No code before it was cool, but fake
La startup britannique fondée en 2012 a annoncé entamer une procédure d’insolvabilité. Elle était pourtant soutenue financièrement par Microsoft. Mais Builder.ai, qui prétendait proposer une solution pour créer des applications presque no code avait été accusée de sous-traiter à des humains, installés en Inde. Il lui est maintenant reproché des manipulations financières.
L’entreprise l’a annoncé il y a deux semaines sur LinkedIn, « Engineer.ai Corporation, connue sous le nom de Builder.ai, va entamer une procédure d’insolvabilité et nommer un administrateur pour gérer les affaires de la société ». Dans ce message, la direction affirme qu’elle « n’a pas été en mesure de se remettre des défis historiques et des décisions passées qui ont mis à rude épreuve sa situation financière ».
Des promesses en avance sur la mode du « no code »
Mais dès cette annonce, le Financial Times expliquait que les ennuis de Builder.ai arrivaient après une enquête interne montrant de potentielles manipulations dans les chiffres de vente de l’entreprise.
L’entreprise affirmait, déjà bien avant les vagues de l’IA générative, du « no code » et du « vibe code », proposer un outil nommé Natacha intégrant de l’intelligence artificielle et permettant de créer une application ou un site web « aussi facilement que commander une pizza », selon son CEO de l’époque Sachin Duggal.
Avec cette promesse, Builder.ai a levé plus de 500 millions d’euros auprès de financeurs comme le fonds souverain du Qatar mais aussi de Microsoft. Et elle a, à un moment donné, été évaluée à environ 1,5 milliard de dollars.
Dès 2019, des soupçons de sous-traitance à des humains en Inde
Pourtant, dès 2019, des salariés et ex-salariés expliquaient au Wall Street Journal que l’entreprise exagérait ses capacités en matière d’IA pour attirer les clients et les investisseurs. L’entreprise était connue sous son nom officiel d’Engineer.ai.
Le journal étasunien avait pu consulter des documents qui indiquaient que « l’entreprise s’appu[yait] sur des ingénieurs humains en Inde et ailleurs pour effectuer la majeure partie de ce travail, et que ses prétentions en matière d’IA [étaient] exagérées, même à la lumière de la mentalité « fake-it-till-you-make-it », courante parmi les start-ups du secteur technologique ».
Après un changement de nom commercial, l’entreprise a quand même réussi à continuer à convaincre les investisseurs. En octobre dernier, l’entreprise avait encore emprunté 50 millions de dollars auprès d’un consortium d’entreprises mené par l’Israélienne Viola Credit. Elle avait annoncé cet emprunt en avril dernier au Financial Times tout en admettant avoir eu des problèmes financiers.
Des comptes suspects pour clore le cercueil
Mais, un mois après, le journal financier apprenait que l’entreprise avait revu ses revenus à la baisse : « une estimation antérieure de 220 millions de dollars pour les revenus de 2024 a été révisée à environ 55 millions de dollars, tandis qu’un chiffre de ventes totales de 180 millions de dollars pour 2023 a été révisé à environ 45 millions de dollars, ont ajouté les personnes interrogées ». Or, c’est bien sur ces anciennes estimations que l’emprunt avait été accordé. Le groupe de prêteurs aurait donc retiré 37 de ses 50 millions de dollars, selon Les Echos.
Selon Bloomberg, Builder.ai aurait créé un montage avec la startup de média sociaux indienne VerSe Innovation pendant des années pour gonfler ses ventes. « Les deux entreprises se seraient facturées régulièrement des montants à peu près identiques entre 2021 et 2024 », explique le média étasunien qui a pu consulter des documents internes.
Le co-fondateur de l’entreprise indienne réfute totalement ces accusations, affirmant à nos confrères qu’elles étaient « absolument sans fondement et fausses ». Du côté de Builder.ai, la direction n’a pas voulu commenter.
Depuis l’annonce de la faillite, les accusations d’une fausse IA refont surface. Le Times of India qualifie Builder.ai de « startup ayant fait passer 700 ingénieurs situés en Inde pour une IA ».