers de photorec est ce qui m’a le plus occupé ces dernières années, je continue de travailler dessus.
Je n’ai pas prévu d’implémenter de nouvelles fonctionnalités dans l’immédiat.

Avez-vous des retours d’utilisateurs, des remerciements de personnes qui ont pu grâce à ces outils retrouver une partie de leur vie numérique, ou de grincheux ?

Perdre une partie de sa vie numérique est très stressant.
De fait, j’ai été confronté à des grincheux très agressifs dont un cas extrême de menaces répétées de mort de la part d’un individu qui n’avait pas pu récupérer ses données. Les hébergeurs de ses messageries successives ont agi rapidement lorsque j’ai signalé ses messages, mais je me suis posé la question à ce moment-là si cela valait bien la peine de m’investir autant pour risquer cette violence numérique.

Les retours positifs des utilisateurs et leurs remerciements sont ce qui a permis de me motiver à continuer de développer sur toutes ces années ce projet.
À une époque, je recevais quotidiennement des mails de remerciements et/ou des donations. C’est moins fréquent désormais, mais c’est peut-être parce que les sauvegardes vers le cloud sont beaucoup plus courantes et qu’ainsi les gens ont moins recours à la récupération de données.

Effectivement, perdre une partie de sa vie numérique est très stressant, avez-vous des conseils à donner sur la sauvegarde ?

Ce sont des conseils très généraux :

  • que cela soit au niveau personnel ou au niveau professionnel, il est important de vérifier le périmètre de la sauvegarde. Si vous n’aviez plus que votre dernière sauvegarde, que vous manquerait-il ?
  • testez une restauration de données
  • si possible, multipliez les sauvegardes (sauvegarde avec historique ou versionning, pas une simple synchronisation)
  • dans l’idéal, plusieurs lieux de sauvegarde.

Sur ces projets, y a-t-il d’autres contributeurs ?

testdisk et photorec reçoivent principalement des contributions ponctuelles. J’en profite pour remercier toutes les personnes qui m’ont aidé pour les traductions, pour avoir partagé des fichiers dans des formats exotiques, ou pour avoir contribué au code.
Merci aussi aux personnes ayant participé à la modération du forum et au modérateur actuel !

Y a-t-il des fonctionnalités importantes qui ne seront pas développées, et pourquoi ?

À moins de recevoir des contributions, je ne pense pas pousser davantage le support mac.
Le chiffrement des disques sous Windows va devenir la norme, comme c’est le cas sous macOS. Je pense que cela va freiner le développement de testdisk et photorec. La récupération va devenir bien plus complexe en exigeant un déchiffrement préalable.

Des souvenirs marquants de cette expérience ?

Je crois que l’une des anecdotes qui m’a le plus amusé est celle que j’ai reçue en janvier 2007 : dans un premier mail, l’utilisateur explique qu’un appareil photo a été volé dans sa voiture, mais qu’une semaine plus tard, la police a trouvé le coupable et a pu restituer l’appareil photo. Le contenu avait été effacé, mais grâce à photorec, l’utilisateur avait récupéré plus de 300 photos.

Currently I am recovering over 300 photos using PhotoRec that my sister in law took over the holidays. Our car was broken into and the camera was stolen. A week later the police found the guy! They found the camera, but it had been wiped.
I had read about recovering photo's from flash cards via a story on slashdot, and now here I am.

Quelques heures plus tard, j’ai reçu la suite de l’histoire :

I have recovered some pictures that look to be taken by the thief […]
I am submitting a CD of the data I have recovered to the Detective involved in the case. My little camera was involved in a much larger theft, so hopefully the pictures they took will help nail them all!

Le voleur avait utilisé l’appareil photo, photorec a permis de récupérer des photos ayant beaucoup intéressé le détective en charge du dossier : celui-ci espère découvrir les autres personnes impliquées dans un vol de plus grande envergure.

Avez-vous eu des échanges avec des éditeurs de logiciels similaires (opensource ou propriétaires) ?

photorec a été victime de plusieurs contrefaçons.

Dans un cas, un fabricant de carte mémoire a distribué un logiciel de récupération de données, ce fabricant avait sous-traité le développement qui avait « optimisé » son temps de développement en récupérant le code source de photorec, remplaçant tous les entêtes de copyright et ajoutant une interface graphique.
Après avoir contacté le fabricant, celui-ci a fait rétablir les copyrights manquants et le code a été distribué en GPLv3.

Dans d’autres cas, des développeurs ont volontairement publié des contrefaçons qu’ils revendaient. Après avoir fait fermer leur hébergement plusieurs fois, ils ont fini par trouver un hébergeur bullet-proof, un hébergeur qui ne répondait plus aux plaintes…

Concernant le forum, avez-vous déjà rencontré des difficultés avec le respect du code de conduite ?

La modération sur le forum est obligatoire, les spammeurs sont très nombreux et inventifs en réutilisant par exemple du contenu d’autres sujets. Aucun code de conduite n’a été formalisé.
Le forum ne tient plus que grâce à la présence d’un modérateur, je ne sais pas si cette partie du projet va perdurer.

Quel est votre modèle économique ?

Le projet est né comme un projet personnel et reste géré comme tel.
Je travaille chez Global Service Provider, une société de services et hébergement informatique, qui me permet de disposer gracieusement (Merci à eux) de machines virtuelles (VM), sauvegarde, monitoring pour le projet.
Diverses donations ponctuelles couvrent les frais des différents noms de domaine, mon équipement informatique personnel…

Au niveau personnel, quels logiciels libres utilisez-vous, sur quel système d’exploitation ?

À l’exception des raspberry pi sous Raspbian, les différents ordinateurs de la maison sont sous Fedora Linux.
J’utilise gnome comme environnement graphique, alpine et roundcube pour la messagerie, vim comme éditeur de texte, du docker avec moby, gcc, python…

Et au niveau professionnel ?

Mon ordi portable est aussi Fedora Linux.
Les serveurs Linux que mon équipe et moi gérons sont principalement sous AlmaLinux et Debian.

J’utilise tous les jours ansible (automatisation des configurations), git (versionning), netbox (gestion de datacenters), oxidized (sauvegarde réseau), mediawiki (documentation)…

Merci pour votre disponibilité, et pour ces merveilleux outils !

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À partir d’avant-hierFlux principal

Parcours libriste avec lareinedeselfes — « Libre à vous ! » du 3 septembre — Podcasts et références

Deux cent dix-huitième émission « Libre à vous ! » de l’April. Podcast et programme :

  • sujet principal : Parcours libriste avec lareinedeselfes
  • chronique F/H/X de Florence Chabanois sur le thème « Formulations excluantes et invisibilisantes »
  • chronique À la rencontre du libre de Julie Chaumard sur le thème « Les-Tilleuls.coop - Une coopérative basée sur le logiciel libre »

Rendez‐vous en direct chaque mardi de 15 h 30 à 17 h sur 93,1 MHz en Île‐de‐France. L’émission est diffusée simultanément sur le site Web de la radio Cause Commune. Vous pouvez nous laisser un message sur le répondeur de la radio : pour réagir à l’un des sujets de l’émission, pour partager un témoignage, vos idées, vos suggestions, vos encouragements ou pour nous poser une question. Le numéro du répondeur : +33 9 72 51 55 46.

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Recommandations de lecture: RE2020, CSTB, STD, ACV, FDES, INIES, HQE, coup de gueule et FOSS

En passant dernièrement dans l’espace de rédaction de LinuxFr.org, au sujet de FreeCad 1.0 (dépêche en cours de rédaction, mais la RC1 est pour dans quelques jours), un intervenant parle de Gestion du Cycle de Vie d'un Produit.

Dans le domaine du bâtiment / BTP, on est en plein dedans et depuis quelque temps déjà. Effectivement, un logiciel libre comme FreeCad pourrait, à priori, tout à fait trouver sa place dans ce domaine, mais les obstacles sont nombreux et pour certains, très difficiles à surmonter.

Je vous propose un petit tour parmi ces acronymes pour vous en convaincre.

Et en commençant par un petit rappel à la loi si vous ne suivez pas l’actualité :)

    Sommaire

    La RE2020 est en vigueur

    RE2020

    C’est l'arrêté du 4 août 2021 qui a définitivement activé la Réglementation Environnementale 2020.

    Depuis le 1ᵉʳ janvier 2022, tous les nouveaux projets de construction de bâtiment doivent être conformes à la RE2020. Elle reprend dans son volet « Énergie » l’esprit de la Réglementation Thermique RT2012 (et des Réglementations Thermiques précédentes, RT2008, RT2004) en vigueur jusqu’à cette date. Elle y ajoute à présent un volet « bilan Carbone » sur le cycle de vie de l’ouvrage (50 ans minimum).

    Je vous recommande ce guide plutôt complet de 93 pages (à ouvrir et à garder sous le coude pour la suite ;).

    Remarque: Ce document (2.2 page 26/93) contextualise la RE2020 par rapport à la précédente RT2012.
    L’objectif initial des RT était (et est toujours) de réduire les pertes d’énergie entre l’intérieur et l’extérieur. Une bonne idée, tout le monde en convient.
    Les RT2004 et RT2008 étaient plutôt « prescriptives » (« obligation de moyens » dans le jargon du BTP) tandis que la RT2012 impose une « obligation de résultats » suivant des critères qui lui sont propres.

    Sur le site du Ministère du Développement durable, on peut trouver énormément d’infos utiles et ces liens spécifiques à la suite du propos :

    Bien que le mot logiciel ait attisé votre curiosité, parlons de la référence en matière de bâtiment en France: le CSTB.

    Le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB)

    Présentation

    Le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment a été créé en 1947 et fonctionne aujourd’hui sous le statut d’Établissement Public à caractère Industriel et Commercial (EPIC). Son existence est entérinée dans le Code de la Construction et de l’Habitat, (en particulier, ses missions dans l’article 121-1)

    I.
    - réaliser ou faire réaliser des recherches touchant à la technique, l’économie, l’environnement, la performance énergétique, la qualité sanitaire, la sociologie et, plus largement, au développement durable dans la construction et l’habitat ;
    - réaliser, pour le compte des services du ministre chargé de la construction et des autres ministères, des études contribuant à la définition, la mise en œuvre ou l’évaluation des politiques publiques dans le champ de la construction et de l’habitat. En particulier, il participe aux travaux d’une commission, constituée auprès du ministre chargé de la construction par arrêté de ce ministre, et chargée de formuler les avis techniques et les documents techniques d’application sur des procédés, matériaux, éléments, ou équipements utilisés dans la construction, lorsque leur nouveauté ou celle de l’emploi qui en est fait nécessite une expertise collective pour en apprécier l’aptitude à l’emploi.

    Il contribue à la diffusion et à la valorisation des connaissances scientifiques et techniques en matière d’habitation et de construction durable produites dans le cadre de ses recherches et études, par des publications et toutes autres mesures appropriées, dont la normalisation. Il participe également, en liaison avec les services intéressés et sous le contrôle du ministre chargé de la construction, aux activités de coopération technique internationale concernant l’habitation et la construction. Il peut se voir confier toutes missions ayant trait à ces mêmes matières dans le domaine international.

    II. - Parallèlement à ses missions d’intérêt général décrites à l’article L. 121-1, le Centre scientifique et technique du bâtiment apporte son concours aux organismes, groupements, collectivités et personnes physiques ou morales qui le sollicitent pour des missions se rattachant à l’objet de ses activités, notamment par la réalisation de prestations d’études et de conseil, d’essais, et la délivrance de certifications.

    C’est donc un acteur incontournable dans le domaine de la construction tant son champ d’intervention est vaste.

    En particulier, en ce qui nous intéresse, il lui revient la responsabilité d’évaluer la conformité d’une application destinée à faire une étude RE2020.
    Cet audit par le CSTB dure de 3 à 7 mois et se réalise suivant des règles.

    En voici un extrait (page 14/16):

    12 TARIFS
    Tarif pour l’évaluation d’un logiciel thermique : 5 700 € HT, dont 700 € HT de frais administratifs.
    Tarif pour l’évaluation d’un logiciel environnement : 4 000 € HT

    Ce n’est pas donné, mais supposons que je sois riche et venons-en enfin à nos logiciels.

    Calculs « Partie énergie »

    C’est peut-être la partie la plus simple à priori puisqu’il n’y a pas de moteur de calcul à programmer. Il n’y en a qu’un seul et il est fourni par le CSTB en version compilée appliquant les règles dites « Th-BCE 2020 ».

    Cela tombe bien car l’annexe III le pavé décrivant les modalités du calcul fait plus de 1800 pages.

    La figure 1 sur la page 5 du règlement d’évaluation (voir ci-dessus) présente l’architecture globale d’une application. Elle consiste à arranger des données synthétiques sur l’ouvrage, dans un format XML en entrée du moteur et à présenter convenablement les synthèses des résultats en sortie.

    Ainsi, toutes les applications « pro » ne différent que par leur interface utilisateur. FreeCad est tout à fait adapté à agréger les données pour générer le XML attendu en entrée par le moteur de calcul. Le module « Schedule » de l’atelier « BIM » pourrait être une bonne base de départ.

    Mais il n’y a ni accès direct à ce moteur de calcul (distribué en tant que *.dll semble-t-il !), ni a sa documentation.

    Toutefois, le CSTB met gratuitement à disposition l’application (sous Windows donc) COMETH. Il faut ouvrir cette plaquette PDF de 2 pages pour trouver l’adresse mél à qui écrire pour savoir comment accéder à l’application.

    Th-BCE != STD

    À noter que les règles Th-BCE utilisées par le moteur de calcul et présentées dans l’annexe III demandent la saisie d’un nombre assez conséquent d’informations. Pourtant, à quelques modifications près, rien de nouveau sous le soleil, car ce sont sensiblement les mêmes que pour la RT2012.

    Elles permettent de qualifier, après un passage à la moulinette logicielle, la performance de l’enveloppe du bâtiment (grosso modo: isolation+fenêtres/portes+étanchéité à l’air) avec un Bbio, une consommation en énergie avec un Cep, etc qui devront respecter certains seuils (voir 4.1 page 49/93 du guide RE2020) pour avoir le certificat.

    C’est une méthode approchée qui n’a rien d’une Simulation Thermique Dynamique.

    Ainsi, concernant les scénarios d’occupation, pour les règles Th-BCE (voir page 10/93 du guide RE2020)

    …, il s’agit toujours de scénarios conventionnels et de profils moyens, de sorte que les résultats ne peuvent être utilisés comme outil de prédiction des consommations.

    Une STD prendra en compte les « vrais cas d’usage » en fonction de scénarios bien plus précis (comme la variation journalière et saisonnière de la fréquentation, de l’utilisation des équipements, des apports naturels solaires etc).

    Pour cela, le CSTB vend le logiciel TRNSYS v18 en 1ʳᵉ installation à 4 500 € HT.

    Calculs « partie Carbone »

    C’est un grand changement réglementaire qu’introduit la RE2020. L’objectif affiché par le législateur est celui de la lutte contre le réchauffement climatique et pour cela considère que le « bilan carbone sur le cycle de vie » est un bon indicateur.
    En vérité, le seul terme « Carbone » est un peu réducteur. Si le « bilan Carbone » est bien l’unique critère environnemental qu’il faudra respecter selon les termes de la RE2020, l’étude porte en elle-même sur 36 données environnementales (voir page 39/93 du guide RE2020):

    Le calcul réglementaire réalise donc simultanément le calcul de 36 indicateurs
    correspondant aux 36 indicateurs inclus dans les données environnementales

    NDR: tout est en place pour une prise en compte ultérieure par le législateur d’autres critères environnementaux (eutrophisation des sols, impacts sur l’eau…)

    Le calcul est on ne peut plus simple: récupérer les quantités des différents types de produits et les multiplier par les données environnementales correspondantes (à peu de choses près, voir illustration 12 page 56/93 du guide RE2020).

    Avant de quitter brièvement le CSTB et de partir à la recherche de ces « données environnementales », je signale que son logiciel COMENV fait ces calculs d’impact « Carbone ». Il faut ouvrir cette plaquette PDF de 2 pages pour savoir qu’il vous en coûtera 100 € HT/an et pour trouver l'adresse du formulaire de contact (mais il y a une erreur de certificat) !

    L’Analyse du Cycle de Vie (ACV)

    Si vous avez lu Gestion du Cycle de Vie d’un Produit, vous n’apprendrez pas grand-chose de plus en lisant la page Wikipedia pour l'Analyse du Cycle de Vie.

    Il s’agit du même concept: évaluer suivant différents indicateurs l’impact environnemental d’un produit sur l’ensemble de sa durée de vie.

    Les grandes étapes du cycle de vie d’un produit

    Dans notre cas il faut distinguer deux types d’ACV.

    ACV Globale

    C’est ce que fait la RE2020 (voir 4.2 page 53/93 du guide) en ventilant l’impact « carbone » sur les différentes étapes du cycle de vie de l’ouvrage et sur des indicateurs Ic.. hybrides décrivant la part des composants, du chantier, de l’énergie en exploitation, de l’eau en exploitation (page 39/93).

    ACV Unitaire

    Comme on l’a vu, la RE2020 s’appuie sur des quantités (que FreeCad pourrait provisionner) et des données environnementales unitaires pour un produit donné (ou d’un type, d’une gamme). Par exemple 1 m³ de béton, 1 m² de placo BA13, 1 kg de colle à placo, etc. Dans le jargon de l’ACV, c’est une UF, Unité Fonctionnelle.

    Ces données environnementales, dans le cadre d’une étude RE2020 proviennent de plusieurs sources tel que précisé dans cette note explicative page 3/10.

    L’esprit est que si le fabricant n’a pas fourni de données environnementales pour son produit, des valeurs par défaut ou forfaitaires sont prises en compte dans le calcul. Ces valeurs sont volontairement défavorables pour inciter les acteurs de la fourniture de « composants » à publier des FDES.
    (voir également page 43/93 et l’organigramme page 44/93 du guide RE2020)

    Les FDES

    Les Fiches de Déclaration Environnementale et Sanitaire sont donc la base d’une étude RE2020 sur son aspect environnemental.

    Pour plus d’info sur les FDES

    Elles doivent répondre aux exigences de la Norme NF EN 15804+A2 (Contribution des ouvrages de construction au développement durable - Déclarations environnementales sur les produits - Règles régissant les catégories de produits de construction), à retrouver sur la boutique de l’AFNOR.
    Oui, ce n’est pas donné pour à peu près 25 pages franchement pertinentes sur un total de 51.

    La Loi n’impose pas aux fabricants des produits utilisés dans une opération de construction à publier une FDES mais, comme on l’a vu, cherche à les y inciter.

    Pour faire établir une FDES, il faut passer par un organisme agréé comme le CSTB: https://www.cstb.fr/nos-offres/toutes-nos-offres/declaration-environnementale-fdes

    Le ticket d’entrée est à partir de 6 500 € HT d’après cette plaquette PDF.

    Exemple de FDES pour un complexe plaque de plâtre 13 mm + isolant de 140 mm:
    https://www.base-inies.fr/iniesV4/dist/infos-produit/40016

    Les 36 données environnementales sont dans l’onglet « indicateurs » et sont ordonnées de la manière suivante:

    • en catégories: Impacts environnementaux, Consommation des ressources, Déchets, Flux sortants, Stockage du carbone
    • et chaque indicateur est détaillé pour chaque étape de son cycle de vie.

    Le lecteur perspicace aura relevé dans les adresses la chaîne de caractères inies, alors allons-y.

    L’INIES

    La base de données environnementales

    Appelée INIES, elle permet de consulter les FDES. Elle est déclarée en accès libre. https://www.base-inies.fr/ vous renvoie l’erreur 403 de l’Apache « Tomcat » pas content, il faut aller librement sur https://www.base-inies.fr/iniesV4/dist/consultation.html .

    Pas mal de changements depuis mes dernières visites il y a 10 ans au moins.

    • l’interface s’est modernisée (javascript) pour le meilleur. Ça marche très bien.
    • il y a beaucoup plus de produits référencés.
    • il y a maintenant des « configurateurs »
    • mais malgré tout, en connaissant la diversité de l’offre, il reste plein de trous dans la raquette: https://www.inies.fr/la-re2020-booster-de-la-production-des-fdes-et-des-pep/ (fin 2023: 3630 FDES et 961 PEP seulement)
    • et puis comment utiliser tout ça dans le cadre de l’ACV Globale pour pouvoir vérifier la conformité à la RE2020 ?

    Le webservice de l’INIES

    Par un service web bien entendu: https://www.inies.fr/programmes-et-services/le-webservice-des-donnees-numerisees/

    Il faut d’abord demander l’accès au service: https://www.inies.fr/ressource/formulaire-de-demande-dacces-au-webservice/

    Dans ce formulaire, le cas du logiciel libre est envisagé.
    Mais il faudra passer l’examen de la demande par le CSIB (d’après les CGV):

    Le Conseil de surveillance de la base INIES (CSIB) : désigne les membres constitutifs de ce comité qui définissent la politique générale en matière de contenu de la base INIES et approuvent les demandes d’accès au webservice.

    Plus d’informations sur la base INIES, son utilisation (stats et logiciels qui l’utilisent), les configurateurs de FDES, les PEP et l’ICV dans cette présentation synthétique de 35 pages.

    L’organisme INIES

    Organisation INIES

    Source: https://www.inies.fr/inies-et-ses-donnees/qui-sommes-nous/

    l’Alliance HQE-GBC a un rôle central aux côtés de l’AFNOR, du CSTB, de l’ADEME, de la FFB, de la CAPEB…

    HQE

    Logo marque HQE

    Source: https://www.hqegbc.org/qui-sommes-nous-alliance-hqe-gbc/usage-de-la-marque-hqe/

    Obtenir un label HQE est une démarche volontaire de la part du Maître d’Ouvrage (celui qui paye). Cela nécessite une certification délivrée par l’alliance HQE-GBC.

    J’en ai entendu parler (par la presse spécialisée) quand les premières certifications ont eu lieu vers 2005/2006

    https://www.hqegbc.org/qui-sommes-nous-alliance-hqe-gbc/notre-histoire-alliance-hqe-gbc/

    Quand soudain, patatras,

    Le coup de gueule de Rudy Riccioti

    Le bonhomme

    Résidence Argo

    Résidence Argo, Source: https://rudyricciotti.com/

    RR (son acronyme ;) est un architecte plutôt connu, qui aime le béton et a le verbe haut des gens du midi. Un sacré numéro.

    Comme d’autres qui ne sont pas du tout débordés dans leur vie de tous les jours (Ministre, moule de LinuxFr.org, etc), il aime aussi écrire: 14 bouquins pour sa part (!) dont

    La trilogie « HQE »

    Les liens sont vers le site Babelio

    1. HQE Transbordeurs (22/03/2007)
    2. HQE les renards du temple Al Dante (21/11/2009)
    3. HQE - La HQE brille comme ses initiales sur la chevalière au doigt Le Gac Press (25/04/2013) Le Gac Press (25/04/2013)

    Citations de Babelio aussi:

    « La HQE, véritable privilège des pays riches de niquer davantage la nature en paraissant vertueux. »
    R.R., conférence 12.07.27, Palembang

    « Le sigle le plus démagogue jamais inventé protège ses initiales, confirmant là ce désir de pouvoir sur un territoire d’intérêt public… »

    Ce que j’en pense

    C’est un pamphlet pas bien épais. Le numéro 2 est une version revue et légèrement augmentée du 1 (pour répondre à la polémique sans doute ;) et le troisième reprend les deux premiers en y ajoutant un épilogue.
    Comme conseil de lecture je dirais de prendre le trois.

    Le ton est incisif et rentre dedans jusqu’à parfois paraître outrancier. Mais sur le fond, l’essentiel du propos me semblait pertinent à l’époque: HQE, un lobby technico-scientifico-économique a mis la main sur une usine à gaz (qu’il va construire et imposer) qui demande à « numériser » l’acte de construire et à en décomposer le moindre élément constitutif (FDES, ACV).

    J’y ai vu « pff, encore plus d’informatique quoi ». La RT2012 (obligatoire contrairement à une labellisation HQE) étant dans les tuyaux à cette époque-là, il y avait déjà de quoi faire. RR y voit un appauvrissement des savoirs et de la créativité par des règles aux origines douteuses qui produiront des solutions technico-économiques toutes faites pour des résultats médiocres en tous points.

    RR a raison

    Source: https://qualiteconstruction.com/ressource/batiment/decollement-ite-renovation/

    Conseil de lecture: N’hésitez pas à visiter ce site, il regorge d’excellentes fiches techniques.

    Sur ce point, il est vrai que l’on voit pas mal d’immeubles de 10/15 ans d’âge dans un état assez pitoyable. C’est plutôt rageant.

    Ce qui est paradoxal dans le propos de RR, c’est que l’industrie du béton (qui pèse très lourd), son matériau de prédilection, a été en pointe sur ce sujet. Les premières FDES en étaient toutes issues (parpaing, bordure de trottoir, prédalle…) suivie par les plaques de plâtre et les isolants.
    Pour le premier concerné, le bilan carbone est au centre de ses préoccupations au vu des quantités astronomiques mises en œuvre et du mode de production du ciment, très énergivore. Être au plus près des faiseurs de lois était une décision naturelle. Avec ses gros moyens elle a pu s’adapter sans trop de mal à cette nouvelle donne.

    Aujourd’hui de quelques adhérents à HQE (c’est une association, rapport moral et activité 2023 en date de juin 2024) le panel s’est bien diversifié et on y trouve tous les aspects du métier.

    La base INIES s’est bien diversifiée et (cela m’intéresse) j’ai eu la bonne surprise de trouver cette FDES:

    https://www.base-inies.fr/iniesV4/dist/consultation.html?id=28898

    Mur en Adobe (Terre crue + paille + granulats éventuels)

    UF: Assurer la fonction de mur porteur sur 1 m² de paroi, pour une épaisseur comprise entre 14,5 et 35 cm, une conductivité thermique comprise entre 0,4 et 0,6, et une durée de vie de référence (DVR) de 100 ans.

    Cette FDES (que je vous recommande de lire si le(s) sujet(s) vous intéress(ent), elle est dans l’onglet « Documents ») est générique pour toute opération mettant en œuvre cette technique en France. Ce qui est remarquable.
    Elle est à l’initiative de la Confédération Nationale de Construction en Terre Crue.

    Une FDES doit être renouvelée et affinée, ils continuent donc de collecter des données relatives aux chantiers auprès des acteurs de la filière

    Lien vers le questionnaire

    Bravo les gars, avec peu de moyens ils ont fait rentrer une méthode de construction ancestrale et à l’impact carbone très faible dans l’ère de la numérisation à tout-va.

    Sur ces bonnes nouvelles, passons à

    La suite et la fin

    Formats ouverts IFC, BCF, le BIM, les BET, la MOE, et autres acronymes

    Dans une prochaine dépêche sans doute. On y retrouvera FreeCad. Il n’a pas dit son dernier mot.

    Et le logiciel pour faire l’étude et émettre des attestations RE2020 ?

    Aux problèmes d’accès aux ressources et services qui ont été abordés, il faut ajouter que les cahiers des charges sont bien entendu plus touffus que ce qui a été présenté et surtout, que la RE2020 évolue régulièrement. Par exemple ce qui y est intégré au fur et à mesure au nom du titre V (des systèmes: VMC, PAC… 66 à ce jour, chacun avec sa façon d’être pris en charge par la RE2020 pour calculer les différents Ic..)

    https://rt-re-batiment.developpement-durable.gouv.fr/titre-v-r322.html

    Question bonus

    https://mdegd.dimn-cstb.fr/tickets

    Il y a un lien avec le propos ci-dessus, lequel ?

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    24 ans de libcurl

    Curl est un outil en ligne de commande destiné à récupérer le contenu d’une ressource accessible par un réseau informatique et gérant de nombreux protocoles.

    Curl est un outil essentiel pour de nombreux usages, pris en charge par une gamme très large de systèmes d’exploitation, d’architectures matérielles, de l’objet connecté à l’embarqué spatial en passant par l’informatique classique ou les consoles de jeux. Il évolue rapidement et fréquemment, voir par exemple l’arrivée prochaine de HTTP3 pour curl dans Debian unstable (avec le backend gnutls). Son domaine d’utilisation pourrait encore s’étendre avec l’apparition de wcurl dans Debian et bientôt dans le monde entier ?

    Il y a 24 ans, une division du code entre une interface ligne de commande et une bibliothèque a été faite.

    (Cette dépêche est principalement basée sur l’annonce anglophone par Daniel Stenberg, auteur principal de curl et libcurl ; dépêche rédigée sur un téléphone embarquant curl 7.80, pas vraiment la dernière version…).

    La première version de libcurl, baptisée 7.1, date du 7 août 2000. La version de curl précédente, la 6.5.2, pas encore séparée entre une interface ligne de commande et une bibliothèque. Il s’agit de l’écart le plus long entre deux versions de curl. La création de la bibliothèque a été très largement réalisée par Daniel Stenberg seul.

    Il décrit son choix de division ainsi : c'était juste une intuition et une conjecture. Je ne savais pas. Je n’avais pas fait de recherches sur cela ou autre chose. Je me suis juste lancé en me disant qu’on verrait plus tard si j’avais raison ou tort.

    Le nom de la bibliothèque a été choisi faute d’une meilleure idée. L’API a été définie comme étant bas niveau (on peut toujours ajouter une API de plus haut niveau par-dessus), en observant ioctl(), fcntl() et les fonctions du genre. Le code est en C, langage de prédilection de l’auteur principal.

    L’API a bien vieilli : 17 fonctions encore présentes proviennent de la 7.1 ; elle est passée de 17 000 lignes à 171 000 ; elle a survécu aux révolutions HTTP/2 (transferts multiples multiplexés) et HTTP/3 (passer de TCP à UDP).

    L’usage a aussi bien progressé depuis l’entrée dans PHP 4.0.2 comme premier binding (ici rendre utilisable en langage PHP), moins d’un mois après la publication de la bibliothèque.

    En 2002 a été ajoutée une API multi pour gérer des transferts parallèles concurrents de façon illimitée dans un même thread.

    Puis en 2006 vient en surplus le multi_action avec des mécanismes orientés événements, avec une boucle événementielle (comme epoll).

    Les premiers changements douloureux sur l’interface binaire (ABI) ont entraîné une volonté de stabilité, de ne jamais casser volontairement cette interface, et ce depuis 2006.

    libcurl possède des bindings vers au moins 65 langages de programmation, fonctionne sur au moins 103 systèmes d’exploitation et 28 architectures de processeur, est présent dans les bibliothèques standard de langages de programmation (Python, Java, Rust ou .Net). Son ancien concurrent principal libwww n’est plus développé. Bref 18 ans de stabilité d’API et d’ABI.

    L’utilisation de libcurl continue de croître (de plus en plus d’objets connectés notamment). Et curl de manière générale supporte rapidement les nouveaux protocoles et leurs évolutions. À noter que l’auteur principal ne mentionne pas dans ses projections ce qui me semble le plus gros risque pour Curl/libcurl, la difficulté d’avoir une personne prête à lui succéder si quand cela s’avérera nécessaire.

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